#lire #écrire # livre (selon Littré)

parce que c’est depuis si longtemps affaire de réflexion du langage sur ce qui le porte...


note du 29 février 2012
Pour accompagner le chapitre Dictionnaires de mon Autobiographie des objets en bouclage.

note du 15 décembre 2008
Parce que, aujourd’hui plus que n’importe quand depuis 20 ans, nous avons à relire l’histoire du livre depuis son apparition, l’histoire de l’écriture depuis son origine, et qu’une partie de ce qui se joue dans nos blogs, c’est la façon dont cette reformulation affecte globalement ce qu’on pensait un usage stable, et trop ancré sur la transmission et les valeurs d’une civilisation pour être mis en cause : les pages liens et univers liens (les 100 blogs) de tiers livre ont été mises à jour, c’est à eux tous que cette page est dédiée.

Et pour la langue de Littré, toujours aussi belle, même quand le cut-up devient l’histoire d’une vie (je rappelle qu’on peut consulter le Littré en ligne, je m’en sers beaucoup)...

Trois articles du dictionnaire d’Émile Littré :
 lire
 écrire
 livre

LIRE


(li-r’), je lis, tu lis, il lit, nous lisons, vous lisez, ils lisent ; je lisais ; je lus ; je lirai ; je lirais, lis, lisons ; que je lise, que nous lisions ; que je lusse ; lisant ; lu, lue, v. a.

