c’est au bar, place de Clichy, j’attends sans doute quelqu’un – il n’est pas trois heures, c’est l’après midi – « au bout du téléphone il y a votre voix » chantait l’asperge : ici au bout du boulevard il y a votre tombe – parfois je me dis que, probablement – ça dépend de qui, au fait ? – c’est ici (enfin là-bas) que reposeront mes restes – c’est d’un gai : seulement j’aime beaucoup les petites bulles (c’est de la lumière) qui s’échappent du rêve de l’homme qui dort à la terrasse – et le mot, sur son journal qui m’indique qu’en effet, nous y sommes : vieillard wepler
ils étaient tous dans la rue, six ou sept je ne sais plus – je ne l’ai plus jamais revu, c’était l’hiver, deux ou trois janvier, je devrais trouver regarder – je l’aimais beaucoup ce type-là, portait un costume clair sur une chemise foncée, un chapeau toujours, marchait difficilement habitait vivait au vingt-quatre – souriant toujours, des années (quatre, cinq peut-être) je le croisais on se saluait, un sourire, bonjour bonsoir rien d’autre – il ne parlait bien ma langue et moi la sienne non plus – il avait des pleurs à ses vieux yeux – j’aimais sans doute son âge, sa façon de se tenir seul au monde je supposais – un voisin : vieil indien 1
non mais ça ne fait rien – j’ai pris par la fin le dossier « améliorées » – c’est égal le v de vieux vient avant le j de jeune – c’est sans doute aussi (on s’en fout je sais bien) que le temps passe (on l’emmerde grâve puisqu’on vit) (il n’existe pas) – sur le quai de Loire, sûrement – je ne sais pas exactement le nom de ce quai, c’est le bord du bassin, je pourrais aller vérifier, derrière le cinéma pourri d’un collectionneur de photographies – il a laissé les rennes de l’entreprise à sa progéniture – laquelle a vendu les films de son catalogue à une plateforme comme on dit – on s’en fout aussi – passons : le type est là et regarde droit devant lui – c’est un Arménien, le bar s’appelle « Aux amis » – avant j’allais beaucoup au bar (j’y vais toujours mais je ne bois plus d’alcool – ce qui est un erreur mais rallonge le temps passé ici) – j’aime assez l’autre au fond sa manière d’éviter le poteau lampadaire – grains et zoom – peu importe aussi – auto-portrait – : vieil homme terrasse quai de Loire (27 août 10)
trop dans les bleus mais ça ne fait rien – rapproché – on revient de Murano ou de l’autre j’ai oublié, j’en sais rien, si ça se trouve elle est pas de moi – on revient il fait chaud – oui de moi c’est le cadrage et le rehaut (je voulais le blanc de l’oiseau – il y a quelque chose avec cette lagune, la même semblable que celle de Tunis parce que les gens, au début du siècle précédent partaient en vacances à la Marsa et emmenaient les meubles nécessaires, la carriole était traînée par des chevaux – on distingue peut-être le campanile de San Giorgio Maggiore au haut duquel je ne suis jamais monté (non plus que sur celui de Saint Marc duquel on découvrirait plein sud le lido, le lion d’or et la mostra créée par le fils à benito l’ignoble – ces histoires-là – l’eau, le soleil, les volatiles – à gauche San Michele : vaporetto oiseau (6 mai 10)
le moment où j’ai lu le livre dans la traduction de Margot (d’ailleurs elle ne traduisait pas, elle reflétait) – c’était où, déjà ? le voyage, l’aller simple – ou alors la petite MG de Y. l’Italie la Yougoslavie la Grèce la Turquie l’Iran le Pakistan fin des années quarante ils avaient vingt ans (L’usage du monde et ses dessins) – elle à ses côtés qui donnerait naissance à B. (en vrai F.) à Islamabad, Karachi ou Rawalpindi ou encore ailleurs – je ne sais plus mais au bord de l’océan peut-être bien – sûrement puisque ça l’évoque – prise pour la garder en souvenir, du phare aussi – en dédicace à CJ. qui bosse dessus – les beiges les grèges les pastels pour elle – : vagues
ces images qui viennent d'un dossier où je les conserve dans le disque dur externe qui sert d'archives (dont il faudrait que je me préoccupe un peu plus sérieusement) - lequel a survécu cependant miraculeusement - je les ai regardées puis en ai choisi une - puis une autre, dans le sens inverse du classement alphabétique imposé par la machine - en me souvenant du petit journal (je les posais alors pour les reprendre ensuite dans la série sur le bureau (je dois en être à soixante numéros - cinquante-huit - la série a changé depuis le journal - on s'en fout un peu - OSEFUP) ces images donc pervertissent sans doute la consigne (mais c'est inhérent au mode de la consigne d'atelier) - ces choses (me) travaillent mais enfin seront-elles dans le vif de la ville en quarante jours (tueurs, c'est pour Fuller; voleurs pour Ali Baba; jours et nuits pour le déluge (et la chanson magnifique du poète jazzy) - sont-ce illustrations ?) pas d'idée (en tout cas, durant le tournage du film "Le christ s'est arrêté à Eboli" (Francesco Rosi, 1978) ils étaient tous (et toutes) pendu.es au transistor pour connaitre le dénouement - s'il en serait - mais il en serait un, par malheur sans doute - de l'affaire qui m'occupe toujours et quand même (dans le livre Le dossier Rosi (Ramsay, Michel Ciment 86) note de bas de page 227 indiquant le faux communiqué 7 - dans le texte "On se sent alors dépassé. Mais la situation actuelle de l'Italie est tellement tragique que lorsque le matin on va au travail et que l'on commence à tourner le film, on se demande ce qu'on peut bien faire là. On parle de l'assassinat de Moro, des Brigades Rouges, on est presque au seuil d'une guerre civile et l'on dit "Moteur". On sent alors en soi une dissociation..." - quarante fois. Double zéro aussi comme qui tu sais. Donc.
