Je pousse la porte et je rentre, je pose sur la table le sac des courses faites en sortant du métro, je me lave les mains, l’alarme du téléphone sonne, il est 21h, je dois prendre un médicament, je l’avale avec un verre d’eau, je sors les courgettes, le kiri, je prépare une soupe, j’allume le four pour réchauffer un reste de soufflé, j’hésite à le servir avec une tranche de Serrano, je choisis une danette au chocolat en guise de dessert, je mange, c’est bon, ça fait du bien, je soupire, je fais bouillir de l’eau pour une tisane, je me lave les dents, j’entends la porte s’ouvrir, il rentre.
Je pousse la porte et je les vois en demi-cercle, la famille et les ami.e.s, brandissant un gâteau d’anniversaire avec des bougies allumées, elles éclairent leurs sourires malicieux, leurs mines de fêtes, leurs airs réjouis, et j’entends « Surprise » !
Je pousse la porte et j’imagine : je me heurte à des corps, impossible d’avancer, tellement de morts, de mortes. Ils et elles sont là jonchant le sol, ils et elles sont là allongé.es dans les débris, ils et elles sont là inertes, arrêté.es, stoppé.es, ils et elles sont là en tas, les un.es sur les autres ou alignées les un.es à côté des autres, ici une femme isolée le bras écarté du corps, comme tendu vers… là un enfant recroquevillé la bouche béante, comme appelant… et partout de la fumée, une odeur pestilentielle, un silence assourdissant, aucun gémissement, pas un souffle de vie.
Je pousse la porte et soudain le son du piano, l’odeur de violette, l’obscurité de l’entrée, j’hésite à faire demi-tour, je rentre d’un pas décidé, je me dirige vers la fenêtre, je l’ouvre, j’appelle Ferdinand, il monte avec son violon, j’empoigne le violoncelle et tous les trois nous jouons Schubert. Encore, encore, s’il vous plait encore.
J’ai été surprise et assez bouleversée par ce texte en quatre fragments qui échappent à la logique et dans ce peu de connaissance qu’on a du sujet que tu sembles vouloir aborder
Le parfum de violette et le merveilleux son du violoncelle nous sauvent…
Merci Françoise, oui tu as raison, il n’y a pas de continuité dans le contenu. J’ai plutôt cherché à travailler 4 styles (univers) différents: dire le plus platement le quotidien/ mettre en scène une émotion collective/ par l’imaginaire raconter et éprouver l’horreur/ une évocation submergée par les sens. Aussi J’ai essayé de faire monter le curseur « intensité d’émotion » au cours des 4 fragments.
Je reconnais que c’est laborieux, je te remercie sincèrement d’avoir pris le temps de lire et de me faire un retour. (Je m’accroche, j’ai un peu du mal à suivre en ce moment)