Mugby | Dickens traduit par Pierre Leyris

lecture mensuelle à la bibliothèque municipale de Tours, ce soir Kafka et Dickens (avec audio)


Lire chez soi Dickens, La maison d’Âpre-Vent, Le magasin d’antiquités, Dombey & Fils et tant d’autres, les plus connus c’est forcément toujours un enchantement : avec Cervantès, le seul auteur capable de vous faire pleurer et vous faire rire, et quelquefois les deux ensemble.

Et pourtant, pas une écriture facile, pour lui. Les migrations avec les 12 enfants en Italie, une fois l’à-valoir extorqué, les fuites en solitaire pour croire pouvoir s’y mettre, les retours à Londres sans un fric, et là l’écriture qu’on ne relit même pas parce que les journaux attendent la livraison engagée, mais l’écriture magique.

Et puis Dickens se produisant pour lire à voix haute, et la question qu’il nous est légitime à nous de creuser : quoi, dans cette magie de l’écriture, tient précisément au fait qu’il lisait à voix haute en public, des textes écrits pour ces séances ?

Et qui d’autre que Kafka (non, Dostoievski aussi a été passionné par Dickens au point d’en devenir étrange jumeau) pour coller d’aussi près à la fantasmagorie Dickens ? Aussi, ce soir, à Tours, commencerons-nous par Souvenir du chemin de fer de Kalda, un texte de Kafka (et presque son propre nom) qui est exactement le clone de cet Embranchement de Mugby dont Dickens a fait un de ses grands « contes de Noël ».

Et, la modernité de Dickens, nous avons toujours devant nous à l’explorer, la réinventer. Jean Gattegno, trop tôt disparu, en savait quelque chose (et ma dette).

Aussi, ce soir, c’est cette modernité que nous souhaitons mettre en avant : la face dure de Dickens, mais celle qui passe par le rythme et la force de la langue. C’est la traduction de Pierre Leyris, éditée au Temps qu’il fait. Si vous avez des livres à (vous) offrir, n’hésitez pas à le commander (et voir chez Corti pour Pierre Leyris, vie et oeuvre)...

Lire à Tours ? Depuis dix ans, le premier lundi de chaque mois, 18h30 à 20h. C’est proposé par l’équipe du Centre dramatique régional, maître d’oeuvre Bernard Pico, pour faire connaissance voir son bureau ou bien par ici. On avait commencé pour le bicentenaire de Balzac, on a continué. Versions de la Bible, textes fantastiques, récits de voyage, à chaque année son thème. Cette année, le conte, nous qui ne le sommes pas, conteurs. Lit-on de la même façon ? Et, cette idée du conte, l’appréhendons-nous par les mêmes textes ? Nouveauté : la bibliothèque municipale (voir son programme, il y a aussi, en parallèle, une suite de rencontres proposées par Jean-Marie Laclavetine) nous propose cette salle à l’acoustique impossible, quoi qu’on fasse, rideau, micro-cravates, même si ça va mieux quand les 60 à 80 auditeurs du soir nous rejoignent, mais salle jumelle de la lanterne posée au-dessus de la bibliothèque universitaire, à 200 mètres : pur carré posé au-dessus de la ville et du fleuve. Alors l’environnement visuel, dans la tombée de nuit, compense l’acoustique – on est hors du monde et ça convient bien à ces textes.

J’avais juste posé mon petit enregistreur sur le devant de mon pupitre (pour une des premières lectures, il y a 10 ans donc, nous avions été accueillis à l’école des Beaux Arts et avions lu sur des sellettes de sculpteur, on avait trouvé ça bien et on les avait embarquées – on a fini par les leur rendre, et s’en faire fabriquer de fausses, mais elles restent la signature de ces lectures, toujours avec un petit appui scénographique de Nathalie Holt). Le son, c’est donc captation brute, et minimum.

Nous sommes trois : Bernard Pico, Karine Rohmer et moi-même. En première partie, trois fragments de Kafka : Souvenir du chemin de fer de Kalda, par Bernard, je continue avec À cheval sur le seau à charbon, Karine conclut avec Première souffrance (le chagrin du trapéziste).


 trois textes de Franz Kafka, 24’.

Et puis Mugby, dans l’édition du Temps qu’il fait, la première partie. Et si vous trouvez ça aussi moderne qu’étrange, ce voyageur qui ne va nulle part, ou cette double tension entre Blackbox qui se moque de Lampes parce qu’il arbore les outils du poète, et comment sa fille, 20 pages plus loin, définit le même Lampes comme poète, le livre vous attend. L’Embranchement de Mugby c’est aussi la modernité de la ville : cinétique des trains, le passage des marchandises, la géo-localisation indifférente, le rapport du jour à la nuit bouleversé par le gaz, l’identité singulière évacuée jusqu’aux noms... Version anglaise en libre accès sur Feedbooks, c’est encore mieux.


 Charles Dickens, L’Embranchement de Mugby, traduction de Pierre Leyris, extraits, 40’

Et quelques photos pour l’ambiance.


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1ère mise en ligne et dernière modification le 16 décembre 2008
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