Elle connaît la passion de Verlaine pour Rimbaud, le coup de pistolet, l’addiction du poète dépravé à la fée verte, et remontent les sanglots longs de l’autonome, qui semblent bien s’accommoder avec la tristesse sévère de cette statue.
Aussi maudit que son modèle, le projet de ce buste, commencé du vivant de Verlaine, en 1895, a failli ne jamais aboutir. Le sculpteur suisse Rodo, élève de Rodin, souvent désargenté, n’avait plus assez de pierre pour terminer l’édifice. Esquisses, ébauches, plâtres – que l’on peut aujourd’hui voir au Musée d’Orsay avec une notice d’Anne Pingeot – et puis plus rien. Plusieurs souscriptions parrainées par les amis de Verlaine et le Mercure de France n’ont pas suffi.
En 1910, un poète anonyme remporte le prix de poésie de l’Odéon doté de 1000 francs. Il décide de verser l’intégralité de la somme à l’érection du buste de Verlaine et relance l’ultime souscription, celle qui permettra à Rodo de terminer son œuvre. On apprend dans les journaux, notamment la revue Vers et Prose éditée par Paul Fort, que le généreux donateur est une jeune poétesse, Marguerite Gillot. Son poème Le Passé a devancé L’Arbre de Charles Dornier premier prix du Matin et A la foule qui est ici de Jules Romain, deuxième prix du Matin. Est-ce par modestie, par dévotion à Verlaine ou pour ne pas froisser des poètes illustres que Marguerite Gillot reverse l’intégralité de son prix au monument Paul Verlaine ? La belle discrète, aux yeux verts et cheveux d’or, amie de Marie Laurencin et de Guillaume Apollinaire emportera chez elle le vase de Sèvres offert par la Sous-secrétariat des Beaux-Arts.
Le buste de Verlaine fut inauguré le 28 mai 1911 au Jardin du Luxembourg après avoir bravé l’opposition de nombreux sénateurs qui trouvaient qu’il y avait déjà assez statues dans les allées du parc.
Bonjour Laurence,
Mille pistes dans ce texte, on attend la suite donc !
Catherine
Merci Catherine !
drôle comme les histoires redonnent vie à la pierre ! Je ne passerai plus devant de la même manière, vivement la suite !