Le corps, c’est des bouts de napperons que l’on raccroche l’un à l’autre, des assemblages de tissus musculaires, de tissus nerveux, de tissus adipeux. Ajusté à la main, à l’aiguille, au crochet, l’être s’habille d’étoffes de squelette, se ficèle de broderies de chair. Des bords en dents referment l’ensemble au niveau de l’échine en courbe. C’est un ouvrage très régulier, la dentelle : un travail de la taille de trente-quatre gauges et de la grossièreté d’une épingle à coudre. Souvent, aussi, ça fait comme une bavure au niveau du tissu. À ce moment-là, on allonge un peu de K2R pour éviter les tâches menaces et les hématomes tenaces. Ce sont les marques de ces habits plein de cavités, chiffonnés qui plient malgré le repassage.
Le corps se dissimule d’une petite laine au-dessus de la combinaison dermique et du textile cutanée. C’est qu’il fait froid aussi quand le vent exfolie la toile, c’est qu’il faut tenir au chaud les filaments nerveux et les lacets sanguins. Les rideaux ondulés se laissent peaufiner par les arabesques du temps. Avec des coutures sur les coupures, on fait dans la dentelle. Les pensées en mailles s’agrafent autour des gestes répétitifs et des trous percutanés du quotidien. Les vêtements se drapent de bordures en lisière au niveau des membranes, d’ourlets en cicatrices au bord des membres. Dans la mouvance de l’existence, il y a, alors, la peur viscérale de perdre le fil et le désir artériel de prendre le pli. Et le corps avec tous ses tissus, laisse dans son sillage la trame défilante d’une histoire surfilée.
Tous ces tissages, c’est très beau et apaisant. Vais relire souvent ton texte. Merci.
J’ai beaucoup aimé ton texte et les alliages corps/textile .
Des mots qui se tissent pour dire les corps, pour dire les coutures , pour dire les cicatrices…
Le corps qui pourrait aussi devenir lambeaux , mais ça c’est une autre histoire