Ils ont racheté la boucherie de Quatrain, Nicole et Rosaire. Il est architecte d’intérieur et a présidé aux travaux de réfection. Elle a fait cacher le plafond à caissons. La grande baie vitrée sur la rue est restée. Ils ont leur chambre à la place de la chambre froide. Il est sept heures, ils se disputent dès le matin. L’enfant aux cheveux blonds regarde la télévision toujours allumée. Elle est du village. Quand la mère ou l’oncle passent dans la rue, ils toquent à la vitre. En voiture, ils klaxonnent.
Angèle est mariée avec Faust. Elle lui survit et meurt aux parages d’un siècle. Toutes ses dents sont encore là. Sa fille est morte. Son fils est avare. Sa fille est morte très jeune. Sa petite fille est folle, elle a hérité de l’appartement. Il est vide. Personne ne veut l’acheter. Les meubles sont partis. La cheminée est vide, c’est l’entrée des rats. Les pigeons se sont appropriés le balcon. Il reste un fauteuil. Il y a une planchette de bois fixée au mur sur lesquelles sont pendues des clés, une vitrine avec une bouteille de digestif. Je la vois encore elle, marcher à pas économes, insensible aux fracas du monde. Faust m’est invisible.
Dans son appartement au dernier étage, tout est propre et en ordre, d’un luxe médiocre. Blonde est avocate. Elle se photographie près de la porte, talons aiguilles, jupe courte, agenouillée près de son chien. Elle ne sourit pas, sa peau est tendue à rompre. Elle ne touche la rue que pour aller et venir à sa voiture, et promener le chien. Elle ne parle pas avec les indigènes.
Elle s’appelle Carmela. On ne lui connaît pas d’homme. Quand elle conduit, sa clope penche à quarante-cinq degrés mais est maintenue fermement en bouche. Son appartement, comme la rue est en pente est en contrebas de la rue. Elle époussette les portes fenêtres qui donnent sur la rue, comme toutes les semaines. L’intérieur de son appartement est d’un autre âge.
Il est entré furtivement. Elle a fait en sorte qu’il traverse la pièce rapidement : au mur, un cerf en bois sculpté, œuvre de son beau-père précédent, dont elle a honte. Devant la porte miroir, elle se dévêt lentement, libère ses seins lourds.
Son nom est Seth. L’appartement est au nom de sa fille. Il est arrivé depuis peu et d’ailleurs. Il y a beaucoup de vide dans les pièces. Il est accoudé au balcon. Il fume.
Dans l’escalier, la femme du dernier étage a été portée mourante. Son frère a repris l’appartement qui se poursuit dans l’immeuble adjacent au-dessous d’une grande terrasse. Il y vaque avant de descendre les escaliers puis remonter la rue pour aller au garage qu’il tient avec son frère sur la place. Il répare les voitures, le frère parle, va acheter les pièces de rechange et fume des cigarettes.
Petit César est rubicond. Il a une pièce grande et seule, reste d’un appartement divisé suite à une querelle d’héritage. Il est un de ceux ici qui possèdent. Quand il va à la messe, il est suivi d’un ou deux vieillards de son âge, déférents. On ne le voit jamais venir ici.
L’appartement étroit, une des quatre caves qui donnent sur la vallée, est rempli de matériel photographique. Piero sort dans le couloir humide et vouté qui se trouve sous la rue, il est rougeaud, la mine chiffonnée, il va prendre son café. Il passe ici en coup de vent avant de repartir en voyage.
Dans la cave suivante, sa fille.
Puis, personne : Karim emmène le soir avec lui un groupe de Noirs qui habitent près d’ici. Il les ramène au matin dans sa voiture. Il est encore tôt.
Le propriétaire de la dernière cave au bout du couloir ne se montre pas, je ne connais pas son nom, il possède une autre cave qui est exactement sous la rue.