Connaître les lettres et savoir les assembler en mots. Cet enfant commence à lire des phrases. Une écriture malaisée à lire. Suivant l’opinion commune, moins les yeux ont de la peine à lire un ouvrage, plus l’esprit a de liberté à en juger, PELLISSON, Hist. Acad. t. I, p. 26. Absolument. Cet enfant apprend à lire. Il ne sait ni lire ni écrire. Cet enfant lisait à quatre ans. On donnera le livre à un homme qui ne sait pas lire, et on lui dira : lisez, et il répondra : je ne sais pas lire, SACI, Bible, Isaïe, XIX, 12. Son visage était triste et beau ; à la lueur de mon flambeau, Dans mon livre ouvert il vint lire, A. DE MUSSET, Poés. nouv. Nuit de décembre. Par exagération. Ne pas savoir lire, être fort ignorant. Nous recevons aujourd’hui [à l’Académie française] l’évêque de Limoges qui ne sait pas lire, et Batteux qui ne sait pas écrire, mais en revanche nous avons un directeur qui sait lire et écrire, qui s’en pique du moins, D’ALEMB. Lett. à Volt. 9 avr. 1761. Lisez, se met dans les errata pour indiquer ce qu’il faut lire en place de ce qui est fautif. Cet homme faisait imprimer un petit code de persécution, intitulé : l’Accord de la religion et de l’humanité ; c’est une faute de l’imprimeur ; lisez de l’inhumanité, VOLT. Polit. et législ. De la tolérance, Post-scriptum. Terme de typographie. Lire sur le plomb, lire, sur l’oeil d’un caractère, le contenu d’une page, ou seulement d’une ligne. Prononcer à haute voix ce qui est écrit ou imprimé. Lire haut, tout haut. Il m’a fallu lire ma pièce chez madame la marquise, MOL. Critique, 7. Asseyez-vous donc, monsieur Lysidas ; nous lirons votre pièce après souper, MOL. ib. 7. Absolument. Il lit bien. Il lit mal. Il ne lit pas distinctement. Prendre connaissance du contenu d’un écrit, d’un livre. Elle [l’Église] voyait tout l’empire conjuré contre elle ; elle lisait à tous les poteaux et à toutes les places publiques les sentences épouvantables que l’on prononçait contre ses enfants, BOSSUET, 2e serm. Pentec. 1. Il avait lu cent treize fois le Nouveau Testament de Jésus-Christ avec application et avec respect, FLÉCH. Duc de Mont. Lisez, lisez l’arrêt détestable, cruel... RAC. Esth. I, 3. Sans cesse il faut armer contre leur souvenir Un inflexible vers que lira l’avenir, M. J. CHÉN. Ép. à Volt. Absolument. Lire avec application. Dedans l’oisiveté jamais enseveli, Toujours confère, prie, écris, médite, li, CORN. Imit. I, 19. Qu’on est heureux d’aimer à lire ! SÉV. 15 juin 1689. On songe plus à lire beaucoup qu’à lire utilement, ROLLIN, Traité des Ét. liv. I, ch. 3. On lit très peu ; et, parmi ceux qui veulent quelquefois s’instruire, la plupart lisent très mal, VOLT. l’Homme aux 40 écus, Des proportions. Lire que, trouver dans un écrit, dans un livre que... Nous ne lisons point que ses parents [de Jésus] aient jamais eu de domestiques, semblables aux pauvres gens dont les enfants sont les serviteurs, BOSSUET, Élévat. sur myst. XX, 8. Lire des doigts, parcourir rapidement un livre en le feuilletant. Voici ce que M. Basnage le ministre m’a dit à Rotterdam en 1707, que M. Bayle lisait beaucoup des doigts, c’est-à-dire qu’il parcourait beaucoup plus qu’il ne lisait, et qu’il tombait toujours sur l’endroit essentiel et curieux du livre, D’ARTIGNY, Nouv. mém. t. I, p. 319. On dit dans le même sens : lire des yeux. Fig. C’est un ouvrage qu’on ne peut lire, se dit d’un ouvrage ennuyeux, ou mal écrit, ou licencieux. Familièrement. Ce livre, cet ouvrage se laisse lire, on le lit sans fatigue, sans ennui. Elle [une histoire] se laisse lire en perfection, SÉV. 17 mai 1680. Lire la musique, connaître, en parcourant des yeux une musique notée, les sons que les notes figurent, et les modifications que ces sons doivent recevoir. Il lit facilement la musique. Il lit à livre ouvert. Lire la musique, signifie aussi l’exécuter à livre ouvert. Lire beaucoup de musique, l’exécuter sans étude. Expliquer. Un régent qui lit Virgile à ses écoliers. Depuis qu’Albert le Grand et saint Thomas principalement se furent donné la peine d’expliquer autant qu’il leur fut possible tous les mystères de notre religion avec les termes de la philosophie péripatétique, nous voyons qu’elle s’est tellement établie partout, qu’on n’en lit plus d’autres par toutes les universités chrétiennes, LAMOTHE LEVAYER, Vertu des païens, II, Aristote. On dit dans ce sens à un écolier : Quel auteur vous lit-on dans votre classe ? Comprendre ce qui est écrit ou imprimé dans une langue étrangère. Il ne parle pas l’allemand, mais il le lit couramment. Lire se dit quelquefois pour suivre une certaine leçon dans un texte qui en a plusieurs. Philoponus, là où il déclare qu’il rapporte les propres termes de Phlégon, lit d’une seconde façon, Maxime d’une troisième, et Madela d’une quatrième, en sorte qu’il s’en faut de beaucoup