Parti pris de la mettre elle et pas il dehors elle dehors de l’autre côté face à la fenêtre et à travers elle ce sera le dedans raconté ou imaginé ou occulté. Se laisser aller à la suivre elle inconsciemment ramenée à son obsession des murs avec pour seule interruption dans eux des grilles. Poursuivre. Elle regarde de loin de l’extérieur par-delà le rideau du dedans accroché à une tringle souple et le tissu pas tendu mais froncé pour donner épaisseur là où le voilage de trop de transparence échouerait à rejeter le regard indiscret à le laisser cogner au carreau sans espoir de dedans. L’intérieur en vase clos peut continuer. Elle est clouée au lit et le rideau fait son office. Si la main l’écartait ce serait pour cour pavée en pente glissante jusqu’à la grille et de part et d’autre lierre rampant rampant. A cause du rideau l’extérieur reste dehors ne peut pénétrer que par les sons ceux qui diffèrent de sa chambre à elle en ville ici en visite les cloches de l’église toute proche qui n’en finissent pas d’appeler ses fidèles et le chant du coq et rien à faire qu’à les écouter en attendant que les autres s’éveillent. Sur la photo de l’agence immobilière la fenêtre en haut au-dessus du garage comme une fenêtre de chambre à coucher a le même voilage. Trompeuse on pourrait dire. Elle sait elle ce qu’il y a derrière, ce que la photo et le rideau cachent. C’est sûrement ce qu’ils rénoveront en premier les gens qui vont acheter. Elle a le corps légèrement plié en deux en accent circonflexe et tous les autres restés en bas sur les pelouses et elle là-haut visage collé au carreau les deux mains doigts serrés posées autour des yeux pour éviter les reflets quand on est décidé à voir à l’intérieur. Les carreaux cassés qui jonchent la terrasse à l’arrière en surplomb du parc ne l’ont pas dissuadée. Et elle envie cette femme en robe d’été jaune d’avoir osé. Aller jusque là elle n’avait pas eu l’audace. Elle d’abord visière du casque intégral entrouverte elle hume autant qu’aspirent ses yeux et c’est comme si le monde passait à une dimension n+1. Ce trajet à moto puis l’engin garé à côté de la grille ouverte la grille ouverte à cause de l’événement la commémoration 75 ans ce n’est pas rien Jullouville Normandie. Car jusque là elle toujours dehors au-delà du haut mur de granite qui enferme ce domaine géant et reclus qu’est la colonie de St Ouen. Mais l’ancien pavillon de chasse qu’est le château de la Mare a été construit en 1909 pour être vu et lui contrairement aux bâtiments derrière ne se laisse gommer par aucun mur si haut qu’il soit. La mérule vous croyez c’est ce qui se dit qui explique l’abandon la mérule dans le château ou dans les anciens bâtiments des colonies et chacun parle et a son idée là-dessus et tous ces bâtiments et ce parc abandonnés c’est dommage et c’est tristesse. Les cordons en plastique rouges et blancs pour qu’on n’approche pas et la longueur des bâtiments comme un arc de cercle et ça n’en finit pas et les façades de ces hébergements d’enfants tout l’été avec une succession de fenêtres gigantesques à répétitions, des tas de croisillons, petits carrés au blanc écaillé et entre les parois vitrées des fresques carrées peinture sur béton où des mouettes démesurées alternent avec des vagues dont le mouvement se prolonge d’un bloc à l’autre. Elle voudrait comme la dame en jaune braver les cordons de sécurité et mettre ses mains autour des yeux pour percer à jour la réalité de l’intérieur. Elle peste contre ces rubans rouges et blancs mal tendus qui nonchalamment lui refusent l’accès et contre lesquels en ressac vient taper son obsession des maisons et de leur abandon. Voir le dedans de chez les autres. Elle entend le chant d’un oiseau et elle pense au coucou. C’est sa première baie vitrée dans toutes les maisons qu’elle a habitées. Ça coulisse et il n’y a plus de frontière entre dedans et dehors et c’est la promesse de l’ouvert et c’est bonheur et c’est magie comme un rêve qui se réalise. Une étoile sur le front qui met des semaines à cicatriser c’est ce qu’il lui reste d’une confrontation avec la dureté d’une baie vitrée fermée en réalité.
Alors évidement très intriguée par l’etiquette, passant août à Edenville (lieu-dit à la sortie de Jullouville vers Carolles où j’ai aussi passé mon enfance). La mérule redoutable par ici …
Etrange en effet. On pourrait se croiser alors.
Ce début comme un écho. Beau texte.
Un écho qui montre la voie et permet le passage. Merci, Sébastien pour ce commentaire et aussi de m’avoir lue.
intrigante photo et cette mérule encore plus étrange !
J’ai aimé aussi votre texte, j’avais d’abord découvert la présentation de vous même ce regard distancié et drôle sur soi même, même âge et votre blog que je suis allée regarder là aussi texte sur l’attente de la dédicace qui m’a presque donné l’envie de lire le livre de Hollande très éloigné de mes lectures habituelles mais si je le trouve à la bibliothèque j’ai bon espoir ! merci pour votre commentaire sur mon texte l’aqua’ré’elle et à bientôt pour la suite..
Merci, Caroline, de toutes ces gentilles choses et merci d’avoir lu mon texte. Hollande, il faut que je m’y mette !
J’aime moi aussi les murs et les maisons abandonnées. Jaime les photographier. Ils ont toujours beaucoup à dire.
Merci pour toutes ces fenêtres… y compris la visière !
Vous avez un super blog très riche, j’y retournerai. Merci de votre lecture. J’espère trouver vos photos.
honte d’avoir mis longtemps à revenir y voir ce qu »il y avait derrière ce nom
et oui le début… et oui l’histoire qui se devine
et puis le sourire final , familier
Merci, Brigitte, de ce retour. 🙂 On ne peut pas tout lire…