Parquet lisse, trop lisse. Ça glisse. Trop. Il faut la colophane. Etaler en couches successives, là où ça glisse. Ne pas frotter, ne pas ramper, ne pas essuyer le surplus, garder une couche suffisante. Dessus les chaussons tiennent. Ils tiennent bon. Ils tiennent droit, debout les demi pointes, les pointes, bien enrubannées autour des chevilles. Le collant, dessous, amovibles, c’est plus facile. Peut-être les embouts de silicone. Ou en mousse. Ou les tubes pour les gros orteils (en silicone et élastique recouvert de tissu). Peut-être le sparadrap. C’est pour protéger. Avant elles mettaient des escalopes de poulet ou de veau, tu te rends compte ? Ou peut-être les pédilles pour un peu moins glisser encore, ou pieds nus juste si danse contemporaine ou jazz. Le pied accroche. C’est la corne formée dessous à force de danser. C’est la sueur qui colle au bois vernis, au plancher de la scène. Le pied. Le coup de pied, parfait bombé, cette courbe, la tension, la force, l’élan. Tu te vois au miroir, front dégagé et chignon net, bien tiré. Le justaucorps ajusté. Tu ne souris pas tu te concentres. La figure, l’enchaînement, l’entraînement. Adage, attitude, assemblé soutenu, pas de basque, pas de bourrée, brisé, grand battement, pas chassé, contretemps, déboulé, dégagé, demi-plié, dégagé, demi-plié, pirouette, piqué, jeté, fouetté, glissade. Travailler son écart, son en-dehors, sa position, son port de bras, épaules tirées, dos droit, et tirer sur les pointes et garder sa couronne. Répétition de la variation, du pas de deux, On dit déchiffrer puis répéter encore et encore, jusqu’à la blessure. Enfin juste avant. A la limite. Ce sont les endorphines qui font tenir. L’ivresse de la danse. Ça tourne, ça tourne, ça tourne la tête. Et l’envolée quand tu t’élèves bien au-dessus du sol, de toi, du public.