C’est qui l’écrivain ? Moi ? Un écrivain ça écrit, ça publie. Le compte n’y est pas. Tu n’y es pas, mon garçon. Dis-moi tes rituels, tes manies, tes promenades, je te dirai quel écrivain tu es.
Le bureau symbolique : le seul bureau que je range, que j’arrange c’est l’écran de mon ordinateur. J’y mets une jolie photo que je change régulièrement, je range les dossiers, j’y installe les icônes de cloud ou de stockage plus ou moins lointain, je fais des raccourcis pour accéder facilement à atelier d’écriture 2022 ou livre 2023. Ce n’est pas un bureau pour écrire, c’est un bureau pour passer de temps en temps, regarder les nouvelles du monde, les messages, chercher de l’information anecdotique. Écrire mérite mieux.
La carte géographique est minimale : ici, Paris 11 ou au gré de voyages Burlington, San Francisco. Pourquoi aller ailleurs ? L’inspiration y serait meilleure ? Non ! ce qui manque c’est l’urgence d’écrire quelle qu’en soit la raison, publier, en vivre, poursuivre une œuvre. Mais pourtant je vois bien que le temps de l’écriture serait peut-être meilleur si j’étais ailleurs. Ici, maintenant, le temps c’est le hasard, le temps consacré à l’écriture est celui que je ne consacre pas à autre chose, du temps par défaut. Encore l’urgence : serais-je capable de m’installer devant l’ordi et rester sans bouger, sans avoir trente idées de faire autre chose, si mon bureau était mieux organisé, si j’avais plus conscience de la masse d’information qu’il y a dans les dictionnaires autour de moi et de l’utiliser ? Lisant Toussaint et ses considérations sur après que, j’ai plongé dans Grévisse. Effectivement, le subjonctif est parfois utilisé mais gardons cet emploi, dit-il (Grévisse), comme suspect. La Grande Grammaire du Français est catégorique : c’est l’indicatif. En tout cas, Grévisse est remonté d’un cran sur les étagères. Des dictionnaires, il y en a tout autour de moi, espagnols surtout et anglais, de poche, moyen, grand Larousse. Pour le français, c’est le petit Robert. Ces dictionnaires papier, je les utilise vraiment très peu. Ceux que je consulte parfois : wordreference, CNTRL, DES (Dictionnaire Electronique des Synonymes) : galetas mansarde taudis soupente gourbi grenier bouge bousin. Mes vraies promenades, 20-25 km les week-ends loin de l’écriture. Là, c’est plein de rituels : bonnes chaussures, vêtement en synthétique, sac à dos, lever de bonne heure, … La randonnée que je guiderai en mai sera silencieuse, premier pas vers une promenade donnant place à la réflexion.
Un livre. Rien n’est organisé autour de l’écriture. Je me suis seulement donné un dead line, il faut que le livre soit fini dans un an mais pas de planning genre écriture de tel chapitre puis de celui-ci puis relecture puis réécriture. J’écris sur evernote, pratique, sans mise en page, au kilomètre. Puis quand je pense que ça commence à ressembler à quelque chose, je transfère sur word, j’imprime, je relis, je corrige à la main, je réécris trois ou quatre fois puis j’arrête. Je reprendrai quand j’aurai une idée plus précise de l’intrigue totale du livre.
Me mettre en état d’urgence d’écriture. Et si je profitais de cette interpellation pour prendre l’écriture au sérieux, lui donner plus d’attention, de prévenance ? Dans ce qui te reste à vivre, mon garçon, ce sera important.
Voila une bonne nouvelle, dans un an il y aura un bon livre de plus.
Oui, ça devrait ! Mais le plus drôle c’est que je me suis à peine rendu compte que je divulguais une info que jusqu’ici je gardais pour moi. Il va falloir que je me fasse à l’idée que, de l’autre côté de l’écriture, il y a des lecteurs attentifs. Merci.
Je ne sais pas faire un smiley avec les lettres , mais image le.
Merci pour cette plongée dans ton monde et ce style qui s’anime, s’affirme, me retient.
rituels de marche, silences de la randonnée Evernote au kilomètre…la marche, la pensée… et le livre bientôt (comme marcher)
Oui, Nathalie, ça en fait des kilomètres ! Marcher rêver écrire, belle trilogie.
Merci, Bernard, pour ce texte et pour l’annonce. Dans un an…! 🙂
Merci pour ton passage Helena. L’annonce m’a un peu échappé… en fait, pas tant que ça. Bonne soirée.