Il est des photos de l’atlas des régions naturelles qui déclenchent chez moi une profonde émotion. Il y a souvent du brouillard et de la neige fondante, un peu sale et mouillée. Tout le contraire des plages paradisiaques en plein soleil ou des champs de neige immaculée. J’imagine que je sais pourquoi : je suis née en janvier dans un hameau de moyenne montagne qui devait baigner dans cette ambiance. Pas si loin du col du Béal.
Peut-être dérogent-elles au style documentaire strict ? Peut-être ne parlent-elles qu’à quelques uns ? Elles font partie des choses vues, elles renvoient à des histoires, il s’en dégage une mélancolie certaine.
Cet alambic me parle de la campagne dans laquelle j’ai grandi, du privilège des bouilleurs de cru qui remonte à Napoléon et dont il n’est pas possible de se défaire dans cette bonne France rurale, malgré tous les essais du parlement depuis 1960. Un nouvel amendement voté au Sénat proroge le droit sur les 10 premiers litres jusqu’au 31 décembre 2010. La Loi 2011-1977 du 28 décembre 2011 « proroge » le bénéfice des 1 000 degrés jusqu’au décès du titulaire (ou de son conjoint). Ce modeste outil de travail itinérant, installé sur un faux plat, cet abri de fortune dans une vieille caravane,la petite table et les verres où l’on goutte la goutte, ces bonbonnes, ces dame-jeanne revêtues de plastique, tout parle de misère sociale. Et pourtant, on se rassemble, on discute, dans le froid et l’humide. Rien à voir avec les stations où l’on skie.
Il en est d’autres, plus sereines et esthétiques, mais toujours cet horizon bouché et cette neige qui fond sur le blé qui pousse ou la route qui gèlera la nuit. Eric Tabuchi et Nelly Monnier sont en pays de neige, l’autre pays de mon enfance et j’attends leurs photos avec impatience.
PS: 2019, printemps, signalisation,Livradois
PS : 2020n ensemble, scène, viticulture, Chablais
J'ai beaucoup écrit sur les photos d'Eric Tabuchi et Nelly Monnier. Je les ai suivis, j'ai cherché les endroits où ils étaient passés, j'ai parfois corrigé certaines légendes. Je pourrais même dire que ces phhotos m'ont permis de redécouvrir des pans entiers de mon enfance ou des vacances familiales (parfois totalement oubliées). Pour la campagnarde que je suis ce sont des moteurs à histoire formidables. Je les lis désormais en parallèle de "la France sous nos yeux-économie, paysages, nouveaux modes de vie" de Jérôme Fourquet et Jean Laurent Cassely : elles parlent de la France dont on ne parle pas et à ce titre me touchent infiniment.
merci Danièle, parfait pour l’ouverture du futur livre… mais j’aimerais vraiment que les textes qu’on va rassembler ne soient pas «vers» eux ou une instance de métatexte par rapport à l’Atlas, qu’on soit vraiment dans une liberté d’action par rapport à leurs photographies, qu’on tente vraiment le jeu de la fiction ! (ceci dit pour celles et ceux qui vont venir à leur tour !)
restent l’évocation de l’ambiance d’hiver; l’alambic, les gens qui se tiennent autour, leurs tenues et la caravane
Si on coupe le début…c’est ce que tu conseilles ?
J’ai découvert sur ton blog que tu suivais depuis longtemps l’atlas des régions naturelles, que je ne découvre que par cette proposition. J’aime la neige de ce col, comme le potager que tu décris ici :
https://www.lesmotsjustes.org/post/le-premier-vrai-potager-de-l-atlas-des-r%C3%A9gions-naturelles
Merci Laure. Oui l’ARN m’a fait beaucoup écrire, une vraie mine de souvenirs.