#été2023 #16 | un chantier de papiers

Note numéro 1 dite Récapitulative :
Le cycle de l’atelier estival a engendré, pour ma part, 30 contributions (en comptant celle-ci). De la 1 à la 12 avec les bis (24) puis de la 13 à la 16 (4), avec le prologue et une 7bis que j’ai doublée. 30 textes donc, qui n’ont pas tous eu pour cadre le roman que je suis en train d’écrire. Certains de ces textes, en effet, ont été réalisés en dehors de ce cadre.
Le cadre, c’est un livre, donc, dont j’ai débuté l’écriture il y a plus d’un an. Avant ce cycle, deux des trois parties que j’avais prévues étaient écrites, à quelques détails près. La première partie, d’un volume de 26 000 mots et de 153 000 signes, a déjà fait l’objet d’une relecture lors de nos ateliers zoom du samedi. La deuxième partie, plus courte (6 500 mots et 38 000 signes) est aussi assez complète. Reste cette ultime partie que l’atelier estival doit m’aider à finaliser.
Si l’écriture des deux premières parties de ce roman a été plutôt linéaire, sans que je m’interdise évidemment la possibilité de revenir en arrière, l’écriture de la troisième partie a été beaucoup plus éclatée. Dans mon esprit, il s’agissait de construire des « îlots narratifs », des situations différentes, avec des personnages différents qu’il me faudra, plus tard, relier. J’ai ainsi alimenté plusieurs de ces « îlots » au rythme des propositions bi-hebdomadaires ou hebdomadaires de l’atelier, sans me soucier de chronologie ou de suivi dans l’écrit. 
Voici la répartition des 30 textes (24 sont utilisés dans le cadre du livre) :
– 2 textes sont susceptibles d’alimenter, en complément, la première partie (#04 et #05).
– 1 texte est destiné à rejoindre la 2ème partie (#06bis).
– Pour la 3ème partie, la répartition des îlots est la suivante :
– îlot « Hippolyte » : 5 textes (#01, 02, 02bis, 05bis et 06)
– îlot « Ulysse plage » : 6 textes (#07, 07bis1, 8, 11, 11bis et12bis)
– îlot « Ulysse cave » : 2 textes (#09 et 09bis) 
– îlot « Ulysse Rimiliari » : 3 textes (#13, 14 et 15)
– îlot « le bal » : 2 textes (#08bis et 12)
– îlot « les lettres » : 2 textes (#10 et 10bis).
– 1 texte (#03) doit être incorporé dans cette 3ème partie sans que je sache ni où ni comment.
– 6 textes n’ont pas été utilisés parce que hors cadre (prologue, #01bis, 03bis, 04bis, 7bis2, 16 même s’il est probable qu’une partie de la #16 rejoigne le livre).

Note numéro 2 dite Identification des manques :
De ces îlots épars émergents, imprimés et posés sur la grande table en bois, le livre ressemble à un chantier de papiers. Identifier tous les textes et les classer dans une savante nomenclature, établir une grande affiche remplie de nuages, une carte permettant de situer les textes dans leur ensemble en un seul regard. Puis penser les ponts, relier les îles au continent qu’est le livre, relier les îles entre elles, construire des routes. Après ça, évaluer l’ensemble, le soupeser, jouer la partition et couper les arbres trop volumineux, ouvrir les impasses, réécrire la porte ouverte (comme dit Stephen King). 

Note numéro 3 dite Confrontation :
Dans cette troisième partie, peut-être la dernière du livre (je ne sais pas exactement comment et quand il va finir), Ulysse s’est arrêté. Tout semble à l’arrêt. C’est sans aucun doute la position de l’écrivain, la mienne. S’arrêter et penser le monde, s’arrêter et regarder le monde, s’arrêter et voir ce qu’il se passe. Ulysse alterne des réflexions immobiles et des situations dont on en sait pas trop si elles appartiennent au domaine du rêve. Comme il est suggéré dans cette proposition #16, je vais prendre la #01 et imaginer l’écrivain, en l’occurrence Hippolyte, au bout de ce cheminement d’écriture, exactement là où j’en suis aujourd’hui. C’est drôle parce qu’Hippolyte n’était pas censé être l’écrivain de ces textes, il devait disparaître de la narration ayant choisi de quitter le monde des personnages de romans pour intégrer celui des écrivains de romans. Mais l’idée qu’il soit l’auteur des aventures d’Ulysse, malgré la volonté de ce dernier qui ne veut pas qu’un écrivain lui dicte ses faits et gestes, cette idée là est plutôt séduisante. En tous les cas, ça vaut le coup d’essayer, même si je ne garderai peut-être pas cette option dans le texte final.

Depuis le bureau face à la fenêtre ouverte où se perd son regard, Hippolyte est en proie au doute. Ulysse est prisonnier de la ville de Rimiliari. Quand il n’est pas assis sur la plage, il erre dans la ville en quête d’un signe, à la recherche d’une direction à prendre. Hippolyte ne sait pas pour quelles raisons il hésite. Ulysse sait-il seulement qu’il est écrit ? Sait-il quel est, en ce moment même, le personnage d’un roman ? Sait-il que, malgré lui, il y a un écrivain qui doute avec lui ? Hippolyte ne s’était jamais posé la question en ces termes, si un personnage de roman peut avoir conscience de sa nature avant même que le roman n’existe. Même si, sans doute possible, ce roman existe puisque vous le tenez entre les mains. Hippolyte se prend la tête dans les mains, ses réflexions dépassent le cadre de la logique. Il en assez de ces interrogations qui le dépassent, il en a assez de se poser des questions. Hippolyte veut juste écrire.

Une fois de plus, il regroupe les feuilles éparpillées devant lui. Il relit, il classe, il imagine. Il écrit. Dans la pile des feuilles imprimées et manuscrites, des dessins crayonnés et des pages maculées d’auréoles de tasses de café, il retrouve une lettre qu’il n’a pas envoyée. C’est une demande de bourse, pour être exact, une lettre de candidature à l’obtention de la bourse Cervantès.

A propos de JLuc Chovelon

Prof pendant une dizaine d'années, journaliste durant près de vingt ans, auteur d'une paire de livres, essais plutôt que romans. En pleine évolution vers un autre type d'écritures. Cheminement personnel, divagations exploratives, explorations divaguantes à l'ombre du triptyque humour-poésie-fantastique. Dans le désordre.

Un commentaire à propos de “#été2023 #16 | un chantier de papiers”

  1. riche : tes 3 notes récapitulatives et leurs ilots tel un répertoire, le schéma d’organisation, la lettre
    plus que le reste je retiens le doute, comme une transpiration
    « il erre dans la ville en quête d’un signe, »
    ou
    « tout semble à l’arrêt »
    ou
    « Hippolyte est en proie au doute »