Conversations avec Keith Richards | 7, de la terre

Paris, sur Saint-Honoré, appartement de Keith Richards.



Conversations avec Keith Richards
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MY MUSIC IS ABOUT CHAOS. IT REFLECTS MY LIFE, AND PROBABLY EVERYBODY ELSE’S. KR.

 

À cet instant, Keith Richards disait en riant : « J’aime de la terre qu’elle me supporte. »

Keith Richards : « Nous Rolling Stones avons eu la chance d’une vie indifférente à la terre — nous roulions autour. »

Keith Richards disait souvent : « J’ai beaucoup arpenté la terre, mais on avance en soi seulement quand on est immobile. »

Keith Richards m’avait confié : « Si la terre est belle comme au cinéma, méfie-toi. Tu y es aussi spectateur de toi. »

Keith Richards disait : « L’émerveillement de rouler longtemps dans les plaines et montagnes d’Amérique — une des rares choses dont j’ai toujours goût. »

Keith Richards disait parfois : « La scène où tu joues, n’importe où, n’appartient pas à la terre — elle est le monde du dessous que tu y fais surgir. »

Keith Richards disait souvent : « Les paysages de la terre sont grands, étonnants. Mais dans l’intérieur gris seulement tu sais la bête qui ronge. »

Keith Richards disait souvent : « Le rock’n roll est l’antidote au mal que nous avons fait à la terre. »

Keith Richards ajoutait alors : « Si tu veux que je te dise des exemples, n’hésite pas. »

Keith Richards disait souvent : « Le rock’n roll c’est habiter la partie démontable de la terre, le cirque qui l’exalte et hop, on démonte »

Keith Richards disait : « Le rock’n roll est ma terre — on n’y arpente que le paysage à notre semblance, images pour y survivre.  »

Keith Richards disait : « La terre est plus belle quand on y a plusieurs maisons. »

Keith Richards disait : « Remarque bien que Bob Dylan, qui en a dix-sept et ne m’a jamais invité dans aucune, est toujours aussi malheureux qu’un caillou. »

Keith Richards : « Survivre à la terre n’est pas le chemin pour qu’elle, elle survive. À toi d’apprendre le campement, le fragile. »

Keith Richards disait souvent : « La terre est ce qu’on voit quand sur terre on ferme les yeux. »

Keith Richards : « Comprendre que la terre est un bloc de temps ralenti : donc une chanson, juste un peu plus belle que les tiennes. »

Keith Richards disait parfois : « Si longtemps tu cherches le lieu où s’arrêter suffirait définitivement à la quête intérieure. »

Keith Richards disait parfois : « Jeune, tu cours la terre. Adulte, tu y campes. Âgé, tu l’implores. »

Keith Richards disait souvent : « Le rock’n roll, ce sont des villes où l’extérieur de la ville appartient encore à la ville. »

Keith Richards m’avait dit : « Je n’aime pas l’herbe, la campagne, les fleurs, les stations-service. Ne note pas. »

Keith Richards disait souvent : « La nuit est l’illusion que toutes les villes sont jointives sous la terre, et nous leurs passagers. »

Keith Richards avait dit : « Si j’apprécie le confort, c’est seulement pour avoir poussé le survivre à ce point qu’on aime bien un peu de chaud aux os. »

Keith Richards avait dit : « Le confort de celui qui aurait dû trente fois mourir, c’est la belle légèreté d’y penser mais – comment dire – comme tu vois ça à la télé, quoi. »

Keith Richards avait dit : « La télévision est le cancer de l’esprit, mais ça aide bien à passer son temps, quand même. »

Keith Richards avait dit : « Par exemple lorsque monter à une échelle ou monter à un arbre ne me fut pas spécialement favorable. »

Keith Richards avait dit : « Si la terre est la liste des lieux où nous avons passé, la somme de toutes ces listes est-elle la terre elle-même ? »

Keith Richards m’avait dit pensivement : « Je pense des drôles de trucs, avec tes cons de questions. »

Keith Richards m’avait dit expressément : « Ce lieu pour moi de plus parfaite adéquation à la terre, je te le dis, mais c’est notre secret. »

Keith Richards m’avait dit : « Note : le rock’n roll est le lieu de qui sur terre a perdu notion de la terre. »

Keith Richards disait souvent : « Ce que tu cherches sur la terre n’est jamais plus grand que ce bout de route où tu jouais enfant. »

Keith Richards disait parfois : « Traître est la notion de route : pour la comprendre, tu dois toujours aller où elle a fini. »