qu’ils rapportent le passage de la même manière, VOLT. Dict. phil. Éclipse. Fig. Reconnaître, discerner quelque chose par une espèce de travail que l’on compare à la lecture. Ces tristes vêtements où je lis mon malheur, CORN. Cid, IV, 1. Il lit au front de ceux qu’un vain luxe environne, Que la fortune vend ce qu’on croit qu’elle donne, LA FONT. Phil. et Baucis. Le pécheur s’éloigne de Dieu, et il n’y a page dans son Écriture en laquelle il ne lui reproche son éloignement ; mais, sans le lire dans l’Écriture, nous pouvons le lire dans nos consciences, BOSSUET, 2e sermon, Jeudi de la sem. de la Pass. I. Soit que je n’ose encor démentir le pouvoir De ces yeux où j’ai lu si longtemps mon devoir, RAC. Brit. II, 2. Dans le secret des coeurs, Osmin, n’as tu rien lu ? RAC. Bajaz. I, 1. Je lis dans vos regards la douleur qui vous presse, RAC. Iphig. III, 5. Lire en un songe obscur les volontés des cieux, RAC. Esth. II, 1. On lit dans ses regards sa fureur et sa rage, RAC. ib. III, 3. Ah ! dans ses yeux confus je lis ses perfidies, RAC. ib. 6. Il n’appartient qu’à elles [aux femmes] de faire lire dans un mot tout un sentiment, LA BRUY. I. Je lis dans l’avenir un sort épouvantable, VOLT. Oedipe, IV, 1. Lire sur. On lit dessus leur front l’allégresse de l’âme, CORN. Rodog. V, 2. D’où vient ce noir chagrin qu’on lit sur son visage ? BOILEAU, Épigr. XXXIV. Il se déguise en vain, je lis sur son visage Des fiers Domitius l’humeur triste et sauvage, RAC. Brit. I, 1. Sur ce visage austère, où régnait la tristesse, Henri lut aisément sa honte et sa faiblesse, VOLT. Henr. IX. Absolument. Pensez-vous avoir lu jusqu’au fond de son âme ? CORN. Cinna, III, 1. Elle a lu dans mon coeur, vous savez le surplus, CORN. ib. v, 3. Ne devais-tu pas lire au fond de ma pensée ? RAC. Andr. v, 3. Vous lisez de trop loin dans les secrets des cieux, RAC. Iphig. I, 2. ....Vous m’avez vue attachée à vous nuire ; Dans le fond de mon coeur vous ne pouviez pas lire, RAC. Phèdre, II, 5. Il a lu dans le coeur de tous les hommes, MASS. Carême, Évid. Berger, sur cet azur tranquille De lire on te croit le secret, BÉRANG. Étoiles qui filent. Expliquer les motifs des dessins aux ouvriers qui doivent les exécuter dans une fabrique de tissus ouvrés ou imprimés. 10°Se lire, v. réfl. Être lu. Il est certain que plusieurs des vers attribués à la sibylle dans l’exhortation qui se trouve parmi les oeuvres de saint Justin ne se lisent point dans notre recueil, VOLT. Dict. phil. Sibylle. Je n’entretiendrai pas Votre Majesté de toutes les sottises qui se font, et qui se disent, et qui se lisent ou ne se lisent pas, dans le séjour que j’habite, D’ALEMB. Lett. au roi de Prusse, 9 oct. 1778. Impersonnellement. Il se lit que..., on lit que.... Il ne se lit point que jamais un tableau tout entier ait été produit de cette sorte, CORN. Mélite, Préface. Fig. Sur mes yeux égarés ma tristesse se lit, RÉGNIER, Élég. I. Pour moi, j’aime les gens dont l’âme se peut lire, GRESSET, Méchant, I, 5. 1. Il faut dire : lis-je ? et non lisé-je, qui est un grossier barbarisme. 2. À l’impératif Corneille a dit li, par un archaïsme reçu en poésie. XIIe s. Veez en ci la chartre, comandez qu’on la lise, Sax. XXIII. Il prist un livre, si i lit sans faillance, Ronsciv. p. 165. Jamais par moi n’ert leüs vers ne lais, Couci, XXII. XIIIe s. Bele Doette, as fenestres seant, Lit en un livre, mais au cuer [coeur] ne l’entent, Romanc. p. 46. Quant l’evangile fu liz, Blanchandin, ms. de St-Germain, f° 192, dans LACURNE. Cil sains preudom la lettre lut ; Li lires mult li abelut [plut], RUTEB. II, 155. La lettre fu liute, Chr. de Rains, 133. XIVe s. Le sauf conduit a pris, si le fait recorder ; Car lire ne savoit, n’escripre, ne compter, Guesclin. 1610. Plus avoir ne pouvons de leur fait [des anciens] que le lire ; En lisant les veons ; nuls homs n’en puet [peut] plus dire ; Lires est noble chouse.... Girard de Ross. Prologue. XVe s. Depuis on legy tous ses forfaits pour lesquels il recevoit mort, FROISS. III, IV, 14. Jean Fernando.... apporta lettres au chanoine de Robertsart ; le chanoine les lisit, FROISS. II, II, 139. XVIe s. Arreste-toi, lisant, Ci-dessous est gisant.... Ce renommé Langeay, MAROT, III, 263. Si bien qu’il lisoit aux quatre langues [français, latin, grec, hébreu] à six ans, D’AUBIGNÉ, Mémoires, éd. LALANNE, p. 4. Lisant dans les yeux, MONT. I, 4. Pour luy lire sa grace, MONT. I, 91. Autant vaut celui qui chasse et rien ne prend, comme celuy qui lit et rien n’entend, COTGRAVE. Wallon, lére, choisir ; provenç. legir, ligir ; catal. llegir ; espagn. leer ; portug. ler ; ital. leggere ; du lat. legere, proprement recueillir, puis lire ; le verbe grec se traduit par recueillir et dire. Le participe liz vient de lectus ; le participe leüs ou lu suppose un verbe leir, irrégulièrement formé.

