Nous remontions le quai désert, le train fuyait au loin, nous étions dépités, et même effrayés de l’avoir raté. Nous n’avions plus d’argent, nous ne connaissions personne dans la petite ville. La nuit était épaisse, nous prîmes le chemin du bois, nous avançâmes lentement sur le trottoir, les yeux fixés sur nos pensées, notre angoisse, ma terreur. Arrivés à l’orée du bois nous échangeâmes un regard avant d’y pénétrer. Attentifs au moindre bruit, au moindre craquement sous nos pas, nous marchâmes timides et bien décidés à dégotter rapidement notre nid pour la nuit. Nous fîmes une halte près d’un ruisseau. L’eau coulait doucement et ce murmure, me réconforta. Ensemble nous levâmes les yeux, les arbres se dressaient autour de nous, noirs et immobiles, réconfortants, la pâle lueur de la lune filtrant de la canopée nous indiqua à deux pas, une place recouverte de feuilles séchées, de terre et d’herbes emmêlées. Nous poussâmes un cri terrible avant de nous affaler, nous nous enlaçâmes, nous nous embrassâmes, nous nous serrâmes très fort, nous criâmes une dernière fois et bonne nuit.