Te souviens-tu, mon amour ? Quand saoul, l’esprit songeur, nous entamions, le pas absent, l’aventure jusqu’à la maison, que nous ne voulions atteindre ? Nous marchions de fête en fête, seuls d’une nuit noire. Je me souviens, quand tu t’arrêtais, dévorée par la nuit, je devinais tes lèvres rose par la lumière idiote du mégot de ta cigarette. Nous n’avions d’allié que l’autre, la ville semblait contente de notre errance.
Te souviens-tu, mon amour ? Quand on préférait, rire enfin, quand le monde décidait ultimement de se taire ? Nous marchions propre sur les poussières du jour que la nuit s’emploie à balayer. Je me souviens, de tes yeux blancs de lune, que tes nécessaires paupières venait assurer de voir encore. Nous n’avions de peur que le soleil, qui on le savait, viendrait bruler les décadences de la nuit, garantes des lèvres absentes du jour. Nous n’avions d’allié que l’autre, les larges rues semblaient pleines de nos corps.
Te souviens-tu, mon amour ? Quand malgré nos efforts, quand malgré nos détours, nous arrivions à destination ? Nous rampions alors, devinant docilement le corps de l’autre, de la lumière superficielle de l’entrée de l’immeuble. Je me souviens, deviner ton corps calciné, sachant alors que nous pénétrions en notre enfer. Nous n’avions d’allié que l’autre, la ville semblait, déjà, nous abandonner aux portes de son royaume.
Parfois, je te retrouve, mon amour, dans le simulacre d’obscurité d’une chambre raisonnable, mais toujours je pleurerai, la malédiction qui est de ne trop te connaître.