Corps en vrac une simple planche de bois posé sur deux tréteaux : 220 sur 65 cm.
Ce vaste plan de travail est recouvert d’un bout à l’autre : 2 chapeaux empilés l’un sur l’autre, 1 pile de 3 revues spécialisées « social », 1 pile de petits cahiers « écolier » plus 1 autre de grands cahiers « écolier », 2 agendas (2021 et 2022), 1 plateau en cuivre (contenant 1 étui à lunettes, 1 paire de ciseaux, 1 cache pot empli de stylos feutre de couleurs, 1 taille crayons, 1 tube de rouge à lèvres), 1 coffret (où sont stockées des clés USB, 1 agrafeuse et ses agrafes, des cartes de visite glanées ça et là), 1 porte stylos, l’ordinateur sur lequel j’écris en ce moment, puis le téléphone, 1 bannette (contenant divers papiers administratifs à trier/ranger/jeter), 1 dictionnaire, et pour l’instant 1 borgès, 1 dickinson, 1 maupassant, 1 mia lecomte.
Vue dégagée ce gros bazar-bureau trône dans une pièce (de dimension modeste) dos à la bibliothèque et face à la porte-fenêtre. Vue sur les plantes du balcon à surveiller (toujours assoiffées), le faîte des platanes, et les immeubles de la place. Dégagement nécessaire pour le regard. Ligne de fuite.
Horloge absente je n’ai pas d’emploi du temps consacré à l’écriture. Ce peut être à n’importe quel moment de la journée. Pas de durée non plus. Ce peut être moins d’1 minute pour noter 1 mot, 1 bout de phrase et puis plus rien ou 3, 4 heures d’affilée à l’ordinateur. Mais jamais davantage. Les mots, bout de phrases s’attrapent n’importe où. En voiture à 1 feu rouge ou dans un tram. Notés sur 1 ticket de caisse, à l’envers d’un Rib. ou autre truc en papier sous la main. En écoutant la radio, il arrive qu’un mot me saisisse et je le note (mais quelquefois je m’aperçois plus tard que seule l’intonation ou l’articulation du diseur m’a plu).
Bulle je ne sais pas quel est le déclencheur. Peut-être une accumulation de mots épars qui demande une place attitrée ? Je ne sais pas. Je n’ai pas de projet d’écriture. Souvent un mot enclenche le processus d’écriture, un mot lié à une sensation qui modifie un état, permettant de m’y mettre. Mais entrer, accepter d’entrer dans ma bulle est très difficile. Souvent, à chaque fois, je me déplace dans l’appartement, prends un café, tergiverse avec moi-même. Un jour, j’ai écris quelque chose à ce sujet, je vous le livre « L’attitude, le mouvement bref de l’instant à venir qui se déclenche. 0n le sent toujours. Un déplacement, un zigzag éphémère, léger et net. Le liseron, la vie qui continue toujours, un peu. On perçoit une légère modification, une pliure minuscule faite d’une matière al dente qui pince, qui oriente vers une autre liaison. Ecrire le, geste qui vient comme on va à la pêche ». Ce qui est sûr, c’est que je sens nettement que je suis prête. Alors je me mets à ranger mon bureau. J’enlève tout ce qui encombre l’espace et ne garde que mes bouts de mots, mes chapeaux, mon coffret, mes stylos/crayons et mon dictionnaire. J’ai besoin de faire place nette.
Et chose étrange, j’ai aussi besoin d’être lavée, maquillée comme si l’inconscient me dictait d’être propre, « nouvelle » en quelque sorte pour aller de l’avant.
J’écris à l’ordinateur, Times 12, interligne 1,5. Là aussi, j’ai besoin de voir clairement proprement ce qui arrive. Les retours à la ligne, les caractères en gras, en italique si besoin, sont pris en compte tout de suite. Si le téléphone sonne, je ne réponds pas. J’ai mis si longtemps à m’y mettre ! Je sais que ces instants sont fragiles. Je me lève souvent, change de pièce, m’y remets sur un mot qui me vient. Consulte le dico pour un synonyme ou une idée à chercher. En général, j’écris d’une traite, je me relis le lendemain et corrige.
Magasin j’utilise le petit Robert et le Cnrtl. Aussi le dico des symboles et le Larousse analogique.
Je comprends à travers mon expérience de la peinture.
Oui, sans doute des positionnements similaires entre disciplines. Merci beaucoup de ton passage Danièle. Bon week-end.
Trigorine dans La mouette il va à la pêche je sais pas si c’est là qu’il tue la mouette … écrire, pêcher… écrire toute propre avec un peu de ce rouge à lèvres qui était resté sur la planche de travail avec Emilie Dickinson? … J’aime lire ces notes concrètes sans détours ( et imaginer ce moment de travail face à la porte fenêtre et ce bacon où grandissent des plantes)
Balcon pas Bacon mais comme Danièle a parlé de peinture
Merci Nathalie. Partager mon rouge à lèvres avec Emilie et parler aux abeilles… Pour Francis, j’aurais bien aimé le croiser sur mon balon.
Oh oui parler aux abeilles ( Francis je l’ai suivi dans la rue il était pas encore mort – enfin je crois) est- ce que les abeilles aiment le rouge?
mise en scène d’écriture à la fois consciente et inconsciente, préparatifs, toilette, maquillage et aller toute belle à la pêche, l’essentiel est bien visible et tout proche
La pêche n’est pas toujours bonne; Loin de là. Loin de là ? Où faut-il aller pêcher ? Et quoi attraper ?… Merci de ton passage Huguette.