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2019.09.01 | documenter la nuit

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Discussion avant-hier sur Facebook, à propos de ce journal : qu’en photographie, j’avais dû laisser entendre, le plaisir qu’on a à documenter nos petits timbre-postes de réel traversé suffit à légitimer l’appareil, l’archive, le geste. Ce n’est pas ce qu’on photographie qui ait besoin ou qui légitime qu’on le fasse. On réinvente rétrospectivement cette archive du monde photographié : ainsi quand la National Library avait mis en ligne plus de 25 000 images du New York des années 20-30. L’archive s’invente non pas depuis sa seule existence dispersée, mais par le geste qui la constitue telle. Aujourd’hui, le réel que nous traversons peut paraître sur-documenté : nous anticipons même ces traversées à venir par Google Street View, quand bien même la paresse fonctionnelle et le sempiternel angle et hauteur de vue tournants de ces véhicules ne nous le facilite guère. Donc, ce que nous documentons, c’est notre étonnement au réel : là-même où justement il échappe à toute catégorie qui voudrait le documenter. Une poétique de l’autoroute ? Je ne suis pas le premier. En écrivant un livre qui s’appelle Autoroute, j’ai initié à jamais un fil qui se déroulera tout au long de la vie de mon site : un site, c’est un livre tel qu’il continue à vibrer. Et c’est la fausse référence à une documentation (fictionnelle, mais ça fait 20 ans, c’était pas dans l’air du jour) qui a poussé ce livre sur les bords — d’ailleurs il y a tout un journal du making-of, avec les fac-simile de mes cahiers, dans la partie abonnés du site. Donc, ici, c’est cet étonnement qu’on complète. La question de la photographie, ou son ambivalence, est en cela même : doublement affirmer que cela est (donc document), et affirmer sa nature de photographie (et et donc coupure ou négation du document). Mais comme nul ne nous demande de nous justifier de leur existence (donc en tant que photographie), tout va bien.

 


François Bon © Tiers Livre Éditeur, mentions légales
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1ère mise en ligne et dernière modification le 1er septembre 2019
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