Tiers Livre, le journal
nature morte aux Dames Blanches

 


Trois jours pause clinique. On n'emmène pas l'appareil photo numérique au bloc opératoire. Suite d'heures immobiles, variation des heures à la fenêtre. Efforts par quoi on regagne le corps absent. Même dormir ni manger n'ont d'importance. Partage et réconfort, la visite de l'après-midi. Le perchoir à quoi laborieusement on s'accroche pour bouger. La carafe d'eau, et le poste télé aussi inutile, gros et idiot que ses congénères dans la livre d'Oliver Rolin qui les dénombre (Suite à l'hôtel Crystal, un régal). Premiers pas laborieux du lendemain, douloureux et courbé, dans le couloir, et le petit réveil qui marque chaque demi-heure des jours et des nuits. Pensé beaucoup à Philippe Rahmy et son livre à paraître bientôt, Mouvement par la fin. Sur un coup de tête, c'est Voyage au bout de la nuit que j'ai amené avec moi et relu jusqu'au bout. Dernière lecture remontait à vers 1981. Pages d'immense beauté (portrait de Molly à Detroit, premiers jours dans l'asile du Dr Barathon). Parfois ces passages de dix lignes qu'on relit 4 à 5 fois de suite pour le chant, la syncope ou l'image arrachée à la nuit. Etonnement, à vingt ans de distance que l'appareil critique du Pléiade d'Henri Godard reste aussi magistral et vif, je relis aussi intégralement les notices. Fiction et sources réelles, tragique intérieur de Louis-Ferdinand Destouches indémêlable, qui se jette dans son impasse.

FB, 13 décembre 2004

 

Ce matin, retour dans le "VSL", taxi médical, la brave dame était en colère parce qu'à cause de ma Mutuelle de branque (société des auteurs et compositeurs dramatiques, vous pensez) on avait perdu du temps pour les papiers, en plus elle avait ses gosses à prendre à l'école. Elle conduit à toute allure pour se venger, démarrages, cahots, je m'arcboute des 2 pieds et des 2 mains, parfois je crie, elle doit bien le voir et le savoir mais c'est pas grave. C'est qu'elle a pris 2 courses pour elle toute seule, elle me dépose mais continue vers Joué-les-Tours avec un vieux monsieur béquilleux qui est tout ému de revoir la Loire dans son brouillard givrant de l'hiver: la dame, elle se fera payer par la sécu (et ma Mutuelle) 2 courses pour le prix d'une: moi qui croyais en avoir fini avec Céline, d'un coup je retrouve un des personnages de Mort à crédit. Et puis allez, on oublie: chez soi au lit, la maison calme, ordi sur les genoux, passer voir les blogs des copains, reprendre le fil: après tout ça doit pas être plus grave que quand gamin on séchait l'école pour la grippe, et justement se faire descendre par un des gosses Borges tome 1 et puis, et puis... La Rabouilleuse. Je vais relire la Rabouilleuse. A demain.