il est tard ; je reste penchée à la fenêtre dans un coin du salon ; je pense toujours à Rome ; à mon retour prochain dans la capitale ; certains bruits de musiques pop s’échappent des bars chinois ; je regarde en bas puis me retourne ; j’attends toujours mon ami peintre ; qui me livrera notre conversation rédigée autour de sa pratique de la peinture ; que j’enverrai à la revue pour laquelle je travaille ; je l’aperçois alors vaguement distraite sans bouger ; il franchit doucement le seuil de la porte ;
il dit dans un bruit lointain (tu n’auras rien à faire d’autre que de t’assoir à la table et à regarder l’objectif ) ; (je prendrai plusieurs photos dont une seule peut-être me servira à faire un portrait peint de toi) ; il rajoute (tu es dans ta maison silencieuse à la table où tu écris) ; (cette table lourde de bois clair du salon éclairée par une faible lumière et derrière elle les hauts de rangement en fin plaqué de bois blanc d’une cuisine rudimentaire servent de décor) ; (déjà je sens que le clair-obscur présent -c’est le soir- m entrainera ensuite chez moi dans la matière travaillée ou casuelle des pigments) ; (de toi je ne garderai que quelques traces) ; (qui iront sous mon pinceau -je le sais par avance- vers une absence (un déficit ?) aussi bien qu’un excès (une stratification) de la figure comme dans une dissolution et une hallucination) ; (cette image simple dans ta cuisine) ; (semblable au portrait de la Muette de Raphaël elle sur fond noir (aussi lisse et limpide qu’elle est en fait le résultat d’une suite de modifications ayant pu être détectées au rayon X ) ; (cette image statique qui fait exploser l’espace soudain) ; (d’une matière invisible à la fois précédente et à venir ( le vrai visage/la toile sur le bout de la langue)) ; (tu n’es pas responsable de ce maintien, de cet appartement) ; (tu t’abandonnes au décor familier à moi qui te connais bien) ; (tu dis des choses que tu n’as jamais dites ?) ; (tu penses éviter de les dire ?) ;
dans ma distraction je suis alors surprise dans la nuit qui commence par des bruits de jeux vidéo en bas dans la rue ; des bruits blancs anonymes de synthétiseurs ; ils semblent peupler l’espace ;
C’est très beau, finesse de ces strates successives (passé-présent, photo-peinture…), distance et intimité. J’ai été surprise par la fin (comme brusquement tirée d’un rêve)
Alors nous avons èté deux à rever….Merci beaucoup Muriel pour votre commentaire!….A bientot!…
On se laisse aller aux mots de cette « distraction » insolite terriblement envoûtante… Une ambiance particulière qu’il me semble avoir déjà ressentie dans un autre de tes textes. Merci Sandrine
Merci beaucoup à toi Marie!…