Bien touchants ces portraits de vieux , ce rappel de la marsa et de l usage du monde. Mon père adorait le christ s est arrêté à Eboli, j y suis même allée pour voir ( il y a …longtemps) il faudrait que je le relise. Mais pourquoi l l’appelles-tu l asperge ?
@Danièle Godard-Livet : c’est son amoureux d’alors qui la nommait ainsi (je ne me permettrais pas) (jean-marie périer à propos de françoise hardy dans son livre de de « souvenirs »)
« Vieillard Wepler » souvent j’y allais avec elle et elle claquait des doigts pour héler le garçon et j’avais honte et pourtant elle n’était pas snob j’y allais j’y vais là-bas au Wepler de sept mes ans à avant hier ( pas encore 77ans) avant il y avait une « dame pipi » c’est comme ça qu’elle disait et : tu veux pas y aller ma chérie? j’y allais au Wepler et l’autre jour il y a trente ans en amour et le mois dernier avec ma mère et la tombe au bout du boulevard c’est dans le cimetière du pont courbe vers le Terrass Hotel ? ( Terrass Hotel terrassé comme mort?) il y a des morts que je connais là-bas… merc Piero ( Venise c’est quand même drôlement bien )
(oui c’est ça) (sous le pont bleu : moi aussi, presque tous les miens dis) (et pour Venise : il paraît que la maire (qui est une ordure affiliée à cette saloperie de salvini en fait payer l’entrée – y’a pas de petit profit – je boycotte – quelle pitié…) (merci à toi)
Une sorte de tour – du monde, tour d’un monde – un tour foisonnant et pourtant arrêté, bonne impression, comme du rêve,
merci d’avoir suivi – et content de te « voir » : bonne compagnie…
Quelles balades ! dans le monde : la vie : les livres…
les voyages, hein, Juliette… Merci à toi
suis passée, sans connaître la consigne parce que, définitivement, ai décidé de rester à coté des 40 jours (s’il y a un atelier ultérieur on verra, mais me sens de plus en plus « pas à ma place » parmi les talentueux jeunes ou moins jeunes) er donc si elle est un peu malmenée par vous ne saurais le dire ni y accorder de l’importance (suis très on s’en fout aussi en ce moment) après être passé lire le court et « chouette » texte d’Helena Barroso.
Amitié pour vos vieux (c’est curieux ne les cherche pas, vis avec des jeunes mais quand certains viennent encore j’échange avec eux de discrets sourires fraternels)
Leur dignité m’impressionne autant que les commentaires à votre texte, me suis contentée de ressentir e rêver un peu parfois
c’est vraiment gentil de passer (je réponds avec un léger retard (comme dirait Emmanuelle) mais mes remerciements quand même – et voici que les quarante sont passées…)
« je le croisais on se saluait, un sourire, bonjour bonsoir rien d’autre – il ne parlait bien ma langue et moi la sienne non plus – il avait des pleurs à ses vieux yeux – j’aimais sans doute son âge, sa façon de se tenir seul au monde je supposais – un voisin : vieil indien 1 »
magnifique portrait
merci à toi (cet homme-là tout humble et beige foncé de peau, je le revois avec son petit chapeau…) (bonne suite marseillaise…)
Avec un léger retard (!), je lis ton prologue. Bon, y’a déjà assez de gars, de lieux et de sujets pour tenir un siège, alors 40 jours (fastoche). Je vais y aller petit à petit. J’ai lu récemment Histoires de la nuit, pas de parenthèse, mais quelque chose qui m’a fait penser à ce que tu écris. Une façon de prendre le temps qu’il faut pour que le sucre fonde.
merci de passer – avec la perspective désormais fermée des 40, le prologue a quelque chose de léger et de très éloigné (pas tant que ça, avec le premier homme qui dort) – j’ai lu « histoires de la nuit » et il ne m’a pas plu (chacun.e fait ce qu’il peut et je suis contre la maladie mentale, notamment la paranoïa – ça ne l’empêche pas d’exister, je sais bien) – j’ai préféré son « Les hommes ») j’ai vu que tu prenais le bazar à peut-être rebours – j’ai vu aussi l’émergence ou la poursuite la suite le tour le détour le retour par quelque chose qui ressemblerait à l’Olonnes de Jean-Christophe Bailly j’ai pensé (j’ai beaucoup aimé ce livre) – j’ai du mal à suivre, notamment la parallèle que vous faites, toi et Will – mais je suis content de te voir par ici – à bientôt sûrement (et encore merci à toi)