J’ai vu, j’ai observé sans comprendre. Bruits, sons, paroles, phrases.
J’ai appris à faire du vélo devant la maison. J’ai fait du vélo dans les landes. J’ai fait du vélo dans Paris. J’ai suis allée de Saint-Jean de Luz à Bordeaux en vélo. Je ne sais plus faire de vélo.
J’ai vu, j’ai observé, j’ai entendu, j’ai imité. Paroles, phrases, questions. Mon monde grandit.
J’ai mangé à la maison le midi les jours d’école. J’ai mangé à la cantine. J’ai mangé dans la forêt. J’ai mangé dans un pré. J’ai mangé sur le bord d’une route. J’ai mangé au restaurant. J’ai mangé au bord de la mer. J’ai mangé au sommet d’une montagne.
J’ai dit mon nom, unique, jamais deux du même nom dans les classes, jusqu’à la fac. Mon monde s’ouvre. Regards curieux et insouciants.
J’ai vu, j’ai observé, j’ai entendu. J’ai appris. Questions posées. Questions sans réponse. Questions non-dites. Réponses fantasmées.
J’ai fumé devant mon collège. J’ai fumé dans les trains. J’ai fumé au bureau. J’ai fumé dans le métro. J’ai fumé au restaurant. J’ai fumé dans les avions. Je ne fume plus.
J’ai vécu en toute innocence pendant longtemps. J’ai aimé naturellement, comme on m’avait aimé, sans le dire.
J’ai eu des exclamations irréfléchies. J’ai dit ce qui me passait par la tête, sans réfléchir. J’ai choqué. J’ai amusé. J’ai surpris. Des phrases spontanées pas vraiment à propos. Je m’en suis voulue.
J’ai vu. Je suis restée figée, immobile. Incapable de la moindre action utile.
Je suis allée au cinéma. Je suis allée au théâtre. Je suis allée à l’opéra. J’ai applaudit. Je suis allée au musée. Je suis allée au cimetière. J’ai pleuré.
J’ai été enfant. J’ai tout oublié. J’ai fait comme j’ai pu, comme d’autres avant moi. Il n’y a pas de manuels pour expliquer la vie. On l’apprend au fur et à mesure. Quand on pourrait, on ne sait pas, puis quand on sait, on ne peut plus. Il est trop tard.
J’ai vu, j’ai observé, j’ai entendu. J’ai appris. Je me suis libérée. Par la pensée, par les mots, par les actes.
Je ne suis pas ce que j’aurais pu être. Je ne suis pas ce que j’aurais pu devenir. J’ai tenu d’autres promesses.
J’ai trouvé que le titre – c’est ce à quoi il me fait penser – croise à la fois « Veni, vidi, vici » de césar et « Je pense donc je suis » de Descartes. Il donne son orientation au texte qui progresse par expériences. merci.
C’est beau toutes ces actions déclinées, ce qui s’est fait, ne se fait plus, et j’aime beaucoup la fin, pas de regrets mais conscience d’avoir tenu d’autres promesses.
Un rythme que l’on a envie de suivre de bout en bout sans s’arrêter, en un souffle
La déclinaison des actions en reprises et boucles, scande le texte, lui donne une rythmique jusque la conclusion, fort.
Comme j’aime cette chute « J’ai tenu d’autres promesses » qui fait écho à « j’ai fait comme j’ai pu ». Le constat de la difficulté de répondre à un idéal (le sien, celui des autres) et pourtant cette lucidité d’avoir fait son chemin et d’en être fière… peut-être.
Là où j’ai fait du vélo, là où j’ai mangé, là où j’ai fumé, là je suis allée… ces inventaires qui s’invitent dans le texte. Un vrai bonheur.
Merci
oh le bel inventaire et le rythme
aimerais l’entendre dit ce texte
Les inventaires, l’antienne « j’ai vu, j’ai observé, j’ai entendu »… Beaucoup de rythmes dans ce texte qui nous attrape et nous entraîne. Comme l’existence. Merci Khedidja.