Le sentiment de l’eau fraîche qu’on avale par petites gorgées inondant de son voile blanc jusqu’au plus profond de nos entrailles de ce feu de glace, le sentiment de retrouver une vieille connaissance dans cette eau neuve après en avoir tant perdu par évaporation de notre front accablé de chaleur et de nos muscles transis de douleurs pour s’être épuisés à la tâche dans la fournaise de notre condition, le sentiment de renaître de cette onde irradiant dans notre bouche dans notre gorge dans la tuyauterie jusque dans notre ventre et entraînant toutes les cellules de notre corps dans une folle sarabande fêtant la renaissance d’un instant consumé, des lumières aveuglantes embrasant le ciel d’une seule pression sur l’interrupteur pour blanchir de ses rayons le paysage de nos pensées réveillées vivantes et alertes et offrant à la vie de si riches couleurs, un coeur sonnant le réveil nous extrait de la turpitude dans un afflux de sang jusque dans les moindres recoins de notre être jusque dans l’extrémité de nos doigts jusque dans l’ombre de nos rêves revenus à la vie, un éclair aveuglant au beau milieu d’une nuit sans lune, une grande inspiration de toutes les cellules de notre corps, une étoile filante, une flèche fendant l’air, la tête en arrière je suis assis sur un pierre je garde la bouche ouverte et les yeux fermés je sens le vent me caresser le visage je sens ma main se perdre dans le ruisseau qu’une source sans fin nourrit, je m’abreuve et ma bouche déborde de richesses et mon esprit s’envole par nuées et mon corps s’abandonne par lambeaux dans l’apesanteur du nulle part, les restes lyophilisés de mon âme se transformant et le diable qui m’habite sourit à nouveau sur le pas de ma porte, le sentiment de l’eau fraîche et d’être en vie.
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