#écopoétique #04 | Sous les pieds

Marcher dans la ville et ne pas voir. Ne pas voir ce qui est sous les pieds. Observer, décrire, se souvenir, lire Vivre en arsenic de Claire Dutrait et essayer de comprendre, lire la ville autrement.

Observer un immeuble tout récent, quatre étages, une vingtaine de logements, un plus pour cette ville, Bordeaux, où il est difficile de se loger. Se souvenir qu’à cet endroit, une parcelle coincée entre deux rues passantes, se tenait une station service. Démantelée la station, le sol dépollué, plusieurs années inoccupées et hop un jour, un immeuble de quatre étages, en un rien de temps habité.

Se souvenir qu’au temps de l’enfance, je foulais les terres des Ardennes et de la Meuse, terres de combat, terre de deux guerres mondiales. Inévitablement, quand on marche sur ses terres, on marche sur des os, des crânes, des corps déchiquetés. Qu’en reste-t-il dans la tête et le corps de ses marches de l’enfance ?

Réaliser que les monceaux de déchets, les pollutions cachées dans le sol, sont aujourd’hui réhabilités, transformés, offerts par les villes aux populations comme lieu de promenades. Le parc du Bourgailh à Pessac, un poumon vert de l’agglomération bordelaise, un espace naturel sensible, il participe à la coulée verte, on nous dit. Marcher dans ce lieu, respirer, monter dans les belvédères pour observer le paysage alentour, la forêt landaise. L’expérience a été toute différente, quand j’ai su que ce lieu accueillait à l’origine une gravière, puis une décharge privée, puis la décharge de l’agglomération bordelaise. Fermée. Recouverte. Aménagée pour devenir la colline du Bourgailh d’une hauteur de soixante-dix mètres, logée au sein de la plaine sportive de la forêt du Bourgailh.

Est-ce pour moins penser à ce qui est sous mes pieds que depuis plusieurs mois, pendant mes marches urbaines je photographie les nuages ?

A propos de Isabelle Vauquois

Vit à Mérignac, à deux pas de Bordeaux. Souvent sur les routes du Périgord dans des Sites aux paysages remarquables pour le travail. Depuis 2018, découvre l’écriture avec les ateliers de Claire Lecoeur. Première expérience Tiers livre en 2023 avec "le Grand carnet". Deuxième, cet atelier d'été 2024. Plus j'apprends à écrire, plus j'apprends à lire ! .

2 commentaires à propos de “#écopoétique #04 | Sous les pieds”

  1. Lire la ville autrement, marcher autrement, avoir conscience de cet arsenic. Que de questions dans ton texte auxquelles la sagesse des nuages saura peut-être apaiser les réponses. Merci beaucoup Isabelle. Très remuée par tes mots.

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