dimanche 3 blogs, 29

lectures remarquables au fil de la semaine


|Pas perdus, de Jérémy Liron |


 Pas perdus, de Jérémy Liron. Ne même plus savoir si j’ai déjà parlé du blog de Jérémy dans cette rubrique, mais pas si grave puisqu’il faut déjà noter que l’ancien blogspot.com, si longtemps fréquenté, est maintenant rassemblé sous le nom de domaine lironjeremy.com, permettant une vue synoptique sur le travail de Jérémy Liron artiste, peintures et dessins, le travail majeur qu’il installe depuis quelques années sur ces paysages pris aux bords de Marseille ou Lyon, et sur lesquels il nous a donné à plusieurs la chance d’écrire. Mais dire que Les pas perdus est un blog majeur c’est précisément pour le déplacement des genres, l’affirmation que la démarche ici est à égalité dans peindre, écrire, voir, photographier, voyager. Ainsi, partant d’une sculpture de Georg Korbe : « De ne pas être plus. De sa propre étroitesse. D’être voué à la perte, au tragique, à l’usure. » Ou bien directement de l’écriture même : tournures et style et obscurités. Ou cette improvisation sur la notion de regard dans le dos. Me souvenir de ma surprise aux peintures à l’huile avec paysages urbains découvertes à l’ENSBA en 206 ou par là, puis le visage timide avec qui la conversation lentement s’engageait (on ne doit pas être plus doués l’un que l’autre pour l’exercice) mais qui n’a plus cessé. Même plus d’attente, maintenant : Liron peint, écrit, publie et c’est central. Suivre aussi sur Facebook Jérémy Liron.

 

| Vivre, de Gwen Denieul |

 Rêve étonnamment précis cette nuit, c’est le titre que ne dément pas le texte de Gwen Denieul. Y retrouver une écriture accueillie dès le début de nerval.fr. Biographie très lapidairement exprimée : « Né à Saint-Brieuc en 1973. Ressuscite vingt ans plus tard dans un centre commercial en Allemagne. » Ce qui est fort dans ce blog intitulé sobrement Vivre, c’est la façon dont il s’agit moins de billets au coup par coup que d’un noyau d’une même filée narrative, étonnement claire et structurée, qu’on voit devant soi se déployer pour construire son territoire – ainsi cet échange avec Isabelle Pariente-Butterlin, Le spectacle de la mer après toi, ou ce j’ai peur de me connaître. Suivre aussi sur Facebook Gwen Denieul.

 

| Matériau composite, de Guénaël Boutouillet |

 Matériau composite, de Guénaël Boutouillet : l’étonnant serait probablement le singulier du titre. Tenir un blog critique sur le web c’est un paradoxe, puisqu’on envoie de façon exogène vers le monde de l’imprimé qui s’en préoccupe assez peu. La plupart des auteurs dont parle Guénaël n’ont pas d’activité réseau. C’est un enjeu lourd : par exemple, je me régale depuis un an à tenir cette rubrique irrégulière, non en ce qu’elle me permet d’amis ou de démarches qui m’importent, mais parce que les confronter me permet de réfléchir à la question même du blog, comment il s’organise, quelles strates d’écriture s’y déploient. Critique susceptible de coups de coeur, comme disent les libraires, ainsi pour L’ours est un écrivain comme les autres de William Kotzwinkle, que je n’aurais pas acheté (dans ma librairie) sans le billet de Guén’ – et des exceptions quand ça parle quand même de web, ou d’un auteur qui y est actif, comme Anthony Poiraudeau. On a même un super index tenu manuellement dans le menu en haut de page. L’activité de Guénaël Boutouillet n’est pas réductible à son travail critique, j’ai assez fait d’aventures en binôme avec lui pour le savoir. Il a aussi fonction choisie d’arpenteur, sur le terrain même que depuis son 5ème étage du Corbu Rezé on aperçoit de très loin. Littérature par l’oral, la rencontre et la confrontation, l’atelier. Ces derniers mois, les livres que j’ai lus je me suis souvent promis d’en faire état ici sur mon site (par exemple un livre très fort, dans les coulisses de la fabrique de théâtre, Hors jeu, de Gabriel Dufay et puis j’ai repoussé sans arrêt), plus la niaque pour servir de paillasson au livre, vous savez, le vrai. L’envie qu’ici le web respire par le web. Mais c’est ce que je retrouve dans l’intitulé du site de Guénaël, audacieux en soi : textes, actions, &. Alors entrez dans le &, et n’hésitez pas à commencer par son bilan 2014 (question du synoptique toujours) : ce qui manque est ce qui compte. Suivre aussi sur Facebook Guénaël Boutouillet.

 

 

| et coda, Paul-Armand Gette |

 Paul-Armand Gette n’a pas donné d’autre titre à son site. Pourtant, en exact contrepoint au site Jérémy Liron, c’est bien d’un artiste plasticien majeur qu’il s’agit, dont nous suivons tous le travail depuis très, très longtemps. Il est né le 13 mai 1927 et ses premiers travaux remontent presque au temps de ma propre naissance, vous voyez ça. Si on veut rejoindre les travaux (partie émergée des), mieux vaut passer par sa galerie. Mais si on utilise toujours ce cliché de la profusion pour le web nous savons bien, nous qui y respirons, combien le beau travail – celui qui nous concerne, qui creuse, explore, invente – est rare et dénombrable. La singularité du blog de Paul-Armand Gette c’est qu’il est avant tout textuel, et qu’il dialogue avec un autre aspect non totalement central de son oeuvre, une suite (le mot importe) de photographies qui sont le rapport de sa main à son travail, donc la photographie presque comme carnet du making of, positionnant ainsi l’autonomie de l’écriture vis-à-vis de l’autonomie plastique (ainsi, celle ci-dessus). Une sorte de dialogue infini où « PA » représente sans doute les initiales de l’auteur, dans cette forme littéraire dialogique parfaitement identifiée, et qui peut l’emmener aussi bien vers Rousseau que vers Fourrier et bien d’autres. Alors oui, le blog de Paul-Armand Gette fait bien partie de notre galaxie littérature. Suivre sur Facebook Paul-Armand Gette.

 

Photographies haut de page : faiseur de liens, constructeur d’objets bizarres (en survol), Shenzhen, parc urbain, 29 novembre 2014.

responsable publication François Bon © Tiers Livre Éditeur, cf mentions légales
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1ère mise en ligne et dernière modification le 28 décembre 2014
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