Je tombe
- comme la plume ses va-et-vient ses balancements ses oscillations dans le vent sa grâce sa légèreté en bascule finale posée au sol
- comme la feuille son décroché son arrachement à la branche son passage des saisons dans la soif brûlée asséchée nue
- comme la pierre lourde d’elle-même grise apesanteur rendue à la terre inerte mais solide encore
- comme la pluie de fine à drue ses hallebardes ses lames coupantes glaciales herbes hachées pétales déchiquetés ce qu’il en reste de la charpie
- comme la tête dure à l’endormissement mais endormie tout de même à l’arrière de la voiture son hochement qui n’en est pas un et sa retombée brutale qu’on dirait décapitée
- comme l’enfant son genou heurté sanguinolent ses pleurs que rien ne semble calmer pas même le bisou qui soigne mais un coup de mercurochrome un leurre une guérison immédiate pour de faux
- comme le cheval qui chute et c’est comme déchoir de son galop natal quand il se redresse avec peine sur ses jambes fébriles frêles si fines que l’on pense qu’il va chuter à nouveau
- comme l’ascenseur sa descente douce au départ 3ème sous-sol celui du parking sombre mais celui du film d’horreur lâché d’en haut d’une tour dont les câbles ont cédé que rien ne peut retenir que celui du secours celui de la prière
- comme l’oisillon qui s’écrase sa chute du nid alors qu’il pensait déjà savoir voler à qui sa mère avait appris ce qu’il faut pour battre des ailes se maintenir avancer dans la vie
- comme le couperet de la parole définitive refusant l’échappatoire sa fin de non recevoir tout aussi irrévocable que celui du silence imposé
- comme un cheveu sur la soupe même pas coupé en quatre mais trop long pour ne pas se sentir de trop pas à ma place unique cheveu sur un crâne glabre
- comme on tombe sur un os et parfois tout un squelette peut-être même le sien
J’aime beaucoup ces comme, même si je n’aime pas tomber. Merci Perle
Comme des mémoires d’outre-tombe revisitées, point noir en tête, todo liste de tâches à ne pas cocher comme effectuées, préférer procrastiner.