Alors, quoi de neuf ? au téléphone, dans la rue, à table, en pleine face, c’est une épidémie, une manie, un gimmick qui les caractérise, eux et leurs tournures de langage propices à les identifier quand bien même elle ne reconnaîtrait pas leurs voix, mais elle les reconnaît, leurs voix, hélas, il y en a même plusieurs qui se dupliquent au fil du temps. Alors, quoi de neuf ? Pourquoi faut-il qu’il y ait toujours du neuf ? Et pourquoi cet alors qui rajoute un problème au problème, cet alors jeté à la face dont ils ne soupçonnent pas la violence, cet alors qui tombe comme un couperet ? Si alors indique le temps, pointe un moment du passé ou de l’avenir, que répondre à leurs insinuations ? Comment et que savent-ils ? Qui leur aurait dit quoi ? Prêcheraient-ils le faux pour savoir le vrai ? Si alors introduit l’expression d’une conséquence, dans ce cas n’en parlons plus. Mais les voilà qui insistent : Alors, quoi de neuf ? La question la met à chaque fois mal à l’aise et la déstabilise. Alors, quoi de neuf ? Rien ou pas grand-chose, ou si peu, ça va, ça va… Ce rien l’agace, lui évoque le vide de son existence dont elle n’a pas envie de parler, lui rappelle que non, il ne s’est rien passé, non, elle n’a rien vécu d’autre que l’ordinaire, oui, sa vie est banale, elle a sorti les poubelles, refait le lit, rangé les courses, travaillé, fait l’amour, toujours avec son mari, non, elle n’a pas constaté de changement notable, elle n’a pas de choses neuves à relater, si, elle a acheté un nouveau pull mais c’est banal, un pull neuf, tout le monde s’en fiche. Alors, quoi de neuf ? rien à dire, rien à répondre, pourquoi veulent-ils du neuf systématiquement, pourquoi la vie ordinaire devrait-elle se teinter de neuf quand tout va plutôt bien, que les enfants poussent bien, que le travail se passe sans problème notable, que la santé est plutôt bonne ? Alors, quoi de neuf ? elle ne raconte pas les détails, les maux de dos, la migraine, l’ongle retournée, la prise de bec avec les voisins, une légère amélioration peut-être des rapports avec sa mère, et encore. Alors, quoi de neuf ? Rien, merci, tout va bien. Arrive alors la variante tant redoutée : « Qu’est-ce que tu racontes de beau ? »
Si bien démonté ce « Alors quoi de neuf ? », comme un masque retiré à chaque fois qu’il est prononcé.
Bonjour, merci pour votre commentaire ! Agréable d’être lue…
Il me semble que la variante tant redoutée ramène à l’enfance, le quoi de beau davantage au quoi de neuf. Merci pour la piqure de rappel !