Keith Richards me disait : « Jamais eu plus grand sentiment de la terre que sur ces routes, là-bas, où elle ne finit pas. »

Keith Richards disait souvent : « Le rock’n roll a été inventé par l’impatience de qui s’use sur une route où peu importe le terme. »

Keith Richards disait parfois : « La terre n’est jamais plus grande que ce que tu en exhumes et classes, te regardant toi-même. »

Keith Richards m’avait dit : « Note : le rock’n roll c’est cette couleur de terre, si tu rêves qu’ici est creusée ta tombe future. »

Keith Richards disait souvent : « Plus intenses sont les paysages de la terre, plus c’est en toi-même que tu t’abîmes. Mais faut avoir une bagnole. »

Keith Richards : « Note : dessine en toi-même chaque paysage où tu as roulé, et sur la scène brûle-les ensemble au-dedans. »

Keith Richards disait parfois : « La terre autorise toujours de se tourner le dos à soi-même, mais gare à toi si tu coupes le contact. »

Keith Richards avait une variante : « La terre est ce qu’on a inventé de mieux pour tourner le dos à ses peurs. Évite juste les arrêts. »

Keith Richards disait : « Je nomme terre ce qui fait mal au monde, et nous guérit du mal du monde. Terre est l’extérieur de soi. »

Keith Richards disait : « Où nous avons mal, l’empreinte d’où la terre aussi a mal. Et rock’n roll le bruit de frottement, ici émis. »

Keith Richards disait parfois : « Tout le problème vient de ce con qui a dit qu’à continuer tout droit sur la terre tu reviens au même endroit. »

Keith Richards parfois : « La terre serait plus belle si à chaque extrémité du voyage tu trouvais pas un miroir dans les chiottes du drugstore. »

Keith Richards : « La terre est seulement la rançon de ne pouvoir fuir vers le ciel. Le rock’n roll est l’invention de cette plainte. »

Keith Richards disait : « Celui qui croit que la beauté de la terre dépend de la beauté de la voiture dans laquelle tu roules, ce fut moi aussi. »

Keith Richards disait souvent : « Où culmine la beauté de la terre, toi tu t’effaces — on porte chacun un grand canyon dans notre silence. »

Keith Richards disait parfois : « Où culmine la beauté de la terre, qui tu es, puisque toujours tu en repars ? »

Keith Richards : « Note : où culmine la beauté de la terre, prends une poignée de sable, et fais-en définitivement ton camp, ta maison. »

Keith Richards disait souvent : « Habite la beauté de la route qui défile — n’aie pas d’autre lieu que ton mouvement. »

Keith Richards : « La philosophie est l’art de qui cherche l’homme sur la terre, le rock’n roll n’appartient pas à la philosophie, tant pis. »

Keith Richards : « Appelle rock’n roll ce qui gronde dans le sous-sol. »

Keith Richards : « Appelle rock’n roll ce que tu jettes par-dessus ton épaule quand tu t’en vas. »

Keith Richards : « Appelle rock’n roll un bel accord de la majeur, et le regard profond qui va avec. »

Keith Richards m’avait dit une fois : « Dans un carnet j’ai écrit le nom de toutes les villes où j’ai passé, mais j’ai perdu le carnet. »

Keith Richards disait parfois : « Le lieu qu’on habite est le temps même du chant, quand cesse le chant tu n’habites plus nulle part. »

Keith Richards disait parfois : « J’ai chanté des noms de villes pour m’autoriser, le temps du chant, d’habiter moi aussi la terre. »

Keith Richards m’avait dit alors : « Encore cinq et suffit pour la semaine, ok ? »

Keith Richards avait ajouté : « On n’achète pas le sol de la terre — là où tu habites, laisse la porte ouverte au toi anonymes. »

Keith Richards : « Note : la terre est ce qui nous rend anonyme, la porte fermée de la voiture est l’oubli de la terreur du monde. »

Keith Richards : « Note : ne cherche pas le beau, la terre seule le sait, et s’en moque. Appelle rock’n roll cet interdit du tranquille. »

Keith Richards : « Note : dans notre prédilection pour les lieux anonymes, la quête du plus haut de soi, ce qui ne t’appartient pas. »

Keith Richards : « Note : n’encombre pas la terre — elle t’en remerciera en se montrant belle, et toi tu t’en vas. »

Keith Richards : « Est beau ce qui te grandit. »

 


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1ère mise en ligne et dernière modification le 22 février 2013
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