Un chemin mène au pied d’une grande bâtisse en pierre, étirée, presque aussi longue qu’une magnanerie ; on monte vers la partie d’habitation par un escalier et un balcon sous une glycine noueuse ; je connais l’extérieur, je peux la revoir, je pourrais la louer même aujourd’hui comme ces groupes de touristes.
Mais le souvenir intérieur ?
Un long couloir y courir tomber se rouler de joie ; se faire rappeler à la politesse par ses proches car l’on n’est plus chez soi dans ce grand couloir du temps jadis.
Et quoi aux murs, tableaux peintures armoires de bois massif.
Dans une pièce, désormais impossible à situer, est assise dos à une cheminée de pierre une vieille femme, la peau du visage comme une vieille noix fripée.
La cheminée est presque éteinte sûrement, une braise brûle encore probablement ; elle est apaisante, cette vieille dame, oncques ne le fut une antre à l’odeur de feu de bois.
Sa chaise est en rotin tressé, rustique, épique ; à ses pieds une corbeille en osier, pleine de pelotes de laine aux couleurs de fruits rouges, un tricot au repos ; les tissus des rideaux amortissent le passage du temps. Visible depuis l’étroite fenêtre, un lièvre au loin traverse le champ jusqu’au pied d’un mûrier.
Il fait sombre à l’intérieur, un sourire bienveillant anime les rides du visage qui raconte une histoire des Badlands, mouvements qui se poursuivent dans les plis d’un châle de soie. Elle se relève, se penche lentement pour faire infuser quelque tisane, verveine, tilleul, ou sauge, dans un service en terre posé sur une table basse. Une assiette de figues est là.
Les pattes avant près de la laine, il y a aussi un chien, un chien noir qui ressemble à Shunka Sapa.
rien que le mot et me suis dépêchée de venir humer le pays
Humer, c’est le mot. Se rouler à terre, les rideaux qui attenuent le passage du temps, vie ralentie et le passage fugace d’un lièvre contrastant avec l’intérieur. Merci
Comme un tableau, touche par touche, avec délicatesse, au milieu des matières : soie, rideau, rotin, laine…et « la cheminée presque éteinte, la braise qui brûle encore » comme une métaphore du personnage (?)
Je suis parti de deux souvenirs-scènes très fugaces d’enfance qui se passaient je crois dans la même maison, et en même temps que j’écrivais, vais-je savoir pourquoi, je suis allé lire des écrits sur le travail aux piquants de porc-épic, et je suis tout de suite tombé sur un conte Lakota qui résonnait bien avec la scène, de la maison perdue et le portrait du personnage servant la tisane. Je ne sais pas si ça respecte bien la consigne, puisque ça vient aussi boucher, ou supporter, le manque de souvenirs ! Mais tout juste il y avait plus probablement un chat qu’un chien.