Bon & Toeplitz #135 #4 | Suicide sur inscription

« 135 façons de sauver la Terre », projet de performance infinie, sur texte improvisé


 


 135 façons de sauver la Terre, sommaire général & présentation du projet ;

 vidéo ci-dessus (texte intégral ci-dessous) : atelier-studio de Kasper Toeplitz, Paris, le 24 juillet 2020.

 version complète du livre en préparation, mise à jour permanente, dans les ressources Tipeee de Tiers Livre.

 sur Kasper T Toeplitz, voir son site Sleaze Art

 135 façons de sauver la Terre est un projet mené avec le Centre de musique contemporaine Art Zoyd — on a besoin de la scène, on a besoin de temps studio : nous contacter pour performance ou résidence, Fr ou plus loin.

suicide sur inscription


qui souhaitait le suicide on le lui accordait
qu’est-ce que ça changerait qu’est-ce que ça améliorerait qu’est-ce que ça changerait qu’est-ce que ça faciliterait
en quoi accorder le suicide n’était changer solution individuelle pour qui le commettait
mais pouvait faciliter à échelle générale y compris par la possibilité même que ça existe
on y mettait des conditions
d’abord tu déposais un dossier avec devoir d’attente
une semaine un mois un an c’était à définir
souvent tu changeais d’avis
mais c’était peut-être ça le principe tu émettais ta volonté d’un possible choix
commettre le suicide
si on mettait un délai d’un an est-ce que cette année tu la vivais pareil
qu’est-ce que tu abandonnais
comment tu regardais ceux qui te regardaient
qu’est-ce que tu attendais qu’est-ce que tu demandais
et finalement il n’y avait pas besoin d’un an
ça finissait tout seul ou bien parce que simplement
des petites choses recommençaient
les petites choses recommençaient parce que les autres une à une lâchées
on avait testé différents délais on pouvait attendre une heure on pouvait attendre trois jours on pouvait attendre un mois
mais on se disait si t’attendais un an t’y gagnais quoi
que ce soit possible est-ce que pour toi c’était plus confortable
tu recevais le courrier électronique avec le code d’accès et double vérification par téléphone parce qu’il ne faut pas tricher avec choses-là
non mais imagine qu’un autre puisse en décider à ta place
« conformément à votre demande déposée tel jour telle heure sur le serveur évidemment sécurisé »
l’autorisation expresse de commettre le suicide vous était délivrée
c’était simple c’était paisible
il y avait cette condition
parce qu’évidemment comment l’idée individuelle pouvait être reliée à l’idée collective
l’idée c’était juste dire il fallait que ce soit public
on s’en était tenu à ça et seulement ça
que ce soit juste public
on avait différents lieux certaines villes avaient même voulu se spécialiser il y a tellement de villes qui vont mal nos villes de provinces qui s’endorment
elles s’étaient spécialisées l’une il y avait des champs de tir tu te plaçais comme il fallait tu appuyais sur le bouton pom pom et tout clean lavage vapeur express éjection haute pression
une autre c’était juste une colline tu t’asseyais tranquillement sur la colline c’était une très haute colline étagée
peu d’arbres les arbres loin autour et au bord de la rivière en bas une grande promenade où les gens déambulaient les gens venaient voir les en-suicide
les gens passaient te voyaient toi simplement assis dans l’herbe quelque part dans l’herbe sur la haute colline en amphithéâtre
tu prenais simplement les médicaments ralenteurs tu t’endormais les médicaments ralenteurs te laissaient conscients mais tout finissait doucement
la nuit on reprenait les endormis au matin c’était prêt pour les suivants
public ça attirait du monde la petite ville elle revivait
tu ne fais pas ça à la légère si c’est en public
c’est comme écrire et envoyer des mots
c’est pas la même chose si c’est pour toi ou pour lancer devant
visible par tous les autres
et puis toi-même
qui est-ce qu’a pas envie de suicide un moment l’autre
bien tu viens voir comment ça se passe là tranquille les ralenteurs
comment ça se passe que tu passes
là où pan pan fusil bouton vapeur ça allait vite le gars là boum et puis plus là
les ralenteurs comme un dimanche un éternellement dimanche et voilà
on avait d’autres techniques et des perfectionnées
tu passes dans un couloir tu avances dans le couloir, le public là-haut sur la galerie accoudé et trente paires d’yeux qui te regardent
puis soudain plus personne dans le couloir et personne là-haut qui comprend comment ça s’est passé on applaudit on dit oh
finalement des fois t’aimais pas trop voir
on se disait que rendre visible le suicide guérissait du suicide
on n’était pas sûr que rendre visible le suicide n’attirait pas au suicide
ceux qui finalement n’étaient pas si prêts
est-ce que venir voir était mieux venir voir pas bien mieux ou même tout le contraire
faut bien reconnaître c’était mal fait dans le monde d’avant
ceux qui se balançaient sous les trains ceux qui prenaient des médicaments à rats à chevaux ceux qu’attrapaient leur ceinture autour du cou et jamais ça ratait
ceux que longtemps après on retrouvait dans les appartements
ça a jamais été très beau ça a jamais été très propre
ou les appels téléphones et numéro détresse
des services exprès des services pour ça une voix qui est là
allo suicide allo suicide vous êtes qui vous êtes où
parlez-moi sortez de chez vous attendez on va parler
on n’avait jamais empêché les suicides
à l’automne dans le milieu de l’hiver ou quand tout s’accélère au printemps mais pour toi rien qui s’accélère
la courbe des suicides juste un baromètre de la santé du monde
alors ouais maintenant ça y est tu voulais le suicide t’avais le droit
tu déposais ton dossier tout était organisé
il y avait juste ça fallait que ce soit public fallait que ce soit visible
non mais franchement toi tu vois ça
une ville ou le monde tout entier
où ne restent que ceux qui ne s’interrogent pas
sur l’intérêt ou pas de se donner la fin de vie ou pas
un monde une ville où ne restent que ceux qui disent
ah on s’en fout nous on s’en fout de se donner la fin de vie
est-ce que tu donnes le monde est-ce que tu donnes la ville
à ceux qui s’en foutent du suicide
à ceux qui s’en foutent de partir et puis basta
et comme toi ça te travaille du dedans
et comme dans la ville dans leurs yeux tu le lis
comme ça travaille partir et puis basta
et tu le sais bien tout ce qui pèse
ce qui pèse sur le dos
ce qui pèse dans le dedans
ce qui se bloque là dans le ventre
ce qui se bloque là boule dans respiration
ce qui se bloque là gorge tête et se dire
partir et puis basta partir et puis basta
tu leur laisses le monde à ceux qui s’en foutent partir et puis basta
tu leur laisses tout ça les sans boule la ville le monde
la loi venait de passer maintenant c’était officiel c’était permis
déposer son dossier sur le serveur sécurisé
commettre le suicide facile paisible aisé
un an d’attente tu recevais convocation individuelle vérification sécurisée
l’heure et l’adresse selon le mode choisi indiqué
et seule condition public
seule condition les spectateurs
seule condition l’échange de questions
dis c’est comment juste avant
dis c’est comment juste avant
dis c’est comment juste avant
2020.07.06


responsable publication François Bon © Tiers Livre Éditeur, cf mentions légales
diffusion sous licence Creative Commons CC-BY-SA
1ère mise en ligne et dernière modification le 10 août 2020
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