C’est tout un mur. Un fond type bois ébène, foncé, légèrement poussiéreux. Et de là, tout s’organise à hauteur des yeux. D’abord les premiers, les plus vieux, ceux qu’on garde de coté parce qu’on ne pourra jamais s’en passer : c’est Poirot, c’est Marple, c’est une jeune femme aimant danser, c’est un dernier acte, c’est un meurtre parfait. Ensuite, c’est vertical, c’est blanc, c’est poche, c’est Racine, c’est Rimbaud, c’est Hugo.. C’est tout un monde de classiques, de fierté, de lectures validées. En résumé c’est la beauté d’un Shakespeare à coté d’un Hemingway. Puis, Il y a l’horizontal : c’est un autre temps, c’est une autre histoire. La couverture est blanche mais le livre est noir : C’est Dicker, c’est Minier, c’est Chattam.. Ce sont les grands formats, les amis de l’âme du mal, d’Harry Quebert et de Martin Servaz. Ces rangées prennent une place disproportionnée mais en même temps… le principe c’est d’aimer. Enfin, c’est plus sérieux, on change d’étage. On lit les essais, les prix, les critiques, les collections moins abimées. On trouve des classiques moins codés, les Robbe-Grillet. Mais aussi, les récits de vie, d’aventures, la sociologie, la politique, l’histoire, le journalisme… on s’inquiète d’un avion disparu, on se demande qui a tiré sur l’oiseau moqueur, on fait tout par ici. C’est un débat de société, c’est tout une case pour polémiquer. Et dans ces livres, parfois, quelques précurseurs avec des bonnes idées. Enfin, en bas, les livres d’artistes, les Burton, les De Vinci, les Wharol, un monde à part avec l’homme de Vitruve sous toutes ses formes. Puis, autour, pas mal d’histoires… Un peu comme celle là qui n’aurait peut être pas du s’arrêter là.
Aujourd’hui, dans la malle de l’arrière-grand-mère Georgia, la petite-fille entasse encore les livres d’histoire, ceux qu’elle ne voulait plus voir, ceux de Gide, les Signol, les Pagnol et les Zola entre autres. Ce sont des livres qu’elle n’ouvre plus, manquant le bon divan pour les lire.
C’était un auteur encore si peu connu. Ses livres récemment édités, si peu chroniqués, si peu longtemps sur les tables des librairies. Alors il avait trouvé ça : il entrait, comme il pouvait il entrait, se glissait, parfois dans le milieu même de la nuit, sans déranger personne. Alors il insérait son livre quelque part, là, au milieu de tous les autres livres, puis, comme il était venu, repartait. Ce serait cela, le destin imprévu de ses livres.
Et de toi, qu’aurait dit la bibliothèque?
Rez de chaussée des pieds lacés, usés par les marches forcées et le fractionné des couloirs.
1er étage, pas grand chose. On y trouve un mollet et des genoux qui claquent quand il faut s’assoir.
Elle ne pourrait décrire le reste car il y a un visage. Un visage qui attire. Des yeux qui sourient. Un regard qui embrasse. Des lèvres qui touchent et qui emportent. Des joues qui rapprochent et qui s’étirent. Des cheveux qui s’attachent et qui s’envolent. Et des rêves qui vivent et des souvenirs qui naîtront…Une vie qu’aucun livre ne pourrait écrire.