1 Le trajet en voiture pour se rendre sur l’île de Skye avait été long. 2 Une fois sur l’île, impossible d’aller plus vite que l’ont décidé les contours des routes, les passing places et les moutons qui habitent le paysage. 3 Ils s’étaient connus à Londres. Elle, nord-américaine, éduquée à Yale, russophile, passionnée de livres illustrés pour enfants. 4 À l’arrière, l’enfant s’impatientait. 5 Ils avaient loué un cottage pour le week-end. 6 À leur arrivée, le feu crépitait déjà dans la cheminée. Sur les tables de nuit, on avait déposé des shortbreads. 7 Le jour avait révélé une étendue lumineuse, entrecoupée de flancs de montage tout droit sortis de la mer. 8 Ouverte en 1831, la distillerie Talisker est la plus ancienne de l’île. 9 Ils avaient passé le reste de l’après-midi à faire des ricochets avec des galets trouvés sur la plage. 10 L’ingrédient le plus important dans la fabrication du whisky est l’eau. 11 Sans regarder les plaques d’immatriculation ou l’état des routes, en fixant seulement l’horizon, ils avaient retrouvé le ciel changeant de la steppe. 12 Il n’y a qu’une route qui mène à Elgol, la B8083. 13 L’enfant, sortie du porte-bébé, s’entraînait à marcher en tenant un parent dans chaque main. 14 Une fois arrivé au bout, à toucher la mer, on fait demi-tour et on découvre l’autre face des montagnes. 15 « Des touches poivrées de chêne, des notes de galets élimés par la brume marine, et un peu de varech. » 16 Il levait les yeux vers les sommets. 17 Il en fallait peu pour qu’elle ne s’élance seule. 18 Ils y retourneraient en juin, quand les nuits existent à peine, quand subsiste toujours une lueur de clarté. 19 Il n’entendait plus les pleurs de l’enfant qui avait faim. 20 En géographie, on appelle cette ligne le 57ème parallèle nord. 21 Ses doigts laçaient les chaussures de randonnée. Dans le geste, on lisait le savoir-faire et l’impatience d’être déjà seul dans les collines. 22 « Ce whisky est conservé dans des tonneaux en chêne américain qui expriment la pureté absolue, la douceur et la puissance. » 23 Sur l’île, le ciel empressé donne à la lande des couleurs qui ne sont jamais identiques. 24 Deux chaussures, à la semelle rigide et souple, tout éclaboussées de boues et de minuscules graviers, gravissaient un sentier de randonnée. 25 Ce jour-là, tout était ocre. 26 Vus de loin,les bâtiments blancs ressemblaient à de larges cubes de sucre posés dans la bruyère. 27 En continuant tout droit, à travers les flots glacés, on atteindrait les rives de la Norvège. 28 Il croyait peut-être tutoyer Dieu en gravissant ainsi la montagne. 29 Certains arcs de parallèle sont utilisés pour tracer des frontières. Par exemple le 49ème parallèle nord, qui constitue la majeure partie de la frontière entre le Canada et les États-Unis. 30 L’enfant s’était endormie vite, fatiguée par la promenade et l’air marin. 31 Autour, le silence et le relief avaient quelque chose d’étourdissant. 32 Les fairy pools doivent leur nom à une fée princesse qu’aurait épousée un chef de clan. 33 Ivresse. 34 Une chaussure a fait basculer un caillou, emmenant avec elle dans sa chute une coulée de gravillons. 35 Sur l’île, l’eau s’infiltre partout – dans les lochs, les marais, sous les sentiers qui deviennent spongieux sans prévenir. 36 Il allait avoir trente-trois ans. 37 Qu’est-ce que boivent les anges ? 38 Toute la nuit, elle avait consulté son téléphone. La connexion passait mal ; elle avait peur de louper un appel important. 39 Ils avaient projeté d’aller au Danemark à l’automne. Elle voulait voir la statue de la sirène. D’ici là, l’enfant saurait bien marcher. 40 Avant de partir seul en randonnée, il est recommandé de laisser à un proche son itinéraire prévu. 41 Le parallèle nord est distant de l’équateur de 6 320 km et du pôle Nord de 3 682 km. 42 Il avait fait si froid cette nuit. 43 Le magasin Latitude 57, situé sur les rives de la baie,vendait des souvenirs sur un thème nautique, bateaux à voile et poissons en fer-blanc suspendus au mur, comme arrêtés dans leur course marine. 44 Ses plaintes n’avaient pas suffi à lui faire retrouver son chemin. 45 Cette nuit-là, à Moscou, sans la chaleur du poêle, ils s’étaient blottis l’un contre l’autre pour se réchauffer. 46 Elle était restée une semaine, le temps des recherches qui avaient fini par s’estomper. 47 Nombre de distilleries se situent à proximité d’un cours d’eau, souvent pure et glacée. 48 Après les vacances de Pâques, les cours de russe avaient repris. 49 Au-delà de Riga, elle n’imaginait que du vide, du froid, la steppe recouverte de neige. L’imaginaire de Docteur Jivago était tenace. 50 Le sac contenait une bouteille de whisky. Elle voulait la donner à quelqu’un qui sache y retrouver, à chaque gorgée, une saveur de lui. 51 Au-delà de l’Europe, la ligne traversait des milliers de kilomètres de vastes étendues, en Russie. 52 Sur le mur de salon, une photo élargie, presque grandeur nature. Il est en tenue de randonnée, genoux à l’air, les gouttes de pluie n’atteignent pas le sourire, intact. 53 L’enfant marchait désormais seule. 54 Elle avait établi de retrouver l’Amérique du Nord, là où elle pourrait repartir à zéro, comme l’expression le voulait. 55 Chaque année, l’hiver encore bien là, des perce-neiges viendraient éclore sur le rebord des stèles à peine visibles. 56 La quantité de whisky qui s’évapore lors du processus de maturation est nommée angels’ share, « la part des anges ».
Merci pour la balade Elise ! On y est, paysages, couleurs, odeurs, eau, whisky…… Très bien dosé le mélange, ça se boit très bien, ça ramène une douce chaleur, très agréable, parfaitement équilibré. Avec en plus l’histoire, les personnages qu’on devine, qu’on construit un peu soi-même grâce à la liberté que tu nous laisses de le faire
Merci beaucoup, Juliette, j’aime bien cette idée de dosage pour l’écriture!