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ÉCRIRE


(é-kri-r’), j’écris, nous écrivons ; j’écrivais ; j’écrivis ; j’écrirai ; j’écrirais ; écris, écrivons ; que j’écrive ; que j’écrivisse ; écrivant, écrit, v. a.

Exprimer avec des lettres les sons de la parole et le sens du discours. J’ai écrit quelques mots sur ce papier. Écrire ses sentiments. Écrire ses idées. Écrire un calcul. Il [Dieu] écrit de sa propre main, sur deux tables qu’il donne à Moïse au haut du mont Sinaï, le fondement de cette loi, c’est-à-dire le décalogue ou les dix commandements, qui contiennent les premiers principes du culte de Dieu et de la société humaine, BOSSUET, Hist. I, 4. Je crois qu’on fit des vers longtemps avant de les savoir écrire ; mais, l’alphabet une fois connu, sans doute on écrivit autre chose que des vers, P. L. COUR. Préface d’Hérodote. On dit dans un sens analogue, en parlant de la musique, écrire un morceau, un air. De même, en parlant d’arithmétique ou d’algèbre, écrire une addition, une opération, une intégrale. Écrire une page, remplir une page de lettres et de mots. Cet enfant a écrit ses deux pages. Absolument. Savoir lire et écrire. Je voudrais, disiez-vous, ne savoir pas écrire, RAC. Brit. IV, 3. Il tira ensuite de sa poche une petite lame d’ivoire, écrivit sur cette lame avec une aiguille d’or, attacha la tablette d’ivoire à l’arc.... VOLT. Babylone, 1. Voilà une bonne voix pour écrire, et une bonne main pour chanter, se dit de qualités qui ne conviennent aucunement à la chose dont il s’agit. Inscrire. Ô mon Dieu ! .... vous l’aviez écrit sur le livre éternel, MASS. Or. fun. Louis XIV. Fig. Dieu a écrit sa loi dans nos consciences. Orthographier. Comment écrivez-vous votre nom ? Comment écrivez-vous tel mot ? Adresser et envoyer une lettre à quelqu’un. Je vous ai écrit deux lettres, vous ne m’avez pas répondu. Écrire un volume, c’est-à-dire écrire une très longue lettre. Je me croirai la plus aimée, la mieux traitée, la plus tendrement ménagée, quand vous prendrez sur moi et que vous ôterez du nombre de vos fatigues le volume que vous m’écrivez, SÉV. 395. Informer par lettre ou par correspondance. Je lui ai écrit la mort de son père. Absolument. Il m’écrivit qu’il fallait se hâter. Je vous écrirai, et je vous donnerai mon adresse. J’écrivis en Argos pour hâter ce voyage, RAC. Iphig. I, 1. Ces deux personnes s’écrivent, elles ont entre elles un commerce de lettres. Écrire de bonne encre, de la bonne encre à quelqu’un, lui faire des remontrances sévères, lui intimer sérieusement un ordre. Rédiger, composer un ouvrage. Écrire un traité, une histoire. Il a écrit ses mémoires. Un saint abbé dont la doctrine et la vie sont un ornement de notre siècle, ravi d’une conversion aussi admirable et aussi parfaite que celle de notre princesse, lui ordonna de l’écrire pour l’édification de l’Église, BOSSUET, Anne de Gonz. Quoi que vous écriviez, évitez la bassesse ; Le style le moins noble a pourtant sa noblesse, BOILEAU, Art p. I. Absolument. Écrire en prose, en vers. Cet auteur a beaucoup écrit. Ceux qui ont écrit sur cette matière. Il faut qu’un galant homme ait toujours grand empire Sur les démangeaisons qui nous prennent d’écrire, MOL. Mis. I, 2. Il se tue à rimer ; que n’écrit-il en prose ? BOILEAU, Sat. IX. Écrive qui voudra ; chacun à ce métier Peut perdre impunément de l’encre et du papier, BOILEAU, ib. IX. Avant donc que d’écrire, apprenez à penser, BOILEAU, Art p. I. Mais dans l’art dangereux de rimer ou d’écrire, Il n’est point de degré du médiocre au pire, BOILEAU, ib. IV. La plupart, comme ceux qui depuis ont écrit sur cette journée, ignoraient les souffrances physiques d’un chef qui.... SÉGUR, Hist. de Nap. IV, 6. On dit aussi : écrire d’une chose. Prétendre en écrivant de quelque art échapper à la critique, LA BRUY. Disc. sur Théophr. Il se dit du genre de style. Cet homme parle bien, mais ne sait pas écrire. Donnons-lui donc [à Calvin], puisqu’il le veut tant, cette gloire d’avoir aussi bien écrit qu’homme de son siècle ; mettons-le même, si l’on veut, au-dessus de Luther.... BOSSUET, Variations, 9. Qui ne sait se borner ne sut jamais écrire, BOILEAU, Art p. I. Il faut exprimer le vrai pour écrire naturellement, fortement, délicatement, LA BRUY. I. Un esprit médiocre croit écrire divinement, un bon esprit croit écrire raisonnablement, LA BRUY. ib. Tout auteur qu’on est obligé de lire deux fois pour l’entendre écrit mal, ST-FOIX, Ess. Paris, t. IV, p. 221, dans POUGENS. [La Motte-Houdard] prouva que dans l’art d’écrire on peut encore être quelque chose au second rang, VOLT. LOUIS XIV, 32. Écrire au courant de la plume, écrire rapidement, sans mettre beaucoup de réflexion. Avancer, exposer, enseigner. Aristote a écrit que les animaux.... Il se dit aussi des compositions musicales. Écrire un opéra. Ce musicien a beaucoup écrit. Terme de pratique. Exposer ses moyens dans un mémoire, dans une requête. Ils furent appointés à écrire et produire. À mal exploiter bien écrire, se dit de celui qui, ayant fait des fautes et manqué aux formalités, y remédie par des écritures arrangées. Rédiger un procès-verbal, un interrogatoire, une déposition. Tiens, voilà ton paiement - Un soufflet ! écrivons, RAC. Plaid. II, 4. ....Vous riez ? Écrivez qu’elle a ri, RAC. ib. II, 6. S’engager par écrit. Il ne suffit pas de promesses, il faut écrire. Quiconque écrit s’engage, TH. CORN. l’Amour à la mode, I, 2. Marquer, indiquer. Son sang sur la poussière écrivait mon devoir, CORN. Cid, II, 9. S’écrire, v. réfl. Être écrit. Tout ce qui se dit ne s’écrit pas. Tout ce qui est bon à écrire, c’est une maxime de Vaugelas, est bon à dire ; mais tout ce qui peut se dire ne se doit pas écrire, D’OLIVET, Rem. sur Racine, § 94. Être orthographié. Ce mot ne s’écrit pas ainsi. S’écrire chez quelqu’un, inscrire son nom chez quelqu’un à qui l’on fait visite. Se faire écrire chez quelqu’un, à la porte de quelqu’un, faire mettre son nom sur un papier chez le portier. Je n’avais pas changé [de conduite froide avec Villeroy] depuis, hors de me faire écrire aux occasions chez le maréchal, ce qui ne s’omet qu’en brouillerie ouverte, SAINT-SIMON, 392, 59. On sait quand il faut se faire écrire, c’est-à-dire faire une visite qu’on ne fait pas, J. J. ROUSS. Héloïse, II, 7. Racine a dit écrire en Argos, c’est-à-dire dans le pays d’Argos ; c’est une licence poétique, ou, si l’on veut, Racine a pris Argos dans le sens de pays d’Argos. Mais, dans la règle, en ou dans ne peut se dire qu’avec un pays : j’ai écrit dans ce pays-là ; mais j’ai écrit à Londres, à Berlin. XIe s. Il est escrit en la geste francor, Ch. de Rol. CX. XIIe s. .... Faites faire erraument [aussitôt] Vos chartres et vos briés [brefs] à clerz bien escrivanz, Sax. XXI. Demain iront partout no brief qui sont escrit, ib. XXIV. Davit li reis, qui out en sei saint esperit, Quant il out Salomun sun fil à rei escrit.... Th. le mart. 27. Solunc [selon] ses paroles [il] escrit [écrivit] par tot son regne, e establi princes qui ço feissent faire par force, Machab. I, 1. XIIIe s. Car bien estoit letrée et bien savoit escrire, Berte, XIV. Et des nombres [il] devoit escripre, la Rose, 6720. Lesquiex enseignemens le roy escript [écrivit] de sa sainte main, JOINV. 300. XIVe s. Comme l’en doit former ou escripre les livres, ORESME, Eth. 67. Li dras [étoffe] qui fu escris de painture dorée, Beaud. de Seb. II, 954. XVe s. Ces deux [Philippe d’Artevelle et Piètre du Bois] se nommoient et escrisoient souverains capitaines de tous, FROISS. II, II, 160. Et escripst [écrivit] le pape au roi Charles, que il renvoyast sa soeur Isabelle en Angleterre, FROISS. I, I, 11. [Le duc d’Anjou] escripsit devers messire Jean d’Armignac que à ce besoin il ne lui voulsist faillir, FROISS. II, II, 1. Le duc d’Anjou qui se faisoit escrire roy de Cecile et de Hierusalem, FROISS. liv. II, p. 160, dans LACURNE. XVIe s. Xercès escrivit un cartel au mont Athos, MONT. I, 22. Escrit il en vers ou en prose ? MONT. I, 142. Caton, qui luy assistoit à sa brigue, s’advisa que les tables où s’escrivoient les voix estoient toutes escrittes d’une main, MONT. Cat. d’Utiq. 62. Il est fort difficile d’escrire bien en nostre langue, si elle n’est enrichie autrement qu’elle n’est pour le present, de mots et de diverses manieres de parler ; ceux qui escrivent journellement en elle savent bien à quoi s’en tenir ; car c’est une extreme gene de se servir tousjours d’un mot, RONS. 589. Wallon, skrîre ; provenç. escriure ; espagn. escribir ; portug. escrever ; ital. scrivere ; du latin scribere, le même que le grec, par la prosthèse d’une s. Comparez graver ; le goth. graban, creuser ; allem. graben. Le sens du radical grab ou scrib est creuser.

