Je suis reparti derrière lui au pas de course, traversant sans les voir de grands espaces de verre et de métal où flottait une impression de netteté en regard de quoi la notion de propreté semblait décalée, anachronique, dépassée irrévocablement par celle d’asepsie. […] Au béton de l’aéroport a succédé rapidement celui de la route et de ce qui la bordait, des réservoirs de pétrole, ai-je supposé, des bâtiments à vocation industrielle, peu de campagne au sens strict, entraperçue dans les interstices de murs antibruit, et au-dessus de la route, bientôt, comme le temps s’avançait, dont j’éprouvais le passage, d’autres routes, sous quoi nous plongions comme dans un tunnel, et qui s’égaillaient plus tard dans les airs, tels des serpentins privés de poids. Le revêtement de la route lui-même achevait de brouiller mes repères, où s’inscrivaient régulièrement de vastes logogrammes précédés d’une flèche indiquant des directions privées de cohérence, glissant à la surface du bitume telles des effilochures. […] Je guettais prioritairement des toits aux pans incurvés et ne croisais que des choses prioritairement cubiques qui parfois se côtoyaient, puis plus du tout, puis de nouveau davantage […] l’habitat s’est élevé, dressé, couvert d’indications clignotantes, d’enseignes, de panneaux, dans un embarras de vives couleurs adverses, comme si la ville, car indéniablement c’était elle, s’écrivait en tous sens, sollicitant prioritairement la lecture […]. […] je devinais que s’élevaient des tours, certaines déjà effilées à la base, d’autres absolument rondes, d’autres encore carrées et dont la façade rappelaient moins des immeubles de bureaux que des cartes mères dressées sur le sol […]. […] C’était vaste, c’était circulaire, c’était haut de plafond, ça ressemblait à une gare. […] c’était l’éclairage, peut-être, des néons à basse intensité qui baignaient tout dans une ambiance d’aquarium |…] Editions de l’Olivier, 2017, Points P4793, 2018, pp. 83-89
Une découverte ! Merci pour le partage. :-))