Tu sais quoi ? Je vais partir à la guerre – je vais partir au revoir ma belle
je vais partir et mourir alors il faudra me mettre en terre – me mettre en terre ici, quelque part
Et sur cette terre, sur cette terre où tu m’auras enterré poussera une fleur
Une fleur
au revoir ma belle au revoir au revoir
Et plus tard les gens diront en la voyant c’est la fleur du partisan
celui qui est parti mourir pour la liberté
ou bien
regarde bien petit, regarde bien sur la plaine là-bas
il y a un homme qui vient que je ne connais pas
la liberté ou la mort – ils et elles étaient vingt et cent, elles étaient des milliers
des chansons comme s’il en pleuvait, des centaines et des milliers de paroles
l’image montre un visage, c’est une femme brune qui chante certainement – elle chante oui – cette chanson bella ciao aujourd’hui même, en italien – aujourd’hui rien ne change tout se transforme – c’est une chanson d’Italie qu’elle chante traduite dans sa langue magnifique, en persan – elle chante une femme, jeune et brune, des lunettes, un peu décadrée, un pull noir légèrement échancré, les épaules couvertes, derrière elle un morceau d’armoire coin carré, un mur dans les gris – l’esthétique de la prise de vue au portable, ces trucs qui bordent, blancs, cette image-là prise en appuyant sur le bouton impécr syst – le monde du jour, contemporain : l’image est arrêtée mais le son continue, la chanson, le monde continue, mercredi dernier (non, vendredi 16 de ce mois : il y a dix jours) il me semble, elle se nommait Mahsa Amini, avait-elle seulement vécu vingt-deux ans ? elle a été battue à mort parce que ses cheveux dépassaient de son foulard – on recadre, sur la droite en colonne les autres propositions du robot dont une, la même chanson, chantée par un crooner (j’aime bien crooner – prononcer crouneur – Frank Sinatra ou Nat King Cole ?) Non, français d’origine italienne, Ivo qui chante, d’autres chanteurs – un nombre de vues dit-on (qui compte ? Un robot ?) une date une espèce de pouce levé de pouce baissé comme à Rome il y a deux mille ans – deux mille ans de cette ère – oui laquelle oui – rien ne change tout se transforme, elle chante, nous sommes ses frères (en Italie le nom de ce parti qui vient de remporter les élections, Fratelli d’Italia aujourd’hui même) – ces temps-ci je ne sais pas vous comme on dit mais moi je me souviens des bonzes qui s’immolaient par le feu et cette odeur-là, cette puanteur… – les jeunes gens qu’on enferment et qu’on envoie à la guerre, à la frontière de la Turquie à la Syrie – ces temps-ci, ces chansons parfois, ailleurs aussi, un peu partout ? La Suède ? Des questions, des chansons – chante, petit chante – et regarde bien, sur la plaine, là-bas, un homme
ce n'est pas le lieu ? c'est égal - on a à crier (nous avons fait des enfants, des filles par exemple, et on se tairait ? je ne crois pas) et sans doute à chanter - après poser l'image, pourquoi faire ? Mais oui, quand même
Oui Piero oui je regarde et j’écoute. Merci de faire voir et entendre plus fort. De chanter c’est le lieu
merci d’être là Nathalie
oh oui, on a à crier et à chanter aussi ! Merci Piero
merci à vous Muriel
Partout c’est le lieu
Sans cesse, c’est le lieu
Toujours, c’est le lieu
Chanter oui, mais pas que
Relire nos histoires, comprendre le présent, empêcher le pire
Merci Piero
merci à toi – oui empêcher, crier peut-être (hier, en ville, ici et ailleurs, des gaz lacrymogènes comme réponse et sinon du pouvoir, rien d’autre…)
Merci Piero pour ta belle révolte communicative !
Puissance infinie de la chanson…
merci à toi, Fil – il y a de quoi être révolté (quelle honte…)
C’est le lieu, le moment, car les secondes passent et les regards deviennent lâches. On fait quoi, comment, on dirait que nous sommes menottés alors qu’il suffirait d´être tous ensemble dans ce chant sans faiblir jamais. Merci Piero !
merci à toi Helena – oui s’unir, et ne rien lâcher…
Mille mercis pour ce texte, cette chanson, cet air, ces paroles de révolte.
Merci Piero pour ces mots qui regardent au fond de nous. Merci pour cette question qui nous fait hurler la même réponse : oui, c’est le lieu. C’est partout le lieu. Merci Piero.
oui j’ai l’impression que c’est aussi le lieu – et tant mieux – merci à toi Jean-luc
Bravo Piero. Ta plume chante bien les temps tristes qui portent la révolte en eux.
trop gentille Danièle, merci à toi
non les fratelli n’ont pas droit à belle ciao ! – je décide
mais elle oui
ce retournement de sens est bien dans l’ordre des fascistes – restons vigilants – et merci à vous Brigitte (je corrige, et j’ôte le 2ème)
merci à vous Betty
Frissons…
sans doute oui, mais se battre (merci à toi)
pareil oui pareil. bien sûr c’est le lieu c’est aussi la colère et la honte immense – le minable de l’abrutissement ordinaire – pas un mot sur les manifestations à lacrymos, rien, pas un mot sur la fureur et le désespoir de vivre femme/homme respecté.e.s et libres. Rien.
c’est notre monde – le type a été élu (hitler aussi, si on va par là – se battre et résister) merci à toi
le courage, l’audace de l’écrit et des fraternités qu’il fait éclore ou souligne. Bien avec toi Piero dans ces évocations.
Je me souviens d’avoir écouté Bela Ciao interprétée par Giovana Marini en Avignon il y a un grand nombre d’années et d’en avoir pleuré.
cette chanson est une merveille (au même titre que “Gracias a la vida”) (Violeta Parra, Colette Magny ou Joan Baez et Mercedes Sosa – que des femmes tu remarqueras) merci à toi
Rétroliens : Femmes – maison[s]témoin
Merci, Piero, pour ce texte, cette chanson, pour tes mots portant fort notre révolte.
merci Anne
C’est magnifique ou plutôt, bouleversant. J’ai saisi au vol « le monde du jour, contemporain : l’image est arrêtée mais le son continue, »
Merci ! Et força pour tenir dans son cadre la photofiction qui nous entoure.
merci à toi Nolwenn
Rappeler toujours, semer dans chaque lettre chaque visage l’effort du dire du brandir du cri du chanté, rien ne sera oublié, ni les Quatre-vingt douze résistants, morts pour avoir chanté la femme tombée sous les coups
Je vous lis et entends les chants sous vos larmes
merci à vous Françoise