#versuneécopoétique #02 | Laisser des traces ou des déchets

J’ai rencontré ce matin la brigade des pédagogues « déchets » de la métropole. Tee shirt rouge, Veste rouge au logo de la métropole, on ne les confond avec personne. Ils sont six pour toute la semaine à Lergnes pour expliquer le tri aux habitants, le recyclable, les déchets ménagers, le verre, les vêtements, la déchetterie de la commune, les composteurs gratuits offerts par la métropole. Ils sont six et attendent le feu vert de leur responsable avant de partir en campagne. Ils sont sereins « cela prendra du temps », ils ne regardent pas dans les poubelles « pas de culpabilisation », ils croient à la bonne parole en missionnaires rémunérés de notre métropole écologiste. Chez chacun, ils poseront cinq questions. Ils ne sont pas encore dans ma rue, mais elle figure sur leur plan qui recense tous les points de collecte de la commune.

Hier je prêtais mon Karcher à ma voisine; quand elle me le rend le moteur hocquète et ne délivre qu’un mince filet d’eau. Ça ne se répare pas, pas de pièces détachées, sauf à le renvoyer en Allemagne. Bon de transport gratuit, coût de réparation forfaitaire (la moitié du prix du neuf ou l’équivalent de trois jours de location). Après avoir trouvé un carton de bonne taille (castorama), du gros scotch et du rembourrage pour protéger l’engin, l’envoi est prêt (chez chronopost). Une dernière hésitation : racheter un neuf ou remplacer ? On choisit le renvoi, moins dérangeant qu’un nouvel achat en magasin et le transport de l’ancien en déchetterie et plus conforme à une certaine idée de l’empreinte qu’on laisse.

Mon vrai souci n’est pas là. Mon vrai souci ce sont les supports numériques.Bandes magnétiques des vidéos cassettes ou des cassettes audio, disque dur, clés USB, disquette, CD rom forment une classe de déchets particulièrement encombrante et mystérieuse. Archives illisibles sans l’appareil et le logiciel adéquat, constitué de plastique et de matériaux précieux, elles ne retrouvent que rarement une seconde vie, même muséale ou semi-muséale. Les disques vinyle ont retrouvé une vogue, les CD rom peuvent effrayer les merles dans les cerisiers et les bandes servir de chevelure endiablée à quelque épouvantail. Plus rares et plus pointus les très nombreux montages proposés par des bricoleurs passionnés pour réutiliser la partie matérielle de l’objet (voir Pinterest DIY cassettes…etc.). Pour le reste on transfère de la cassette VHS ou audio à un autre support plus récent, et ainsi de suite dans une course folle derrière les nouveaux formats. Mais le contenu, le contexte, l’auteur, le sens comment les conserve-t-on ? Si j’étais archiviste, je me ferais du souci. Ils s’en font et produisent principes directeurs.

Laisser des traces qui ne soient pas que des déchets. Chaque jour, la question se pose; chaque jour il faut la résoudre.

A propos de Danièle Godard-Livet

Raconteuse d'histoires et faiseuse d'images, j'aime écrire et aider les autres à mettre en mots leurs projets (photographique, généalogique ou scientifique...et que sais-je encore). J'ai publié quelques livres (avec ou sans photo) en vente sur amazon ou sur demande à l'auteur. Je tiens un blog intermittent sur www.lesmotsjustes.org et j'ai même une chaîne YouTube où je poste qq réalisations débutantes. Voir son site les mots justes .

2 commentaires à propos de “#versuneécopoétique #02 | Laisser des traces ou des déchets”

  1. Entre la relique et le rebut, je me posais un peu la même question que vous.

  2. nous nous posons la même question (mais vous y ajoutez un petit sourire d’écriture), j’y ajoute le désir de ne conserver qu’aussi longtemps que moi et de ne pas encombrer les suivants