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LIVRE.1


(li-vr’) s. m.

Réunion de plusieurs cahiers de pages manuscrites ou imprimées. Livre manuscrit. Livre imprimé. Les livres d’une bibliothèque. Livre doré sur tranche. Livres reliés, brochés. Les marges d’un livre. Quoiqu’il soit plus vrai qu’il ne fut jamais que c’est faire de grands péchés que de faire de grands livres, BALZ. liv. IV, lett. 3. Ils reconnurent avec soin la terre, et la divisèrent en sept parts, qu’ils écrivirent dans un livre, SACI, Bible, Josué, XVIII, 9. Vos livres éternels ne me contentent pas ; Et, hors un gros Plutarque à mettre mes rabats, Vous devriez brûler tout ce meuble inutile, Et laisser la science aux docteurs de la ville, MOL. F. sav. II, 7. Il ne faut pas s’imaginer le prince un livre à la main, avec un front soucieux, et des yeux profondément attachés à la lecture ; son livre principal est le monde, BOSSUET, Politique, V, I, 8. Chez le libraire absent tout entre, tout se mêle ; Les livres sur Évrard fondent comme la grêle Qui, dans un grand jardin, à coups impétueux, Abat l’honneur naissant des rameaux fructueux ; Chacun s’arme au hasard du livre qu’il rencontre, BOILEAU, Lutrin, V. Éclaircis des rabbins les savantes ténèbres, Afin qu’en ta vieillesse un livre en maroquin Aille offrir ton travail à quelque heureux faquin.... BOILEAU, Sat. VIII. J’adore le Seigneur ; on m’explique sa loi ; Dans son livre divin on m’apprend à la lire, RAC. Athal. II, 7. Je regarde à présent tous les gros livres comme des dictionnaires, VOLT. Mél. hist. Fragm. sur l’hist. art XIII. Vous craignez les livres comme dans certaines bourgades on craint les violons ; laissez lire et laissez danser ; ces deux amusements ne feront jamais de mal au monde, VOLT. Dict. phil. Liberté d’imprimer. Chez les anciens, les livres étaient des rouleaux, c’est-à-dire une longue feuille de papyrus écrite sur une ou plusieurs colonnes, et roulée autour d’un bâton central (d’où volumen, rouleau, volume). Le ciel se retira comme un livre que l’on roule, et toutes les montagnes et les îles furent ébranlées de leur place, SACI, Bible, St Jean, Apocal. VI, 14. Livre in-folio, in-quarto, in-octavo, in-douze, in-seize, in trente-deux, voy. ces mots. Livre en feuilles, livre imprimé qui n’est encore ni broché ni relié. Collationner un livre, voir si un livre est complet, s’il n’y manque pas quelque feuillet. Livre dépareillé, volume séparé des autres volumes d’un même ouvrage. Terme d’antiquité romaine. Livres de lin ou lintéens, voy. LINTÉENS. Livre contrefait, s’est dit autrefois d’un faux livre, c’est-à-dire d’un bloc de bois ou d’une boîte ayant la forme et les ornements extérieurs d’un livre. Cette locution n’est plus usitée. Traduire un auteur à livre ouvert, le traduire facilement à la première lecture. Fig. Il connaît l’avenir et les choses passées ; Rien n’est secret pour lui dans tout cet univers, Et pour lui nos destins sont des livres ouverts, CORN. Illus. com. I, 1. On dit aussi en parlant de la musique : chanter, accompagner, lire la musique à livre ouvert, lire, chanter, accompagner sans avoir besoin de préparation. Me faire chanter à livre ouvert, moi ? vous m’embarrassez fort, madame, DANCOURT, Sec. chap. du diable boit. I, 5. À l’ouverture du livre, en ouvrant le livre. Je suis tombé à l’ouverture du livre sur le passage dont j’avais besoin. Ouvrir, fermer un livre. Amis, un dernier mot, et je ferme à jamais Ce livre, à ma pensée étranger désormais, V. HUGO, Feuilles d’automne, XL. Fig. Après cela il faut fermer le livre, le point décisif est trouvé, et il n’y a plus rien à dire. Fig. Terme de théologie. Le livre de vie ou des vivants, le décret de Dieu touchant les élus. N’est-ce pas assez que ces dons fussent écrits de la main même du Seigneur dans le livre de vie ? MASS. Carême, Aumône. Un prophète ouvrit le livre de vie : le nom d’Hiéroclès était effacé, CHATEAUBR. Mart. XXIII. Être écrit dans le livre de vie, être prédestiné à jouir du bonheur éternel. Ceux qui habitent sur la terre, dont les noms ne sont pas écrits dans le livre de vie de l’agneau qui a été immolé dès la création du monde, SACI, Bible, St Jean, Apocal. XIII, 8. Fig. Le livre du destin, des destins, l’ordre immuable suivant lequel les événements doivent s’accomplir. Il ouvrit à ses yeux le livre du destin, VOLT. Henr. I. Cela était écrit dans le livre du destin, se dit d’un événement où l’on croit voir quelque fatalité. Ouvrage d’esprit, soit en prose, soit en vers, d’assez grande étendue pour faire au moins un volume. Livre bien écrit, mal écrit. Mettre un livre au jour. Publier, faire paraître un livre. Et disent pour bonjour : Monsieur, je fais des livres, RÉGNIER, Sat. II. Hâte-toi, mon ami, tu n’as pas tant à vivre ; Je te rebats ce mot, car il vaut tout un livre, LA FONT. Fabl. VIII, 27. Le dernier livre qu’il a fait contre M. Arnaud, PASC. Prov. IV. Il faut qu’on n’en puisse dire [d’un homme] ni, il est mathématicien, ni prédicateur, ni éloquent, mais, il est honnête homme.... quand en voyant un homme, on se souvient de son livre, c’est mauvais signe, PASC. Pens. VI, 15 ter, éd. HAVET. Certains auteurs, parlant de leurs ouvrages, disent : mon livre, mon commentaire, mon histoire.... ils feraient