#LVME #04 | Une cage à oiseau

C’est un élevage de poussières : velours gris ; peluches, un tourbillon s’en forme autour d’un cheveu isolé, et long. Une incise dans le plâtre de la cloison du dressing : le cadre en pin du lit.

Imitation parquet du sol vinyle déroulant les motifs de ses lattes dans la longueur du couloir ; quelque bombement dû au décollement ; descellement partiel du convecteur électrique, une cheville sortant de la cloison qu’une fissure de haut en bas parcourt ; poussières invisibles, état d’usage, pénétrant le système respiratoire.

Nœuds noirs dont certains s’étirent comme des yeux [ ], les veines du bois formant cernes et ondes tout autour, ondes qui, dans l’alternance de lignes plus marquées et de zones de clarté, dessinent à travers la tiédeur du bois, de marche en marche, un réseau unissant un nœud, un œil à un autre, et ressemblant partout à la modélisation de la rencontre d’un fluide et d’un obstacle, rivière, le vernis abrasé au centre favorisant le creusement de chaque marche sans changer rien au dessin. À l’endroit du mur d’échiffre où la pente du toit rejoint le plafond de l’étage, au haut de la cage, l’abat-jour d’une lampe de chevet de soie rose est plaqué, la lumière se projetant par son sommet sur la cloison d’en face.

Le quadrillage 30×30 cm du carrelage en sa blancheur accueille satinés les flux et reflux du jour ; les ombres y croisant le tracé sombre des joints ; de loin en loin la trace de la pointe d’un pied. Sensiblement plus tièdes les plinthes, peintes du même blanc que l’ensemble des murs qu’ombres ainsi que rayons remontent. Tressaillement d’un radiateur.

Carreaux 19×19 cm terre, cuite imitation grès, disparaissent sous chaussures de sport toutes marques, pointures 28 au 42 murs blancs dont un parpaings nus peints coffrets électriques disjoncteur général, stoppent montée piles boîtes à chaussures manteaux, vestes, doudounes cirés coupe-vents superposés épaules gauches dans des droites accrochées à patères au-dessous métal noir, support mural à chaussures talons hauts pointés, bas des murs marqués de traces noires ainsi que bas de portes au nombre de trois battant l’une dans l’autre.

Pavés bétons autobloquants en H sable, intégralement recouverts des macules (thalles) grises, brunes, verdâtres juxta- ou superposées de lichens crustacés saxicoles non-identifiés (lécanore des murs ?) ; le liseron des champs s’immisçant quant à lui par les interstices que le déchaussement progressif (galeries de fourmis) génère, jusqu’à s’insérer en touffes et tapis dans les lézardes du crépi se détachant au bas des murs.

Paillasson découpé aux dimensions de la marche, qu’il recouvre, grisé sur le bord extérieur. Innombrables fibres détachées de la brosse en coco parmi d’autres, pris en elle, résidus de débris végétaux, animaux, minéraux. De bas en haut l’alternance dans l’épaisseur du mur de part et d’autre des boutisses parpaignes et du mortier des joints.

Délimitation symbolique, démarcation décorative des trottoirs en deux bandes longitudinales comme il se doit de graviers pris dans un enrobé de ciment, sans différence de niveau avec la chaussée, sans autre bordure que la ligne verte de mousse hérissée d’encore rares touffes d’herbe, de pissenlit, de pourpier ; les mêmes à la jointure du trottoir et de la façade continue des maisons mitoyennes — de ville — à pierres apparentes.

La mousse est prépondérante, qui capte les premières lueurs du jour autour des mottes retournées [ ] ; des pâquerettes en fleurs ou pas et de quelle saison ; des feuilles brunes d’un pommier du japon disséminées, posées sur leur face supérieure ; de pousses tendres de fenouil sauvage ; des résidus de la taille de thuyas ; des vestiges d’un gazon. Le grillage de clôture est gainé de plastique vert sapin, tendu entre des piquets métalliques en T scellés dans un muret de ciment que franchit le lierre, d’un côté, un analogue tapis par-delà. De l’autre les thuyas sont taillés.

8×8 les cotes des carreaux d’un rouge brique terni par la poussière que parcourent depuis un seuil de ciment rainuré feuilles mortes et écheveaux de toiles poussés de jour en jour sous les portes par le courant d’air jusqu’au bas des murs à la rencontre, un peu tout le long, de petites crottes noires. En larges bandes se croisant perpendiculairement ou en applications ponctuelles, les raccords à l’enduit sont demeurés apparents sur le carton du placo ; le pholque suspendu, la tégénaire invisible. 

