#photofictions 02 | des images

Local – pas plus de deux ou trois stations de métro (parcourir à pied – mais non, nous n’étions plus là, la première image est datée du dix sept mars mais les photos de l’époque ont disparu) – n’avoir rien à l’esprit que ce quelque chose qu’on a à faire – chercher le courrier, marcher pour le plaisir, aller louer un disque ou un livre – descendre cet escalier et admirer la maison bleue du 4 du passage, prendre à gauche l’arbre fait face à la vitrine – continuer descendre encore – je préférerai m’arrêter un peu, ne plus croiser ces gens, toujours dissemblables mais portant tous les mêmes habits, ne plus avoir à les identifier (je ne cherche pas, les choses arrivent non pas dans je ne sais quelle illumination mais simplement par la force de la marche de l’avancée des choses et des êtres – ils sont tous là, ils sont venus, ils ont entendu ce cri – il se peut que tout se résolve par des chansons) – justement sur cette image-là, musique et fumée – son et lumière – pourquoi la poser là ? C’est une énigme mais il y a toujours un certain protocole, ouvrir tel dossier (plutôt dans le dur) sauvegarde ok puis Docs P puis photos puis photos améliorées – recherche vaine – regarder dans l’onglet « journal de l’Air Nu » l’épisode un « pour mémoire » – lire les métadonnées qui indiquent « beaubourg zéro trois zéro six dis-sept » sortie de plwe se reporter à cette date – introuvable – mais l’image est là quand même, elle sort, c’était à la nuit, il y avait un monde fou, il y avait des fumigènes du bruit des gens un peu partout le parvis la piazza de la grande maison (les choses qui affleurent ce sont les empoignades de soixante dix-sept pour l’inauguration par crâne d’œuf (je neveux pas qualifier l’olibrius), le tournage de « Touche pas à la femme blanche », la production (Rassam) et la réalisation (Ferreri) – à savoir que Chiara avait deux ans – ces années-là et cette espèce de bruits de sons de musiques environnée de fumées – on est partis et on a ri – un doux moment

comme il y a quatre-vingts étapes/jours de ce voyage durant cet épisode contemporain où l’humanité s’est humiliée, ce qu’elle fait encore et toujours (le programme Artémis, le programme origine bleue (ce nom, cette horreur, cette planète) Apollo Gemini Mir et autres envolées lyriques vers d’autres attractions (le mot est juste) que la terrestre tandis qu’ici même, on meurt de ne pas avoir à boire et à manger sans compter le toit…) ces jours-là où les vieilles gens moururent seules, « comme les pauvres et les chiens » disait le poète, comme il y a quelques illustrations posées un peu à l’emporte-pièce, à la va-vite parce qu’on avait autre chose à penser, un atelier, des factures, un texte pour qui le veut le demande en parle, des choses à lire et le reste des objets, des obligations (ménages et courses et besoins et aménagements, sports et marches, et encore voir lire marcher regarder) je ne choisis rien, j’essaye juste de comprendre – regarde l’inanité de nous-mêmes et de notre condition : nous avions la possibilité de trouver, par la magie de cette informatique majestueuse, l’exacte tracé du cercle du kilomètre de rayon autour de notre lieu de résidence : ainsi n’avions nous pas à nous aventurer en dehors sous peine d’amende, t’en souvient-il ? Était-ce galéjade ? Une vaste blague ? Tu te souviens, oui – je préfère écouter des chansons (bande son ici : Claude Léveillée Frédéric)

la plage en hiver
la mer Adriatique, le matin
ça part dans tous les sens mais c'est bien, c'est le début - on commence - on n'a pas à adopter de rituel quelconque, mais l'épisode de l'emprisonnement des mois de mars-avril-mai vingt m'a particulièrement blessé - il se peut que le journal ait eu une influence bénéfique, quelque chose qui rapprochait les êtres qu'on ne connaissait que peu - la bande-son et les images du robot (ici, Senigallia) comme au protocole un bis - il se peut que cette relecture n'ait aucun effet : des images, des illustrations simplement, sans autre forme de procès - je crois me souvenir que plus passe le temps, plus les épisodes de publiés sont nombreux - jte dirai - il se peut que ça bifurque, j'ai pas mal d'ami.es photographes avec qui je parle de cette pratique, cette illusion tout autant réelle et tenue - ténue oui un instant juste et juste un instant (j'aime ça, parler avec eux) - ils (et elles soyons justes) sont aveuglé.es par ce passage au réel - je me souviens (ce n'est pas le lieu, je sais bien, mais tant pis) du moment où la photo que je tiens dans mon portefeuille (une poche de cet objet, une diapositive) a été prise - cette image, je suis sur mes coudes, plutôt allongé, je porte ce pull vert en coton signé de quelqu'un (Hechter ?) acheté dans la braderie de Reuilly-Diderot (elle n'existe plus),je me souviens, les torsades, face au canal et Jane est là, on parle, elle déclenche, on rit et on s'amuse - il y a trente ans d'ici


en entrée : le 4 du passage avec deux indigènes probablement  

A propos de Piero Cohen-Hadria

(c'est plus facile avec les liens) la bio ça peut-être là : https://www.tierslivre.net/revue/spip.php?article625#nb10 et le site plutôt là : https://www.pendantleweekend.net/ les (*) réfèrent à des entrées (ou étiquettes) du blog pendant le week-end

11 commentaires à propos de “#photofictions 02 | des images”

  1. moi je garde pour viatique cette phrase « les choses arrivent non pas dans je ne sais quelle illumination mais simplement par la force de la marche de l’avancée des choses et des êtres »

  2. Je ne voudrais pas copier sur Brigitte (je ne cherche pas, les choses arrivent non pas dans je ne sais quelle illumination mais simplement par la force de la marche de l’avancée des choses et des êtres …) cette phrase ce matin elle me plait, demain matin elle me plaira aussi et me donne l’envie d’y aller de ce pas…
    (« je me fous du monde entier quand Frédérique  » alors je découvre … )

    • (une belle (triste) chanson – mais c’est Frédéric – et le »pendant que maman nous servait » a quelque chose de genré hein :j’adore ça)(merci à toi) (bonne marche -comme à Brigitte…!)

  3. merci Piero pour ton texte, la balade, le ciel au dessus de la plage
    et je découvre Claude Léveillée Frédéric, merci

  4. je ne sais pas où ça va, j’entends le cri, je marche, je ne sais plus où est la « consigne », la « contrainte », le cadre, l’avancée inéluctable des choses chez toi, dans le vent qui souffle chez toi
    mais je me retrouve dans le texte encadré, et il se pourrait bien que ça bifurque…

    • écoute Françoise on va voir – pour la consigne contrainte ou autre rituel passage obligation nécessité je m’y perds un peu – on verra (merci à toi quand même) je sais qu’il y a (et qu’il y aura) de la pratique, de la photo en sous-texte, du texte et puis pour le reste… :°))

  5. depuis les rectangles photo et l’enfermement ça déborde. Je prends le large. Malgré les saloperies usuelles du temps des attractions lointaines le souffle un temps suspendu, revient. Ce texte me fait arpenter (comme chaussé des bottes de 7 lieues (x) de grands pans du monde et ça, j’adore.