mieux de dire : notre livre, notre commentaire, notre histoire, vu que d’ordinaire il y a plus en cela du bien d’autrui que du leur, PASC. ib. XXIV, 68. Les meilleurs livres sont ceux que ceux qui les lisent croient qu’ils auraient pu faire : la nature, qui seule est bonne, est toute familière et commune, PASC. Esprit géom. II. Enfin, tant que nous aurons des livres, nous ne nous pendrons pas, SÉV. 23 sept. 1671. Un amour curieux des livres, une avidité de savoir.... FLÉCH. Duc de Mont. Un pédant enivré de sa vaine science, Tout hérissé de grec, tout bouffi d’arrogance.... Croit qu’un livre fait tout, et que, sans Aristote, La raison ne voit goutte et le bon sens radote, BOILEAU, Sat. IV. Son livre est d’agréments un fertile trésor, BOILEAU, Art p. III. Après cela, docteur, va pâlir sur la Bible ; Va marquer les écueils de cette mer terrible ; Perce la sainte horreur de ce livre divin, BOILEAU, Sat. VIII. C’est un métier que de faire un livre, comme de faire une pendule, LA BRUY. I. Si l’on ôte de beaucoup d’ouvrages de morale, l’avertissement au lecteur, l’épître dédicatoire, la préface, la table, les approbations, il reste à peine assez de pages pour mériter le nom de livre, LA BRUY. I. Il y a, surtout en mathématique, plus de bons livres qu’il n’y en a de bien faits, c’est-à-dire qu’on en voit assez qui peuvent instruire et peu qui instruisent avec une certaine méthode et, pour ainsi dire, avec un certain agrément, FONTEN. l’Hospital. Je mets les bons livres parmi les choses absolument nécessaires, VOLT. Lett. Damilaville, 3 avr. 1767. Du temps de Pascal, de Boileau et de Racine, les mauvais livres ne valaient rien du tout, au lieu que les plus détestables livres de nos jours brillent toujours par quelque endroit, VOLT. Lett. Mme du Deffant, 16 nov. 1773. Métastase a pris la plupart de ses opéras dans nos tragédies françaises ; plusieurs auteurs anglais nous ont copiés et n’en ont rien dit ; il en est des livres comme du feu dans nos foyers : on va prendre le feu chez son voisin, on l’allume chez soi, on le communique à d’autres, et il appartient à tous, VOLT. Dict. phil. Prior, Butler et Swift. Vous les méprisez, les livres, vous dont toute la vie est plongée dans les vanités de l’ambition et dans la recherche des plaisirs ou dans l’oisiveté ; mais songez que tout l’univers connu n’est gouverné que par des livres, excepté les nations sauvages, VOLT. ib. Livres. Les livres sont aujourd’hui multipliés à un tel point que non-seulement il est impossible de les lire tous, mais d’en savoir même le nombre et d’en connaître le titre, VOLT. ib. Livres, sect. 3. De tous les livres de l’Occident qui sont parvenus jusqu’à nous, le plus ancien est Homère ; c’est là qu’on trouve les moeurs de l’antiquité profane, des héros grossiers, des dieux grossiers faits à l’image de l’homme, VOLT. ib. Destin. Cet examen nous fournira quelque chose de nouveau et de vrai ; c’est la seule excuse d’un livre, VOLT. Phil. Newt. II, 4. Il vit avec les livres comme avec les hommes ; il choisit et il n’est jamais la dupe des noms, VOLT. l’Homme aux 40 écus, le bon sens. Le désir de plaire à Mme de Villette fit entreprendre à Helvétius le livre de l’Esprit, DUCLOS, Morc. hist. Oeuv. t. X, p. 270, dans POUGENS. Les livres éclairent la multitude, humanisent les hommes puissants, charment le loisir des riches, instruisent toutes les classes de la société, RAYNAL, Hist. phil. XIX, 13. Un bon livre est un bon ami, BERN. DE ST-P. Paul et Virg. Fig. Et je veux, si jamais on engage ma foi, Un mari qui n’ait point d’autre livre que moi, MOL. Femm. sav. V, 3. Je sens le chagrin que vous avez eu de quitter votre château, et votre liberté, et votre tranquillité ; le cérémonial est un étrange livre pour vous, SÉV. 27 oct. 1675. Commencer, achever un livre, en commencer, en achever la lecture. Peuples du livre, nom qui désigne, dans le Coran, les juifs, les chrétiens et les sabéens. Les mauvais livres, les livres qui contiennent des doctrines subversives, et aussi les livres licencieux. Un tableau, une statue licencieuse est peut-être plus dangereuse qu’un mauvais livre, DIDER. Pensées sur la peint. Oeuv. t. XV, p. 181, dans POUGENS. Livre populaire, celui qui, par la modicité de son prix, est à la portée des moindres fortunes. Livres élémentaires, ceux qui enseignent les éléments de quelque science. Livres classiques, ceux des ouvrages littéraires qui, consacrés par le temps et par une approbation universelle, font autorité. Livres classiques, se dit aussi des livres qui servent dans les classes à l’instruction de la jeunesse. Livres de bibliothèque, ouvrages d’une grande étendue que l’on a pour les consulter, ou ouvrages sérieux qui figurent bien dans une bibliothèque et y font honneur. Livres d’église, livres de prières, les livres qui servent au clergé pour célébrer l’office divin, et aux fidèles pour suivre les prières qui se récitent ou se chantent à l’église. Livres de dévotion, livres qui servent aux exercices de dévotion, qui contiennent des prières, des oraisons mystiques. Livre de paix, le livre qu’on donne à baiser à la messe. Les saints livres, la Bible, la sainte Écriture. Ayant pour notre consolation les saints livres qui sont entre nos mains, SACI, Bible, Machab. I, XII, 