Une fosse maçonnée au coin du garage, assez longue pour y loger un escalier de meunier au bois brut, à la pente raide dans l’absence de rampe, aux marches étroites, que son gabarit tient debout, calé sans autre fixation entre les parois de béton, la poussière omniprésente ; à la lumière électrique, le volume barré d’ombres ainsi délimité, inaccessible, sous l’ouvrage.

Un dénivelé total de guère plus d’1 m pour une longueur de rue maximum de 160 en courbe, précisément en deux coudes, faux-plat descendant ; le caniveau central en est jalonné tous les 15 à 20 m de grilles d’évacuation des eaux de ruissellement rondes (Fonderie Quéruel 61 Flers), aux raccords avec le caniveau desquelles le béton craquelle, ainsi que le bitume autour des plaques d’égouts (regards de chaussée Pont-à-Mousson). Au point le plus bas, à peu de distance de l’intersection et du stop, un pochoir au sol, soulignant l’avaloir, indique que la mer commence ici.

Safe place de chaussée sèche, sans poursuite de l’éclairage public, à la place, tombante avec l’ombre, une vague, ou stagnation de chaleur. Dispositif à quatre pattes [ ]. Immobilité trompeuse.

Un carton effondré ici, une caisse renversée là et leurs contenus éparpillés tels que la gravité en a décidé dans le passage sans qu’aucune main, pas même un pied y soient pour rien sur la chape et sous un éclairage également cimentaires, sourds, l’effet en étant dû à l’entour intégral de murs de parpaings nus et à la luminosité faible de deux ampoules de même.

Le marquage au sol stop est une ligne blanche transversale continue d’une largeur égale à 50 cm qui s’étend sur toute la largeur de la voie affectée à la circulation des véhicules qui doivent marquer l’arrêt imposé par le panneau octogonal stop [ ]. Elle ne doit jamais être tracée en l’absence du panneau octogonal stop. Le panneau octogonal stop indique l’intersection où les conducteurs doivent marquer un temps d’arrêt et céder le passage aux usagers de la route rencontrée. Il est placé de façon très visible et aussi près que possible de la limite de la chaussée abordée. Bitume fondu ou gomme pneumatique, le marquage blanc au sol stop est, du côté gauche des véhicules concernés par le panneau octogonal stop, traversé d’une traînée, vague, noire.

La terre ratissée, blanche ici et là d’une espèce de salpêtre ; l’humidité se communiquant de parpaing à parpaing désigne pyramidalement depuis les bouches d’aération à hauteur de plafond l’infiltration des eaux de pluie ; assombrissant dans les coins la terre grise ratissée ; jusqu’à, un peu décalé par rapport au centre, un monticule constitué des graviers et mottes non pulvérisées de boue séchée issus du ratissage portant, défoncée, peinte, une cage à oiseau.

La tôle est chaude et laquée, peinte en blanc, lisse et bombée, ici plissée, anguleuse aux arêtes douces, le museau étiré d’un chat. Elle a fini de ronronner, et cliquette. Rétractation. La vitre qui la prolonge, se soulevant protège du courant d’air. Des gouttes d’eau glissent lentement le long, condensation, à lapper.

La ligne continue puis discontinue. La nuit grise rose le ciel se pose dessus.

Une bande rectiligne largeur 28 cm, bombée, d’éléments ajointés longueur 50 cm en béton repeint crème, à 1 m 70 de hauteur ; de part en part, le vide [ ] : côté jardin ; côté rue.

Une diagonale traverse le rampant suivant une pente qui décroche, par voie de conséquence, sensiblement de ses 40°, qui délimite une zone du toit de tuiles plates, triangulaire, à l’intérieur de laquelle le vert des coussinets de mousse est, tout aussi sensiblement, plus répandu que dans l’autre moitié, la supérieure ; celle-ci correspondant probablement à la surface qui, sur la période d’une année sidérale, demeure le plus longtemps à l’ombre du mur gouttereau de la maison voisine, bien qu’une bande à l’aplomb du débord de son toit en soit totalement dénuée.

Sous des épaisseurs, des monticules — des montagnes — de laine de verre festonnée de toiles d’araignées — sous le poids — impossible d’ouvrir la trappe plus haut que, dans le faisceau de la lampe torche, le point de vue sur, surprise, le carter plastique noir à deux bouchons jaunes de la VMC suspendue à un fil à linge tendu entre les chevrons de la charpente.

Le sol est un branche, fine, qui court, s’interrompt dans un mur [ ] hérissé d’autres branches, perché. Le sol n’est qu’une branche. Fonçant dans un mur d’embranchements.

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