67 | Montparnasse tes hontes #1, le comptoir à demis

tags : Paris, Montparnasse


Ce texte est un fragment d’un travail en cours, amorcé le 20 décembre 2020 et non destiné à publication hors site (pour l’instant).

Le principe est d’aller par une phrase par lieu précis de remémoration, et d’établir la dominante sur la description même, si lacunaire qu’elle soit, du lieu — donc public, puisque bar, bistrot, resto — de la remémoration.

La rédaction ni la publication ne sont chronologiques, restent principalement textuelles, et la proposition de lecture s’appuie principalement sur la navigation par mots-clés depuis la page des index lieux, noms, dates.

Point régulier sur l’avancée de ce chantier dans le journal #Patreon.

 

67 | Montparnasse tes hontes, le comptoir à demis


Tout ça pourrait être une fiction mais ce qui n’en est pas une c’est que pendant vingt-cinq ans au moins deux fois la semaine gare Montparnasse avec pauses aux vacances, et ces six années Cergy deux jours d’affilée en gros tu bosses neuf heures plein pot sans échapper au bâtiment, puis la presse RER et métro quand ça marche et comme tu as ce tout petit battement avant le train te voilà devant ce petit bout de comptoir en angle, sur la face côté hall ils ont cafés, sandwiches, viennoiseries et là dans le repli de ce couloir venteux qui donne sur les escalators c’est juste pour quatre ou cinq types debout comme toi, si on est trop tu te mets de profil et surtout jamais tu ne lâches ton sac, le serveur demande à peine, juste pour savoir lequel tu veux, de demi, 16 ou Heineken ou Leffe et il te le pose débordant devant toi on ne va pas ici et avec ces types-là s’encombrer de manières tu as déjà posé la pièce correspondant au tarif parce que tu le sais par cœur tu bois ça lentement si tu as le temps et pas trop de monde, plus vite si c’est moins de temps ou plus de monde et tu le sens direct dans la tête, un shoot qui étourdit d’un seul coup les trente voix, les angoisses d’avant cours, les tracas et en bonne partie les visages, tu prendras le train moitié assommé mais au moins quand tu arrives chez toi c’est un sas, tu émerges comme dans un monde séparé et c’est ce que tu voulais : après il y a eu des travaux dans la gare et ils ont remplacé par un Starbuck, le monde va mieux c’est sûr, personne pour se plaindre qu’ils aient supprimé le petit comptoir bleu dans le couloir venteux mais est-ce que tu as regret pour autant même pas.

 


responsable publication François Bon © Tiers Livre Éditeur, cf mentions légales
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1ère mise en ligne et dernière modification le 23 janvier 2022
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