En tenue jaune fluo de la tête aux pieds, le tronc sanglé dans un gilet orange tout aussi fluo, à trois mètres du bâtiment des sanitaires, à côté des douze marches qui mènent aux terrains de pétanque, un ouvrier communal poireaute au volant d’un imposant camion poubelle, moteur en marche, dans un froid comme on n’en a plus connu depuis plusieurs novembres, ce qui provoque une buée importante à l’intérieur de l’habitacle déjà saturé par la fumée d’une cigarette que l’ouvrier communal tient d’une main pendant qu’il scrolle sur son smartphone du pouce de l’autre main, également recouverte d’une mitaine qui a vécu.
A l’arrière du camion, un collègue pareillement fluo, le crâne garni d’un bonnet bleu turquoise, les mains protégées par d’épais gants de travail noircis, arrime la seconde poubelle verte au système d’accroche qui la lèvera, la renversera, permettra qu’elle se vide, puis la reposera sur ses roues bancales, ce qui amènera le collègue à la ranger dans le cabanon toujours à ciel ouvert, malgré les demandes répétées de certains campeurs agacés par les corneilles qui viennent éventrer les sacs quand les couvercles des poubelles restent à l’oblique tant la quantité de déchets emballés ou non empêche qu’ils soient entièrement rabattus.
Le collègue au bonnet bleu turquoise rejoint le collègue à la cigarette à l’avant du camion. Il n’est pas fumeur et donc le voilà qui tousse en pestant comme à chaque fois.
Le camion démarre. Une corneille se désespère sur le toit des sanitaires.