9. Fig. On ferait un livre de.... se dit pour exprimer que la chose dont on parle fournirait matière à de longs discours. Quel gros livre ne ferait-on point de ses perfections ? SÉV. 366. On ferait un livre et fort divertissant du domestique [de ce qui se passait à l’intérieur] entre le père et le fils, SAINT-SIMON, 460, 207. Familièrement. Il n’a jamais mis le nez dans un livre, il n’a jamais rien lu, il est fort ignorant. Dévorer un livre, dévorer des livres, les lire avec une extrême avidité, une extrême promptitude. Sécher, pâlir sur les livres, lire avec une assiduité excessive. Familièrement. Parler comme un livre, parler sur un sujet avec grande connaissance, élégance et facilité. Vertu de ma vie, comme vous débitez ! il semble que vous ayez appris cela par coeur, et vous parlez tout comme un livre, MOL. Festin, I, 2. Bien est-il vrai qu’il parlait comme un livre, GRESSET, Vert-Vert, ch. II. Parler comme un livre, se dit aussi pour faire la critique de quelqu’un qui s’exprime avec facilité, mais en termes recherchés. Parler livre, parler en savant. Que l’autre parle livre et fasse des merveilles, RÉGNIER, Sat. VII. Eh bien ! il parle livre, il a le mot pour rire, RÉGNIER, ib. XIII. Fig. Brûler ses livres, voy. BRÛLER, n° 1. Fig. Il se dit de ce qui enseigne, instruit comme fait un livre. Le livre, le grand livre de la nature. Le livre du monde. Et me résolvant de ne chercher plus d’autre science que celle qui se pourrait trouver en moi-même ou bien dans le grand livre du monde, DESC. Méth. I, 14. Fig. Livre opposé à réalité, pratique. J’étais trop bien à Paris pour être longtemps bien à la cour ; c’était là mon crime dans l’esprit d’un Italien [Mazarin] politique par livre, RETZ, II, 87. Une des principales parties qui forment la division de certains ouvrages. Mes derniers livres [de l’Énéide] sont négligés ; je ne prétendais pas les laisser si imparfaits ; vous savez que je voulais les brûler, FÉN. Dial. des morts anc. 48. Il serait bien à souhaiter qu’on eût pu conserver son histoire [de Tite Live] ; il ne nous en reste que trente-cinq livres, dont quelques-uns même ne sont pas entiers ; ce n’est pas la quatrième partie de l’ouvrage, quelle perte ! ROLLIN, Hist. anc. t. XII, liv. XV, ch. 2, art. 2, p. 252, dans POUGENS. Il me semble que le second livre de l’Énéide, le quatrième et le sixième sont autant au-dessus de tous les poëtes grecs et de tous les latins sans exception, que les statues de Girardon sont supérieures à toutes celles qu’on fit en France avant lui, VOLT. Dict. phil. Épopée. Livres sacrés, livres canoniques, les livres de l’Écriture sainte qui sont reçus de toute l’Église. Livres apocryphes, ceux que l’Église ne reconnaît pas pour authentiques. Livres sapientiaux, les livres de la Bible qui sont plus particulièrement destinés à l’instruction morale, tels que la Sagesse, les Proverbes, etc. Livres historiques, livres prophétiques, certaines autres parties de l’Ancien Testament. Terme de musique. Se dit pour livraison, volume. Oeuvre 51, 10e livre de duos de violon. Chant sur le livre, se dit du plain-chant ou contre-point à quatre parties, que les musiciens composent et chantent impromptu sur une seule. Il s’est dit jadis dans le sens de livret, libretto. L’opéra [de Proserpine, de Quinault] est au-dessus de tous les autres ; le chevalier dit qu’il vous a envoyé plusieurs airs, et qu’il a vu un homme [Quinault] qui doit vous avoir envoyé le livre, SÉV. 9 fév. 1680. Quinault apporta au roi chez Mme de Montespan trois livres d’opéra pour cet hiver, DANGEAU, t. I, p. 127, 16 mai 1685. 10° Registre sur lequel on inscrit ce qu’on reçoit et ce qu’on dépense. Livre de compte. Livre de dépense. Le maître d’hôtel et le cuisinier lui apporteront, tous les matins, leurs livres de dépenses, GENLIS, Adèle et Théod. t. II, p. 155, dans POUGENS. Terme de banque et de commerce. Registre sur lequel on inscrit toutes les opérations financières ou commerciales qui se font. Livre de mise et de recette. Livres de commerce. Livre de caisse. Livres d’acceptations, d’échéances, etc. Tenir les livres, se dit, chez un négociant, de l’occupation qui consiste à enregistrer tout ce qui est vendu et acheté, et toutes les opérations commerciales en général. Ce commis sait bien tenir les livres. Étudier la tenue des livres. Il tient ses livres en partie double. L’anabaptiste Jacques en fit son teneur de livres, VOLT. Cand. 4. Leurs comptes, comme tous les autres, se rendent à Batavia, où l’on tient le livre général de toutes les affaires, RAYNAL, Hist. phil. II, 20. Être porté, ou, simplement, être sur le livre d’un marchand, y être inscrit pour marchandise achetée. Fig. Être sur le livre de quelqu’un, être noté par lui comme objet de ressentiment, dont on essayera de se venger tôt ou tard. Livre journal, ou, simplement, journal, registre où l’on écrit jour par jour et de suite ce qu’on a reçu ou payé. Livre d’extrait, ou grand livre, ou, quelquefois, livre de raison, livre où l’on enregistre et classe les articles du livre journal. Tous banquiers.... et marchands en gros.... seront obligés de tenir livres de raison en bonne et due forme ; et tous marchands, boutiquiers et vendants en détails, des livres journaux, Règl. des 2 juin et 7 juillet 