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#Evry #07 | où venir la nuit pour écrire

Evry corps béton, roman-photo, le sommaire
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Voici donc, on y était. À Evry, on avait disposé dans la ville (il y a longtemps, longtemps déjà), ces cages transparentes et conviviales pour que les écrivains puissent venir écrire la nuit, écrire la ville. S’immerger dans la ville pour l’écrire, bien sûr c’est ce qu’on souhaitait. Avoir ainsi un poste fixe, protégé des intempéries, avec toute latitude pour observer, attendre, se consacrer à d’autres tâches ou à la lecture dans les moments où rien à dire. Et que c’était la nuit, pour écrire la nuit, et chacun ou chacune à disposition sa cage. Moi ce serait celle-ci, forcément j’étais curieux. Mais l’ami me pressait le pas : non, ce n’est pas bien ici de photographier, non, la nuit ne nous appartient pas, non, tu reviendras, tu auras le temps plus tard. Mais moi c’est maintenant que je voulais photographier ma cage à écrire, je pensais déjà à des histoires. Et, quand même, normal de vouloir photographier le lieu avant que de s’y installer. Non, on ne s’arrête pas, c’est des histoires, c’est des ennuis. À cause de ces types qui vendent, de ces voitures avec de la musique par les vitres, postées aux angles, de ces silhouettes mobiles avec capuche : apparemment, ici dans la ville, on leur condescendait des heures. Mais moi, la cage, c’est la nuit qu’elle m’intéressait, pas dans les heures blêmes ou mauves du jour finissant ou commençant. Alors j’ai pris quand même mes images, trop vite, tandis qu’il me pressait qu’on avance. J’aurais donc le n° 405, chacun et chacune se voyait attribuer un numéro. Et les cages étaient baptisées de noms d’écrivains, c’est normal, c’est ce qui vient à l’idée quand il s’agit d’y inviter des auteurs à écrire la nuit, écrire la ville. Celle-ci s’appelait Genevoix, pourquoi je n’y apporterais pas un bouquin de Genevoix, j’ai dit. Je n’ai jamais lu Genevoix et toi, j’ai dit à l’ami. Allez, on y va, on ne fait pas de photos, ici, comme ça, la nuit, m’a dit l’ami, dépêche-toi.

 

 


François Bon © Tiers Livre Éditeur, mentions légales
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1ère mise en ligne et dernière modification le 25 janvier 2020
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