Avaler d’un trait la lumière de l’aube ; avaler une bouchée de paysage, une gorgée de nuages et une lampée d’écume ; avaler à la hâte toute honte bue ; avaler à contre-cœur un zeste de rancune ; avaler avec application la nomenclature de la chimie organique ; avaler avec avidité le dictionnaire amoureux des dictionnaires ; avaler avec difficulté le nom des volcans islandais ; étancher sa soif en avalant la mer et ses poissons, avaler Le maître et Marguerite de Boulgakov ; ne pas avaler ses mots pour parler d’aphasie ; avaler des yeux le spectacle de la vie ; se sentir une âme de Gargantua et avaler le monde ; avaler son parapluie ; oups ! avaler sa langue tout en avalant la pilule donc avaler des couleuvres pour ne pas avaler un bouillon.
Ne pas avaler. Retenir son envie de déglutir. Garder en bouche le plus longtemps possible l’onctuosité d’une mousse au chocolat à l’ancienne. En tapisser le palais. L’écraser délicatement avec la langue en laissant pénétrer l’arôme jusqu’aux tréfonds du cerveau, jusqu’à la pointe des pieds et jusqu’au bout des ongles. Fermer les yeux. La luette palpite d’impatience. Tant de bienveillance dans si peu de matière ! Fondre sous le charme de cette douce amertume que la salive liquéfie lentement dans la cavité tiède de la bouche et céder à l’urgence, avaler !
Délice poétique de mots!
J’en ai l’eau à la bouche de ces mots joliment mis en bouche
On pourrait se perdre dans votre Ne pas avaler. Avaler court en terrain connu. Ne pas avaler se tient, retient, au bord de l’inconnu.
J’ai gobé votre texte ! Merci beaucoup !
Merci à vous tous.tes pour vos commentaires que je savoure tout crus ( verbe croire bien sûr ) avant peut-être de les avaler…
« ne pas avaler » m’a donné des picotements dans le palais. l’image n’était pas dans ma tête mais dans ma bouche.