Elle pose son sac sur la table et regarde autour d’elle. C’est une chambre sobre, austère. Une table en formica, deux chaises en simili cuir et métal. Un lit double, deux tables de nuit, en formica également. Un placard. Une télé accrochée au mur. Une large fenêtre rectangulaire. Dehors la ville. C’est la nuit. Elle s’approche de la fenêtre. Elle se demande ce qu’elle fait là. C’est la ville où elle est née. Elle y habite et pourtant elle ne la connaît pas. Au bas de l’immeuble, le train, une gare souterraine, le train pénètre dans le tunnel qui traverse la ville de part en part. Elle imagine les passagers du train qui ralentit, ceux qui, indifférents, sont rivés à leur écran, ceux qui se lèvent et se dirigent vers les portes, ceux qui lisent ou dorment. Elle se demande si eux, ils imaginent la ville au-dessus d’eux, la ville qui les engloutit, les gens dans les immeubles qui travaillent ou, comme elle, regardent par la fenêtre. Elle porte son regard plus loin, sur les immeubles d’en face, occupés par des bureaux pour la plupart. Pas mal de lumière allumée, à tous les étages, des veilleurs de nuit, des gens qui bossent, ou des lampes qu’on oublie d’éteindre. Parfois elle se dit qu’il n’est pas possible qu’autant de gens travaillent encore à cette heure tardive. Elle regarde l’immeuble face à elle, il est très proche, du coup pas d’autre choix que de lever les yeux, se laisser happer par la verticalité. Le sommet des bâtiments se confond avec le ciel. Elle a choisi ce lieu parce qu’il est un point d’intersection entre l’horizontalité et la verticalité de la ville, verticalité qui n’est qu’accumulation de couches d’horizontalité. C’est ce qui la fascine dans la ville, cette superposition de strates, comme autant de mondes différents qui interfèrent les uns avec les autres ou s’ignorent totalement, cette agglomération de volumes, appartements, bureaux, chambres d’hôtels. Au-dessus d’elle, dessous, sur les côtés, d’autres chambres pareilles à la sienne, d’autres gens comme elle, en transit sans doute, on ne passe pas ses vacances dans ce type d’hôtel, elle se dit qu’elle doit être la seule à avoir pris une chambre dans cet hôtel ou dans tout autre hôtel pour explorer la ville où elle habite. Elle ouvre son sac, en sort son appareil photo, son ordi, elle ne part jamais sans et quelques vêtements qu’elle range dans l’armoire. Elle ne sait pas combien de temps elle va rester.
J’adore la ville. La ville comme point de départ d’un aventure c’est tellement riche… envie d’en savoir plus sur « elle » aussi, de s’imposer discrètement à ses côtés pour la suivre dans ses pensées, ses actions. Bon vent alors!
Merci !
Oui on a envie de savoir ce que le personnage va faire dans cette ville, comment il va investir les différentes strates de cet univers si bien décrit, j’aime le côté générique des descriptions qui peuvent s’accorder avec beaucoup de villes et en même temps la précision de la chambre dans laquelle il arrive. L’appareil photo m’intrigue… accessoire de vacance ou professionnel ?
Ou ni l’un ni l’autre… 😉
Merci pour ce début de voyage. Une aventure commence et tout peut arriver…
C’est ça qui est bien avec les propositions, c’est que tout peut arriver, en effet…
« Elle y habite et pourtant elle ne la connaît pas ». Un sentiment souvent éprouvé. Très envie de connaître la suite de cette aventure !
Merci !
« Elle ne sait pas combien de temps elle va rester. »
De passage ou de retour définitivement.
Le temps d’une exposition de ses photos ?
Une ville un hôtel miteux ? beaucoup d’interrogations…
J’ai déjà certaines réponses, mais pas toutes…
Merci pour vos commentaires et vos lectures !