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2015.11.29 | alors j’ai piqué un fard

En 2 ou 3 ans je m’énerve bien moins, j’ai des techniques pour ça, mais je suis toujours moi-même surpris quand ça éclate à mon corps défendant et c’est peut-être même dans cette expression qu’il faut descendre : est-ce que mon corps inclut mes livres ? C’est venu par un ami veilleur sur Twitter (un vrai travail de veille, qui nous apporte beaucoup à tous), son pseudo c’est @TheSFreader, qui avait repéré une page plus que louche (ce soir c’est réparé, je n’ai jamais écrit de livre qui s’appelle L’espace des rêves et je n’ai pas fait de copie écran, c’est comme si tout ce saccage n’avait pas existé). Je suis habitué plus ou moins à ce genre de truc, il y a plusieurs François Bon dont au moins un qui publie aussi des livres, mais là c’était plus que de la confusion : mélange de couverture, titre, prix... D’abord j’ai cru à une erreur de l’éditeur. Il y a quelques semaines, pas beaucoup, j’avais reçu une proposition du Seuil, il s’agissait de dépecer mon Autobiographie des objets en 3 ou 4 chapitres qui seraient vendues comme des nouvelles séparées, le tout pour une somme forfaitaire de 300 € qui serait renouvelée tous les 10 000 téléchargements. On en est là. Je ne sais pas si c’est la somme ou le dépeçage, mais en tout cas j’avais fermement et poliment décliné, juste archivé le mail et basta. On a des discussions dans la confiance avec le Seuil, ils savent que je suis opposé à une politique de livre numérique vendus sous absurdes DRM et à prix plus haut que le poche, et d’ailleurs les éditeurs classiques font peu de suivi, mon Proust était paru sans même de table des matières et il a fallu que ce soit moi qui m’en aperçoive. On a un deal sur la base de droits à 23% (je dis ça pour tous leurs confrères, et eux-mêmes parfois, continuant de proposer des contrats numériques à même niveau que les droits papier) et une exclusivité limitée à 2 ans sur la vente numérique, ce qui me permettrait de proposer aujourd’hui Autobiographie des objets ou Proust est une fiction sous ma propre bannière Tiers Livre Éditeur, important parce qu’ainsi les livres redeviennent évolutifs en permanence et il y a quelqu’un derrière pour s’en occuper. Pour les Lovecraft, je garde l’entièreté des droits numériques, trop vital pour moi et garder toute cette aventure vivante (il est question d’une adaptation France Culture au printemps). Et fermement attaché à cette idée d’un accès global à mes eBooks via pass forfaitaire, il faut absolument inventer de nouvelles règles du jeu. En quelques minutes (mais j’avais déjà envoyé un message au Seuil leur demandant d’arrêter le massacre), et ayant vérifié que seule la plateforme FeedBooks, qui ne vend d’ailleurs jamais aucun livre (mais je sais qu’ils essayent de se placer dans la curée pour la diffusion numérique en bibliothèque) proposait ce cafouillage. Explication embêtée (mais aucune excuse, rien que de l’arrogance) de ladite plateforme, soi-disant qu’ils s’étaient trompés dans les ISBN : excusez-moi mais les ISBN c’est précisément ce qui permet de repérer les livres, et qu’ils étaient totalement incapables de savoir combien de titres étaient affectés par leur cafouillage. Donc ils ont retiré ça de leur site, mais c’est juste ça : pourquoi j’ai réagi aussi rageusement et chaotiquement sur quelque chose qui avait si peu d’importance, sinon justement parce que ça touchait à ce qu’on met dans nos textes ? On a quoi pour nous : le désordre noir du monde et l’absence totale de perspective dans lequel il s’enfonce. La précarité de plus en plus structurelle par effritement de l’univers culturel, commandes, actions publiques (super content de la proposition France Culture évoquée ci-dessus, mais ça faisait quand même 10 ans, depuis 2006, qu’on n’avait rien fait ensemble...), mon salaire de prof à 1700 net dans mon école d’art alors que c’est quasiment du temps plein pour le boulot et la suivie, le chauffe-eau qui fuit, la bagnole et la cuisine qui tombent en ruine et tout ça, on surmonte, on surmonte – mais voyez, quand ça touche à ce seul truc qu’on a et qui nous rend fier, les textes, là je maîtrise pas. Tout est revenu à la normale, rassurons-nous : on ne s’intéresse au livre numérique que lorsqu’il foire. Et rien de tout ça n’a existé, ils ont cavalé apparemment pour réparer leur plateforme boiteuse et c’est encore moi qui vais passer pour un excité alors que les autres auteurs bugués ne s’en seront même pas aperçus, pas plus que nos éditeurs.

LE CARNET DU SITE
 nouvelles vidéos : lectures à Nantes et Poitiers et atelier à l’école d’archi de Nantes
 lu sur le web : lecture toujours dense et remuée des carnets d’Arnaud Maïsetti
 nouveau ou actualisé sur Tiers Livre : rapatriement des travaux installés ces 2 ans sur TheLovecraftMonument.com (qui devrait s’effacer le 15 déc, nerval.fr cette semaine,
je resserre la voilure), dont le mémoire sur la vie privée de HPL par Sonia son épouse (encore un bout de fin à traduire).

François Bon © Tiers Livre Éditeur, mentions légales
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1ère mise en ligne et dernière modification le 30 novembre 2015
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