1667. Par extension. Tu as ouï dire qu’Auguste avait un livre de raison qui contenait le détail des forces de l’empire et de ses finances, VOLT. Philos. Exam. Bolingbroke, XII. 11° Absolument. Le grand-livre, la liste générale des créanciers de l’État. La principale base du projet de votre commission pour annuler promptement tous les anciens titres de créances, pour simplifier les mutations, les oppositions et la comptabilité, et pour faciliter le payement annuel dans les chefs-lieux de district, consiste à former un livre qu’on appellera grand-livre de la dette publique ; il sera composé d’un ou plusieurs volumes ; on y inscrira toute la dette non viagère, CAMBON, Rapport du 14 août 1793, p. 71. Toute la dette publique non viagère sera enregistrée par ordre alphabétique des noms des créanciers, sur un grand-livre en un ou plusieurs volumes, dont le modèle est annexé au présent décret, CAMBON, ib. article 1er. Le grand-livre de la dette publique sera le titre unique et fondamental de tous les créanciers de la république, CAMBON, ib. art. 6. Il sera fait deux copies du grand-livre, CAMBON, ib. art. 8. .... Un beau jour, de rentiers naufragés Tous les débris à la fois submergés Allèrent se noyer dans la mer du grand-livre, DELILLE, Convers. II. Ouvrir, fermer le grand-livre, contracter un emprunt, renoncer à en contracter jamais. 12° Terme d’ancienne administration. Garde des livres, officier qui avait soin des titres de la chambre des comptes. 13° Terme de marine. Livre du bord, registre sur lequel on enregistre les marchandises et même les passagers. Livre de loch, registre sur lequel on inscrit, outre les routes mesurées par le loch, les variations du vent, les différentes voilures sous lesquelles le navire a couru, enfin tous les incidents et accidents de la navigation. Anciennement, registre sur lequel l’écrivain inscrivait les marchandises embarquées. Livre de signaux, ouvrage qui contient la nomenclature des signaux et des instructions sur la tactique. 14° Terme d’administration militaire. Cahier de compte employé dans les régiments. Livre de compagnie, de police, de punition, d’ordre, de détail, etc. 15° Livre blanc, livre qui est tout de papier blanc, sur lequel on n’a encore rien écrit. Livre rouge, registre sur lequel étaient portées les dépenses secrètes de la cour, pendant les règnes de Louis XV et de Louis XVI. Fig. Il est écrit sur le livre rouge, c’est-à-dire il est marqué ou noté pour quelque faute qu’il a déjà commise. Livre noir, se dit des livres qui traitent de sorcellerie, de nécromancie. Le livre d’or, le registre où étaient inscrits les noms des nobles, dans quelques républiques. Livre d’or s’est dit, sous la Restauration, du registre contenant les noms des pairs de France. 16° Aujourd’hui, livre, accompagné d’une épithète désignant la couverture du livre, se dit des pièces, documents, rapports, etc. que les gouvernements soumettent aux chambres ou au pays pour leur faire connaître leur politique, leur conduite. En France, le livre bleu est pour les affaires intérieures, et le livre jaune pour les affaires extérieures (cet usage ne date que de 1852). En Angleterre, il y a aussi un livre bleu. Le compte rendu de Necker sur les finances de 1781 avait une couverture bleue, et, comme les conclusions en furent contestées, on l’appela le conte bleu. XIe s. Marsiles fait porter un livre avant, Ch. de Rol. XLVI. XIIe s. Seient eslavé [effacé] del livre des vivanz, e ot [avec] les justes ne seient escrit, Liber psalm. p. 90. Il prist un livre, si i list sans faillance, Roncis. 165. De pluisurs altres choses unt entr’els desputé, Dunt um ne m’a encore acointié n’acerté, Ne tut ne puet pas estre en mun livre noté, Th. le mart. 114. XIIIe s. Qui le livre as histoires me montra, où je vi.... Berte, I. À desenor [à déshonneur] muert [meurt] à bon droit Qui n’aime livre ne ne croit, Ren. V. 39. XVe s. Les bons livres font les bons clers, GERSON, dans Hist. litt. de la Fr. t. XXIV, p. 283. Serment sur le livre et sur la croix, J. CHARTIER, Hist. de Charles VII, p. 238, dans LACURNE. Ou j’arderay tous les livres que j’ay, Qui ont traitté de vertus et de vices ; Ou en brief temps le jugement verray Des grans menteurs qui tiennent les offices, E. DESCH. Poésies mss. f° 289. Un livre contrefait d’une piece de bois paincte, en semblance d’un livre, où il n’a nulles feuilles, ne riens escript, couvert de veluiau blanc, à deux fermaus d’argent dorez, DE LABORDE, Émaux, p. 367. Provenc. libre ; catal. llibre ; espagn. libro ; portug. livro ; ital. libro ; du lat. liber, proprement la pellicule entre le bois et l’écorce, pellicule qui a donné son nom au livre, attendu qu’on a écrit anciennement dessus. 1. LIVRE. 6°Livre opposé à réalité, à pratique. Ajoutez : J’aime à remplir de feux ma bouche en leur présence [des dames] ; La mode nous oblige à cette complaisance ; Tous ces discours de livre alors sont de saison, CORN. Mélite, I, 1. 17° Terme de turf. Livre des paris, livre sur lequel on inscrit les paris. Faire un livre, parier contre tous les chevaux.

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1ère mise en ligne 15 décembre 2008 et dernière modification le 29 février 2012
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