C’est une photo en couleur, trois visages occupent l’image. Au premier plan, la tête d’un nouveau-né, légèrement inclinée vers le bas, la peau encore rouge. L’enfant est vêtue d’un pyjama de velours blanc avec capuche, parsemé de motifs bruns. Ses yeux fermés sont deux petites boursouflures qui font écho avec le rebondi des joues. Ses cheveux sont noirs, le front et les sourcils sont plissés, une ride se forme entre les yeux. Les traits tirés, le front plissé, tout laisse à entendre qu’elle est sur le point de pleurer. A gauche de l’image, le visage de profil d’une femme aux cheveux roux. Ses lèvres roses, entrouvertes, tendent vers l’enfant. Trois gros plis apparaissent dans son cou pâle à cause du mouvement du baiser. Le profil, front-nez-bouche se dessine sur l’arrière-plan sombre de la photo. Il y a un mur blanc, avec une lumière jaune, une porte-fenêtre peinte en blanc donnant sur l’obscurité. Un homme est au-dessus des deux premiers visages, son menton touche le front de la femme et le crâne du nouveau nez. Il est le seul à regarder fixement la caméra. Ses cheveux sont bruns, son regard noir et il n’est pas rasé. Il porte un vêtement jaune et bleu agrémenté d’un écusson. Ses lèvres forment un léger sourire, ses yeux sont cernés.
Ils étaient trois dans le nid. Et le petit dit : « Poussez-vous, poussez-vous ! » Et l’un d’eux tomba du nid.
Elles sont deux sur la photographies, une femme et une petite fille, toutes deux avec les cheveux défaits, bouclés, volumineux. Seule la couleur les différencie, l’une a les cheveux roux, l’autre brun foncé. On dirait des algues flottant autour de leur tête. Elles sont allongées dans un grand lit moelleux rempli de coussins. Les draps sont beiges, recouverts de motifs entrelacés marrons. Une lumière douce estompe les contours. La femme a les yeux fermés, elle extirpe son bras de dessous les draps comme pour s’étirer. Sa bouche entrouverte laisse présumer une parole ou un bâillement. L’enfant à ses côtés regarde la caméra de ses yeux noirs rieurs. Elle semble ravie de reveiller la femme endormie.
Elles étaient deux dans le nid. Et le petit dit : « Poussez-vous, poussez-vous ! » Et l’une d’elles tomba du nid.
Sur la photographie, une jeune fille marche dans la neige. Derrière elle, le sol est recouvert d’une couche blanche, des arbres noirs dessinent leur squelette dans le ciel doré. De gros nuages aux nuances roses et bleues occupent toute la place. Au fond, on distingue des silhouettes, des passants aussi en équilibre sur la surface gelée. À droite, se dessine l’arrondi d’un bassin figé par le froid. Le blanc de la neige prend des teintes mauves. La jeune fille est en noir: blouson matelassé et gants, cheveux sombres attachés en arrière. Elle marche en regardant vers le sol, dans un demi-sourire, on aperçoit ses dents. Elle sait que la caméra l’observe et baisse les yeux dans un mouvement de pudeur. On sent la fraîcheur de l’air sur ses joues rosées, le plaisir mêlé à l’appréhension de glisser sur la neige fraîche.
Elle se trouva seule dans le nid.
Ils seront deux sur la photo. Elle est dans son pays d’origine qu’elle n’a connu qu’à l’âge de trente ans. C’est là-bas qu’elle l’a rencontré. Ils se ressemblent, ils ont les mêmes cheveux bouclés. Ils pourraient être frères et sœurs. La femme protège ses yeux plissés par le soleil de fin d’après-midi avec une main posée au-dessus. Au loin, les teintes de basses montagnes rivalisent avec les nuages rosés du soleil couchant. L’homme est plus grand qu’elle, la peau de miel, son bras est posé sur ses épaules et sa tête est tournée vers elle. Elle regarde la caméra en riant, une main posée sur son ventre proéminent.
Les familles s’amenuisent et s’agrandissent comme dans les comptines, il faut juste suivre la mélodie.