les lattes de bois verticales qui séparent l’image en neuf petits tableaux – la fenêtre en biseau qui fait le paysage grand à droite et rétrécit à gauche- la brume épaisse comme le serpent lent et constant – la pluie fine de biais et le vert des sapins derrière – sur la gauche tout au coin les toits marrons détrempés et un bout de route qui apparait – juste là devant, le haut d’un pilonne en bois pointe taillée et début de câble électrique épais noueux comme une corde mais on sait bien que c’est de la ferraille – l’herbe vert plus clair et un trait verticale d’herbe séché marron clair qui tranche, qui dessine comme un petit chemin – sous la brume là en face deux lumières comme des yeux dans l’arbre – et le deviné d’un toit gris en ardoise – et la pluie fine de biais avec toujours le vert des sapins derrière – la pluie qui ne fait pas de brui
plus de serpent, que du gris – partout sur la partie supérieure de l’image, toujours entrecoupée des neufs lames de bois verticales – seul les sapins verts foncés maintenant, presque noir cassent, coupent, mettent fin au gris infini et épais – et le bruit de la pluie – une goutte tombe par intermittence, se détache du reste du rideau, comme on dit, rideau de pluie que l’on entend mais ne perçoit plus – d’un coup c’est comme si les arbres s’étaient rapprochés les uns des autres, massés, comme pour former une forêt toute serrée, comme s’ils avaient avancés, s’étaient rapprochés de la maison, ils sont plus près – l’herbe n’apparait presque plus – quatre lumières à présent, lumière blanche qui traverse le gris là où il se fait moins épais, presque un peu transparent, là où il laisse deviner le vert derrière
les neufs lattes de bois découpent la nuit- neuf tranches noires et dans le coin gauche, là où la fenêtre se rétrécit, le reflet de la lampe et le haut d’un meuble en bois lui aussi- et partout dans la vitre le reflet de la pièce le mur blanc qui apparait dans chaque tranche noire de nuit – points lumineux incertains oranges ou bleus, fixes – dans certaines tranches noires de nuit, pas de point lumineux, juste du noir, rien que du noir juste interrompu par la latte de bois – en bas l’ultime trace d’un arbre, qui apparait en contraste – point lumineux blancs qui l’éclairent et le font apparaitre par-dessous – il apparait vert bleuté presque gris, juste une ombre presque rien en fait –– et le bruit de la pluie –
tout le même paysage comme vu au travers d’un filtre gris – le hennissement des chevaux plus bas sur la route, le bruit de leurs sabots, les voix de celles qui s’occupent d’eux– et le bruit de la pluie – les villages qui se devinent en face, derrière le filtre gris, ils montent à la verticale comme collés sur la surface verte qui se devine humide- ils forment des petits tas marrons parmi des étendues vert clair – on devine des arbres, de petites forêts en grappe vert foncé- la pluie suit les lattes de bois verticales et se prolonge certainement, en dehors du cadre- les arbres devant la fenêtre eux, ne se distinguent pas, ne se devinent pas, ils sont là, vraiment- leurs épines et leurs feuilles, leurs branches et leurs troncs- une voiture passe, hors champs, juste le bruit des pneu sur la route mouillée-
filtre gris cotonneux toujours accroché en face – quelques trouées vers le bas – entre deux lattes de bois, grappe de maisons devinées – pluie au premier plan, moins sonore, plus visible – les arbres devant la fenêtre dessinent la brume – des branches semble sortir la fumée grise qui se déplace imperceptiblement – si on se détourne et qu’on y revient, la forme a changé, le gris s’est atténué ou renforcé, en tout cas il s’est déplacé – les arbres eux sont là, derrière tout est plus incertain- en haut derrière le gris, il y a l’ombre d’une crête, l’ombre des arbres qui dessinent une crête – seule frontière visible entre ce qui est le ciel et ce qui ne l’est pas – parfois une masse de gris se coince quelque part là en face, faisant deviner qu’il y avait en fait un creux entre deux sommets- les neufs lattes de bois, elles, ne bougent pas –
l’écriture comme la pluie, ininterrompue – et par intermittence, la goutte qui se détache comme les tirets détachent les segments – pluie et variations apaisantes merci Line !
On rentre dans le mystère des images. Beau texte.