#techniques #02 | Le canal

Rameaux nus luisant dans l’eau. Miroitements du ciel entre les troncs. Paille de roseaux brisés hérissant la berge. De légers plumeaux courbés, se courbant encore. Une rambarde métallique fichée dans les pierres du rebord. Le corps se penche au-dessus de l’eau. Longue monotonie des reflets. Le canal s’étirant jusqu’au fin fond du regard. Chien noir sur le chemin de halage. Flairant les hautes herbes d’un côté, de l’autre. Une maison d’écluse aux volets bleus. Semblant inhabitée. Pourtant l’éclat d’une ampoule électrique filtrant dans l’interstice d’un volet. L’action de longer l’eau, longtemps. Fatiguant sa rêverie. Une passerelle d’acier résonnant sous les pieds. En face, la perspective de l’étroit chemin bordant l’autre rive du canal. Débris de feuilles sèches parmi les herbes. Un cri. Au travers des branchages emmêlés, les arches de pierre du pont-canal enjambant la Vingeanne. Un poteau électrique d’un autre temps, vieux bois et isolateurs de verre. Un autre cri, aigre. Lignes parallèles striant le ciel. Roseraie inattendue dorant l’hiver. Soudain un héron énorme, figeant la vue. Ébrouement d’ailes. Il se déplie et s’envole au ras de l’eau.

A propos de Muriel Boussarie

Je travaille sur un chantier d’écriture au long cours et j’espère avoir assez de souffle pour le mener à terme. L’intuition de ce projet a surgi ici, dans un atelier du Tiers Livre. Il était question de se perdre dans la ville. Comme je ne voulais pas suivre une piste trop autobiographique, j’ai délocalisé l’errance en la situant dans la ville de K., un avatar de Hong Kong qui m’avait tant fascinée. Alors un personnage, un homme, Tu, toujours interpellé, est immédiatement apparu dans une rue de K. où il s’était égaré. Malgré cette entrée en matière – très forte pour moi – je n’ai pas pensé au départ écrire une histoire, encore moins un livre. Mais je voulais écrire, rêver un univers, celui de K. Quelques textes ont ainsi vu le jour sur mon blog. Puis lors d’un nouvel atelier de François Bon, un fil d’histoire plus précis s’est ébauché : le départ de Tu et L. vers les îles pour fuir la dictature qui sévit à K. À ce moment-là s’est déclenché un grand désir de narration. Beaucoup de choses se sont précisées au fil de l’écriture, bien des personnages sont apparus… Et régulièrement j’utilise des consignes de l’atelier comme pistes pour développer mon récit.

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