Souvent le soir l’Echiquier – attention ! – attendait, pièges et pièces de bois brillant. Mains fourmillent de peur coeur d’audace cogne fort, on s’assoit.Les poings fermés se tendent:
-Choisit ! dit le Grand Sioux.
Les joueurs progressivement s’effacent à l’angle de la fenêtre, disparaissent dans l’ondulation du léger rideau. Ne subsiste que le bel espace carré en x dimensions, aux lignes de force tendues par les nerfs, tout est calme, concentré, apaisant et sûr …mais soudain MAT ! – une explosion.
D’un revers de la main pourtant si sage l’échiquier vole dans les airs, les pièces alors alourdies tombent et s’entrechoquent bruyamment sur le parquet.
XXX
– Des briques à la sauce cailloux, annonçait-elle l’air triomphant, la tête dans les mains, les coudes plantés fiers de chaque coté de son assiette vide face à laquelle la mienne semblable.Ces soirs là personne à la cuisine, pas de parent, rien à manger de chaud pour les enfants sinon « des briques à la sauce cailloux » comme elle disait méchamment.
Alors la salle à manger devenait d’un seul coup dure et froide , rétrécissait , se rétractait toute entière dans ce vide aux briques-cailloux craché par ma soeur et me chassait.
XXX
Un amas de petites, grandes, moyennes boules de tissus de toute couleurs habitent l’armoire de ma chambre, des vêtements très bien rangés parfaitement pliés, la sienne.Puisqu’elle est partie à l’école, on pioche ce qu’il nous faut chez elle, peu importe les cris et remontrances, les cheveux tirés à son retour.Se sauver dans le fond du jardin, se cacher dès que ses pas se font entendre, attendre l’arrivée du Grand Pacificateur. Tous vêtements détestables prouvent que l’on a ni fourrure ni griffe ni dents, c’est une offense incontournable.