
2008.10.03 | carnets, stylos, notes
Ça doit être facile de retrouver sur le web la date précise où Andy Goldsworthy a choisi dans ce coin de montagne près de Digne cinq lieux précis, et y a construit 5 fois le même oeuf. Le nôtre, on l’aperçoit de loin. Puis, une fois qu’on l’a rejoint, on comprend – intuitivement, sans mots : quelque chose d’une tombée commune des montagnes. Une manière de s’articuler ensemble pour toutes les formes environnantes, leur poids, leurs perspectives. Un autre oeuf identique, à quelques kilomètres d’ici, est dans le lit d’une rivière. Presque personne ne passe sur cette route menant à un col minuscule et âpre. Et encore moins personne pour venir le saluer, le soir, au crépuscule. Andy Goldsworthy est reparti. Il est coutumier aussi d’oeuvres éphémères – comme celles taillées dans la glace. J’imagine que la construction ovoïde, faite avec les pierres plates d’ici, est parfaitement compacte. Il n’y a pas de ciment ni rien d’autre pour l’assemblage. C’est ici. Ça reste. Je pense à nos mots. À la fragilité des machines qui les portent. À l’effacement. Au bruit environnant, dans lequel nous les plaçons. C’est ce dont je suis reconnaissant à Goldsworthy, quand on monte le soir palper mentalement les montagnes, au crépuscule, par cette immobilité qu’il nous offre – et qu’on ne percevrait pas sans l’énigmatique tenseur : qu’il me permette de penser cette énigme, ou bien, très précisément, que notre sort nous ait placé sur des schémas aussi distincts et éloignés.
1ère mise en ligne et dernière modification le 27 juillet 2011
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