Lorsqu’elle a ouvert, c’était un événement : le libraire était un transfuge d’une entreprise technologique. Au milieu de sa carrière, il quittait le confort d’un emploi salarié pour réaliser son rêve. Ouvrir une librairie. Il était, paraît-il, le plus âgé de sa promotion lors de sa formation aux métiers du livre.
Ancrée en Bretagne nord, son nom claque comme le vent de Noroit.
Au début, elle était de dimensions raisonnables. Elle occupait une ancienne mercerie, au rez de chaussée d’une maison en granit, en haut de la rue des chapeliers. Cette voie est raide, la maison s’aligne sur la pente mais pas la vitrine bleue qui elle reste de niveau. En conséquence la partie droite de la vitrine est à hauteur des enfants et leur est dédiée, tandis que la partie gauche surplombe la rue jusqu’à un mètre au dessus, elle est dédiée aux adultes.
Au début, les visiteurs venaient en curieux. Cette librairie pouvait-elle s’aligner sur la plus grande de la région, à Rennes, celle à qui se commandait les titres rares, spécifiques que l’officine de la Presse n’avait pas. Très vite, tous réalisèrent que oui, le libraire était peut-être tout neuf, mais il connaissait son métier. Il avait, pas tout et dans ce cas il commandait, mais déjà un choix très large. Sa devise étant d’avoir peu d’exemplaires mais beaucoup de titres. Et surtout, il savait vous retrouver sur ses étagères, le livre dont vous ne saviez plus le titre et n’aviez jamais retenu le nom de l’auteur. Il suffisait de se souvenir de l’histoire, même vaguement. Internet n’existait pas. C’était le super pouvoir du libraire, quelque soit le sujet, le genre, la tranche d’âge concernée, il savait tout et connaissait la réponse. Progressivement, la librairie est devenue une attraction de la ville parfois même elle suscitait à elle seule le voyage.
Trente années ont passé, la libraire s’est étendue en profondeur et en hauteur dans la maison d’origine. Le créateur a laissé la place à une équipe. Parfois, la réponse aux questions s’aide des ordinateurs, mais le bonheur de circuler dans les rayons est toujours là.
Un joli récit avec ses « au début » qui se répètent. une traversée du temps.
Merci Françoise pour ta lecture et ton commentaire.