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Derrière, devant les silences, mon corps exalte de son cri sans voix, la victoire de la vie, un corps éclaboussé de lumière par un monde sans passé, tant le cordon tissé de rouge et de noir a été coupé, avant de lui couper le souffle, derrière les silences, mon corps errant comme le juif, s’est faufilé dans le tunnel de ses milliers de vies, derrière les silences, mon corps a enfanté d’autres corps, un corps à corps qui se rassemble et nous ressemble, derrière le silence mon corps s’est érigé en amazone à l’heure de tous les dangers le cœur plus proche de l’amour, derrière les silences mon corps a compris sa respiration, son souffle a compris les silences, derrière les silences mon corps aspire au silence, expire au silence, celui qui ouvre nos écoutilles et développe nos résonnements, mon corps n’est pas le bruit incessant, étourdissant, il est le gargouillis de nos organes, tambour chamanique les battements qui se répondent en une symphonie à la cacophonie ordonnée, mon corps chef d’orchestre à la battue imperceptible. Dans cette partition le silence ne serait pas le silence sans les accidents, les altérations, les contrepoints les rythmes saccadés, altérés, transgressions ; langage de nos douleurs, nos raideurs, nos spasmes. Mon corps, mon ami, bavard ou discret indifféremment, jamais indifférent jouissant à chaque instant d’une intuitive liaison. Un lien au monde, à l’autre, au monde de l’autre. Mon corps séparation inévitable, probable invitation à la douceur du contact, le toucher de nos mains prolongations de nos cœurs. J’ai mon corps dans la peau, une soierie glissante dévoilant le corps de l’autre, un pas de deux sorti du cadre, mon corps a ses raisons, il ne les raisonne pas. Mon corps ludique se forme et se transforme, agile il découvre, il tente, il teste, rassuré il ose, expérimente s’intéresse aux autre corps, effronté il se compare et se métamorphose, atteint la plénitude, s’offre en partage, il se succède, apaisé il offre de la place. Derrière le silence, pas de barreaux, mon corps libéré abrite des silences.
« J’ai mon corps dans la peau » — j’aime ce raccourci
Hypnotique. Le corps, le mot malaxé, la matière pétrie et ses silences. Belle expérience.
Comme Christophe j’ai flashé sur « j’ai mon corps dans la peau » et aussi sur cette exultation du corps si bien décrite, cette joie profonde, cet enthousiaste que porte ce texte à travers ce corps présenté. Merci, Raymonde. Bises