Comme un siphon qui t’arrache au carat du rêve. So-nnerie. So-nnerie. In-su-ppor-table sonnerie. Conscience qui éclate. Pipi. Vite. Froissement de la porte. Chut. Ne pas la réveiller. Chut. Bruit de cuvette. Pivot. Plon-plon-plon-plon-plon. Pipi sur les flancs. Pas de glou-glou. Chut. Ne pas la réveiller. Pieds qui volent. Clic. Soupirs. Café. Glouglou. Tasse. Chaise qui racle. Chut. Râle agacé. Pourquoi ? Pourquoi toujours du bruit ? Bruit de carnet. Bruit de trousse. Bruit de plume qui… déjà ? So-nnerie, so-nnerie. Eau, dent, douche, chaussettes, slip, pantalon, t-shirt, pull. Bruits de sac. Fermeture. Zip. Clés. Porte. Marches. Porte. Deux trois — piafs et paf. Journal. Jingle. Bonjour ! Bruits des voitures, bruits de klaxons, bruits des auto qui tournent, tournent autour du giratoire. Annonce. Métro. Problème. Fracas. Soupirs. Porte. Silence. Silence des matins. Puis… Excusez-moi, je sais que c’est pas facile et qu’on… Soupire. Porte. Station …Chapelle. La… Brouhaha. Sabir. Grondement. Bruits. Bruits. Bruits des roues qui tapent, qui tapent contre les marches, des valises qui tapent, des poussettes et des paniers qui tapent. Grondement. Échos. Raclement des courroies de l’escalator/roule ses marches métamorphes et sales. Bruits de l’odeur. Bruits du gras. Bruits de l’huile. À bout de souffle. À bout de salive. Bruits du fer qui tape contre le fer. Pass. Validation. Soupir. Brouhaha. Marché de contrebande. Bled ! Bled ! Âpre négo. Cri… cha’Allah.. Bruits des bottes et des pas, des tonfas qui déjà… vite, vite, remballe, détale à l’autre bout du tube — là où l’annonce se mêle à l’annonce qui se mêle à la soupe des haut-parleurs de supermarché. Supercherie. Super je l’ai ! Bruits des pas au pas de course. Escalier avalé. Hop hop hop ! Klaxon du train. Bruit du saut. Soupir. Bruits du souffle. Du souffle qui se reprend/s’apaise. Bruit de ce type qui gueule à n’en plus finir dans son téléphone. Bruit de cet autre qui — vidéos-fragments/swipe/swipe — hurle de plus belle. Impossible de — bruit, bruit — bruit du livre qu’on ouvre, qu’on ferme, qu’on bouge. Bruits de gêne/d’agacement/de bouche. Désespoir du son qui cherche à annuler le bruit pour créer un espace d’insonorisation où la montée les nappes inventent un bourdon qui, bien que présent, neutre, garantit, comme il peut l’absence de paroles parasites/puis quoi, déjà ? — Soupir — Vous pouvez pas laisser descendre ? Encore un grondement. Encore un pass. Encore une validation. Bruit des poulets qui tournent sur la broche ; des croissant qui cuisent dans le four ; des prolo qui cuisent dans le bus. Encore un klaxon. Bruits du bistrot qui fait l’angle. Du désespoir de l’Amigo, des bourrins qui n’arrivent jamais dans l’ordre. Donne-moi un Goal pour me consoler. Et un café pendant que tu y es. Bruit des machines Richard. Tchhhhhhh ! Quelques oiseaux dans la cité. Quelques cuicuis dans les tours. Un ou deux arbres qui bruissent dans le vent. T’as ta carte ? Bruit de grille qui glisse sur ses gonds. Bruit des élèves qui jurent/révisent/checkent/saluent/grognent/insultent/commentent/avancent/poussent/soufflent/dansent/s’entassent/se frottent — check, check — j’ai pas ma carte/je m’en bas les couilles. Bruit de la porte que l’on ouvre, de l’escalier que l’on monte, des battantes poussées à la hâte. Bruit de salle qui crépite autour des cafetières. Paquet. Dosettes. Vider. Remplir. Placer. Bruits de l’impatience. Bruits de la fatigue. Bruit du gros des troupes qui envahit les couloirs. Sortir. Salut. Monter à l’étage. Bonjour. Bruit des clés que l’on sort, des clés que l’on glisse, des clés que l’on tourne, des clés que l’on range. Raclement de chaises. Symphonie bruitiste. S’il vous plaît…Bruits des affaires que l’on sort. Bruits des retardataires. S’il vous plaît, un peu de silence ! Bruits qui vont s’amenuisant. Bien. Bruits/Bruits du jour/Bruit du jour qui s’apprête à…
Trépidant (pour le moins). C’est quand qu’on respire (dans cette vie je veux dire) ? Dans ton texte, c’est comme si chaque bruit disait à qui lit : pousse-toi que je m’y mette. On est comme cela, de point en point (re)conduit jusqu’au bout (de la lecture comme d’un tunnel) : expulsé. Pas le temps de s’installer, ce n’est pas la place, circulez. La lecture du bloc entier, son mouvement mime celui plus général de désappropriation des vies (à travers l’emploi du temps, temps non libre). C’est, finalement, du mouvement vers le travail quotidien qu’il s’agit. Les bruits en deviennent les principaux acteurs, acteurs souterrains. Efficace
Merci Christophe, pour cette lecture et cet encourageant commentaire qui est déjà un texte en soi. Au plaisir de te lire prochainement.
welcome on board !
Merci François !
Quel rythme, vue par ces sons , la vie est usante, mais pas ce texte qui lui est très agréable à lire, bravo.
Merci Laurent !
Tellement réel et trépidant. Une vrai immersion par les bruits. On y est, complètement. Et même plus. Vraiment bien. Merci.
Merci Jean-Luc !
impressionnant cette sensation à la lecture que ce trajet en bruits reproduit en temps réel la longueur d’un trajet en transport qui n’en finit pas, alors que les deux parties qu’il relie semblent plus rapides et courtes.
Merci !