C’étaient de très grandes nuées qui faisaient trembler la surface de la terre. Souviens-toi des sept souffles devant le trône du roi pourpre, le dragon dévorait l’enfant nouveau-né de l’accouchée.
Souviens-toi Holodomor sur une terre où le bâton planté fleurit en abondance. Le peuple affamé aux nippes déchiquetées rampait, dissimulé des regards, anéanti de douleur. Les cadavres puants déjà s’empilaient.
Souviens-toi de l’homme qui s’avançait contre l’oubli il mangeait le livre. Il apprenait par cœur, il décorait sa maison des pensées défuntes, des images oubliées. Il tenait le chiffre trente à la main du sonnet de la consolation. Deux mille personnes se levaient avec lui.
« J’acquitte à nouveau ma dette de malheur »
Souviens-toi Mémorial la mémoire effacée humiliée oubliée. Souviens-toi du froid glacial de la parole niée gonflée des stratocumulus de l’outrage assumé.
« Qu’on coupe court à cette hystérie »
Un roi chasseur d’ours et de tigres s’avance sur la scène du monde nouveau. Sa parole d’épée aiguisée à deux tranchants avale un par un ceux qui l’affrontent. Un homme de peu d’esprit de peu de théorie d’esprit souffle le vent de la nuée prochaine. Il vit replié dans une forteresse vide.
« C’est moi de A à Z »
C’est le retour des grands vents aux quatre coins de la terre. Le nouveau messie dérisoire son bras levé d’un sceptre d’or annonce la troisième Rome. Il goûte l’ivresse délirante de la conquête.
« Vous n’aurez pas le temps de cligner des yeux »
Souviens-toi du chant imperceptible annonce du tohu-bohu, de l’étoile d’absinthe liquide de la prochaine catastrophe, de l’amertume de l’eau. Souviens-toi du pouvoir de scorpion que l’on donne aux sauterelles. Vois la nuée des locustes au moment où la cétoine dorée dévore la rose.
Entends gronder l’outrage furieux qui emporte la foule fuyante et ses impédiments. Qui peut combattre le fauve ? Un roi chasseur d’ours et de tigres annonce l’heure de la nouvelle moisson, il envoie la faucille labourer la terre sèche, pressée à vif, à fleur de nerfs.
Ça y est.
Le faux prophète clamant dans le désert verse le bol de la colère, bol du sang renversé de la grande terreur retrouvée. Le serviteur du peuple avance sur la scène de la nuée vrombissante des sauterelles, il se tient debout dans la tornade, il défie la bourrasque. Craignez les plaies le soufre la suie. Craignez qu’il n’y ait plus de délai.
Qui capture sera capturé.
Qui poignarde sera poignardé.
Ce sont de très grandes nuées qui font trembler la terre. Entends l’écho du grand cri. Entends résonner les larmes de ceux qui se sont assis pour pleurer.
« Si je t’oublie que ma main droite m’oublie »
Souviens-toi des villes dévastées.
Souviens-toi de tous ceux qui ont résisté.
Souviens-toi des poètes dans les temps de détresse.
De l’homme de peu de poids qui se tenait debout la face tournée vers les grands vents violents.
pudique en même temps que très, très beau
Humilité nécessaire devant Saint John Perse et respect pour les victimes de la guerre. Merci pour le commentaire.