Entrer dans le cinéma grotte labyrinthe sombre et avancer à tâtons comme dans un jeu vidéo, en cartographiant l’espace à mesure qu’on l’explore de nos pas. Section arcade et autos-tamponneuses sur tapis carpette aux motifs hypnotiques. Corridor balisé : les salles 15-16-17-18. Se diriger vers le numéro inscrit sur le bout de papier carré. Gradins débouchent sur écran blanc. Ouvrir l’œil.
Nouveau wagon aquarium file tandis que les lumières blanches et bleues défilent dans le tunnel. « Prochaine station Jarry ». Toujours la même voix repère, mais les bancs n’ont plus la même configuration, les cartes sont plus petites et intégrées à des panneaux publicitaires interactifs, les barres au plafond sont trop hautes et chacun s’accrochent sur la pointe des pieds, des signaux lumineux nous préparent à l’ouverture et à la fermeture des portes. Chacun son thermos canicule à la main. Mobiles 5, livres 4.
Sortir au métro Berri-UQAM, édifices reliés entre eux par des corridors souterrains. Mathilde [7 ans] me demande si mon école est dans le métro, puisque nous circulons d’un lieu à l’autre sans jamais passer par l’extérieur. Le sous-sol seul et même lieu sans frontières sans délimitations sans seuil comme l’océan. Et pourtant, il y a les portes tournantes il y a l’accès par passages obliques il y a les portes vitrées lourdes et les démarcations des revêtements de sols il y a l’entrée du dedans vers le dedans il y a les derviches chercheurs et les espaces sans fenêtres.
La rue en espace déménagement. Briser la linéarité et le plat des trottoirs par des monticules amoncellements d’objets pour dépotoirs fragments de vie au rebut Everest de la vidange : lit, téléviseurs multiples éventrés, table basse à café froid, chats abandonnés, tapis avec un dessin de chien, oreillers de plumes au vent, jeu de cartes éparpillées, vaisselle en trop, lampe étêtée, parapluie aux broches croches, petits électro silencieux, parasols commandités, livres fermés, ordures déménagères diverses. Un homme avec une hache défait les meubles en morceaux en criant : « vous sentez-vous plus légers? » RESET.
La ruelle comme ultime long tunnel végétal avec de la lumière partout d’un bout à l’autre. Avant les cours n’étaient pas clôturées ou si peu, avec du frost, des mailles si grandes que tout passait au travers, y compris les rires, les odeurs de barbecue et les bruits de cordes à linge. On circulait dans un espace vert et ouvert. De plus en plus, les gens construisent de grandes palissades en bois ou en métal, ce qui accentue l’effet tunnel, mais coupe l’horizon et limite l’impression de cohabitation. Chacun caché dans sa boite. Mon œil sur le trou de la serrure : « Je te vois! »
Une continuité qui se déploie agréablement. Du virtuel au réel où habitons nous. Le temps et l’espace qui évoluent. Il faudrait que je reprenne la lecture pour bien m’en imprégner.
« Virtuel » et « réel » tellement liés, tricotés… merci pour la lecture 🙂
Merci pour le passage piéton et la vidéo.